Complete Works of Gustave Flaubert

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Complete Works of Gustave Flaubert Page 279

by Gustave Flaubert


  — Tu t'y prends mal dit Bouvard ; et il se mit à faire des risettes au chien en proférant des douceurs.

  Le chien sans doute les comprit. — Il s'efforçait de le caresser, lui collait ses pattes sur les épaules, les éraflait avec ses ongles.

  — Allons ! maintenant ! voilà qu'il a emporté ma culotte !

  Il se coucha dessus, et demeura tranquille.

  Enfin, avec les plus grandes précautions, ils se hasardèrent l'un à descendre du plateau, l'autre à sortir de la baignoire ; — et quand Pécuchet fut rhabillé, cette exclamation lui échappa :

  — Toi, mon bonhomme, tu serviras à nos expériences !

  Quelles expériences ?

  On pouvait lui injecter du phosphore, puis l'enfermer dans une cave pour voir s'il rendrait du feu par les naseaux. Mais comment injecter ? et du reste, on ne leur vendrait pas de phosphore.

  Ils songèrent à l'enfermer sous la machine pneumatique, à lui faire respirer des gaz, à lui donner pour breuvage des poisons. Tout cela peut être ne serait pas drôle ! Enfin ils choisirent l'aimantation de l'acier par le contact de la moelle épinière.

  Bouvard, refoulant son émotion, tendait sur une assiette des aiguilles à Pécuchet, qui les plantait contre les vertèbres. Elles se cassaient, glissaient, tombaient par terre ; il en prenait d'autres, et les enfonçait vivement, au hasard. Le chien rompit ses attaches, passa comme un boulet de canon par les carreaux, traversa la cour, le vestibule et se présenta dans la cuisine.

  Germaine poussa des cris en le voyant tout ensanglanté, avec des ficelles autour des pattes.

  Ses maîtres qui le poursuivaient entrèrent au même moment. Il fit un bond et disparut.

  La vieille servante les apostropha.

  — C'est encore une de vos bêtises, j'en suis sûre ! — Et ma cuisine, elle est propre ! Ça le rendra peut-être enragé ! On en fourre en prison qui ne vous valent pas !

  Ils regagnèrent le laboratoire, pour éprouver les aiguilles. Pas une n'attira la moindre limaille.

  Puis, l'hypothèse de Germaine les inquiéta. Il pouvait avoir la rage, revenir à l'improviste, se précipiter sur eux.

  Le lendemain, ils allèrent partout, aux informations — et pendant plusieurs années, ils se détournaient dans la campagne, sitôt qu'apparaissait un chien, ressemblant à celui-là.

  Les autres expériences échouèrent. Contrairement aux auteurs, les pigeons qu'ils saignèrent l'estomac plein ou vide, moururent dans le même espace de temps. Des petits chats enfoncés sous l'eau périrent au bout de cinq minutes — et une oie, qu'ils avaient bourrée de garance, offrit des périostes d'une entière blancheur.

  La nutrition les tourmentait.

  Comment se fait-il que le même suc produise des os, du sang, de la lymphe et des matières excrémentielles ? Mais on ne peut suivre les métamorphoses d'un aliment. L'homme qui n'use que d'un seul est, chimiquement, pareil à celui qui en absorbe plusieurs. Vauquelin ayant calculé toute la chaux contenue dans l'avoine d'une poule, en retrouva davantage dans les coquilles de ses oeufs. Donc, il se fait une création de substance. De quelle manière ? on n'en sait rien.

  On ne sait même pas quelle est la force du coeur. Borelli admet celle qu'il faut pour soulever un poids de cent quatre-vingt mille livres, et Keill l'évalue à huit onces, environ. D'où ils conclurent que la Physiologie est (suivant un vieux mot) le roman de la médecine. N'ayant pu la comprendre, ils n'y croyaient pas.

  Un mois se passa dans le désoeuvrement. Puis ils songèrent à leur jardin.

  L'arbre mort étalé dans le milieu était gênant. Ils l'équarrirent. Cet exercice les fatigua. — Bouvard avait, très souvent, besoin de faire arranger ses outils chez le forgeron.

  Un jour qu'il s'y rendait, il fut accosté par un homme portant sur le dos un sac de toile, et qui lui proposa des almanachs, des livres pieux, des médailles bénites, enfin le Manuel de la Santé, par François Raspail.

  Cette brochure lui plut tellement qu'il écrivit à Barberou de lui envoyer le grand ouvrage. Barberou l'expédia, et indiquait dans sa lettre, une pharmacie pour les médicaments.

  La clarté de la doctrine les séduisit. Toutes les affections proviennent des vers. Ils gâtent les dents, creusent les poumons, dilatent le foie, ravagent les intestins, et y causent des bruits. Ce qu'il y a de mieux pour s'en délivrer c'est le camphre. Bouvard et Pécuchet l'adoptèrent. Ils en prisaient, ils en croquaient et distribuaient des cigarettes, des flacons d'eau sédative, et des pilules d'aloès. Ils entreprirent même la cure d'un bossu.

  C'était un enfant qu'ils avaient rencontré un jour de foire. Sa mère, une mendiante, l'amenait chez eux tous les matins. Ils frictionnaient sa bosse avec de la graisse camphrée, y mettaient pendant vingt minutes un cataplasme de moutarde, puis la recouvraient de diachylum, et pour être sûrs qu'il reviendrait, lui donnaient à déjeuner.

  Ayant l'esprit tendu vers les helminthes, Pécuchet observa sur la joue de Mme Bordin une tache bizarre. Le Docteur, depuis longtemps la traitait par les amers ; ronde au début comme une pièce de vingt sols, cette tache avait grandi, et formait un cercle rose. Ils voulurent l'en guérir. Elle accepta ; mais exigeait que ce fût Bouvard qui lui fît les onctions. Elle se posait devant la fenêtre, dégrafait le haut de son corsage et restait la joue tendue, en le regardant avec un oeil, qui aurait été dangereux sans la présence de Pécuchet. Dans les doses permises et malgré l'effroi du mercure ils administrèrent du calomel. Un mois plus tard, Mme Bordin était sauvée.

  Elle leur fit de la propagande ; — et le percepteur des contributions, le secrétaire de la mairie, le maire lui-même, tout le monde dans Chavignolles suçait des tuyaux de plume.

  Cependant le bossu ne se redressait pas. Le percepteur lâcha la cigarette, elle redoublait ses étouffements. Foureau se plaignit des pilules d'aloès qui lui occasionnaient des hémorroïdes, Bouvard eut des maux d'estomac et Pécuchet d'atroces migraines. Ils perdirent confiance dans le Raspail, mais eurent soin de n'en rien dire, craignant de diminuer leur considération.

  Et ils montrèrent beaucoup de zèle pour la vaccine, apprirent à saigner sur des feuilles de chou, firent même l'acquisition d'une paire de lancettes.

  Ils accompagnaient le médecin chez les pauvres, puis consultaient leurs livres.

  Les symptômes notés par les auteurs n'étaient pas ceux qu'ils venaient de voir. Quant aux noms des maladies, du latin, du grec, du français, une bigarrure de toutes les langues.

  On les compte par milliers, et la classification linnéenne est bien commode, avec ses genres et ses espèces ; mais comment établir les espèces ? Alors, ils s'égarèrent dans la philosophie de la médecine.

  Ils rêvaient sur l'archée de Van Helmont, le vitalisme, le Brownisme, l'organicisme, demandaient au Docteur d'où vient le germe de la scrofule, vers quel endroit se porte le miasme contagieux, et le moyen dans tous les cas morbides de distinguer la cause de ses effets.

  — La cause et l'effet s'embrouillent, répondait Vaucorbeil.

  Son manque de logique les dégoûta ; — et ils visitèrent les malades tout seuls, pénétrant dans les maisons, sous prétexte de philanthropie.

  Au fond des chambres sur de sales matelas, reposaient des gens dont la figure pendait d'un côté, d'autres l'avaient bouffie et d'un rouge écarlate, ou couleur de citron, ou bien violette, avec les narines pincées, la bouche tremblante ; et des râles, des hoquets, des sueurs, des exhalaisons de cuir et de vieux fromage.

  Ils lisaient les ordonnances de leurs médecins, et étaient fort surpris que les calmants soient parfois des excitants, les vomitifs des purgatifs, qu'un même remède convienne à des affections diverses, et qu'une maladie s'en aille sous des traitements opposés.

  Néanmoins, ils donnaient des conseils, remontaient le moral, avaient l'audace d'ausculter.

  Leur imagination travaillait. Ils écrivirent au Roi, pour qu'on établit dans le Calvados un institut de gardes-malades, dont ils seraient les professeurs.

  Ils se transportèrent chez le pharmacien de Bayeux (celui de Falaise leur en voulait to
ujours à cause de son jujube) et ils l'engagèrent à fabriquer comme les Anciens des pila purgatoria, c'est-à-dire des boulettes de médicaments, qui à force d'être maniées, s'absorbent dans l'individu.

  D'après ce raisonnement qu'en diminuant la chaleur on entrave les phlegmasies, ils suspendirent dans son fauteuil, aux poutrelles du plafond, une femme affectée de méningite, et ils la balançaient à tour de bras quand le mari survenant les flanqua dehors.

  Enfin au grand scandale de M. le curé, ils avaient pris la mode nouvelle d'introduire des thermomètres dans les derrières.

  Une fièvre typhoïde se répandit aux environs : Bouvard déclara qu'il ne s'en mêlerait pas. Mais la femme de Gouy leur fermier vint gémir chez eux. Son homme était malade depuis quinze jours ; et M. Vaucorbeil le négligeait.

  Pécuchet se dévoua.

  Taches lenticulaires sur la poitrine, douleurs aux articulations, ventre ballonné, langue rouge, c'étaient tous les signes de la dothiénentérie. Se rappelant le mot de Raspail qu'en ôtant la diète on supprime la fièvre, il ordonna des bouillons, un peu de viande. Tout à coup, le docteur parut.

  Son malade était en train de manger, deux oreillers derrière le dos, entre la fermière et Pécuchet qui le renforçaient.

  Il s'approcha du lit, et jeta l'assiette par la fenêtre, en s'écriant :

  — C'est un véritable meurtre !

  — Pourquoi ?

  — Vous perforez l'intestin, puisque la fièvre typhoïde est une altération de sa membrane folliculaire.

  — Pas toujours !

  Et une dispute s'engagea sur la nature des fièvres. Pécuchet croyait à leur essence. Vaucorbeil les faisait dépendre des organes. — Aussi j'éloigne tout ce qui peut surexciter !

  — Mais la diète affaiblit le principe vital !

  — Qu'est-ce que vous me chantez avec votre principe vital ! Comment est-il ? qui l'a vu ?

  Pécuchet s'embrouilla.

  — D'ailleurs disait le médecin, Gouy ne veut pas de nourriture.

  Le malade fit un geste d'assentiment sous son bonnet de coton.

  — N'importe ! il en a besoin !

  — Jamais ! son pouls donne quatre-vingt-dix-huit pulsations.

  — Qu'importe les pulsations ! Et Pécuchet nomma ses autorités.

  — Laissons les systèmes ! dit le Docteur.

  Pécuchet croisa les bras.

  — Vous êtes un empirique, alors ?

  — Nullement ! mais en observant.

  — Et si on observe mal ?

  Vaucorbeil prit cette parole pour une allusion à l'herpès de Mme Bordin, histoire clabaudée par la veuve, et dont le souvenir l'agaçait.

  — D'abord, il faut avoir fait de la pratique.

  — Ceux qui ont révolutionné la science, n'en faisaient pas ! Van Helmont,

  Boerhave, Broussais, lui-même.

  Vaucorbeil, sans répondre, se pencha vers Gouy, et haussant la voix :

  — Lequel de nous deux choisissez-vous pour médecin ?

  Le malade, somnolent, aperçut des visages en colère, et se mit à pleurer.

  Sa femme non plus ne savait que répondre ; car l'un était habile ; mais l'autre avait peut-être un secret ?

  — Très bien ! dit Vaucorbeil. Puisque vous balancez entre un homme nanti d'un diplôme :… Pécuchet ricana. Pourquoi riez-vous ?

  — C'est qu'un diplôme n'est pas toujours un argument !

  Le Docteur était attaqué dans son gagne-pain, dans sa prérogative, dans son importance sociale. Sa colère éclata.

  — Nous le verrons quand vous irez devant les tribunaux pour exercice illégal de la médecine ! Puis se tournant vers la fermière : Faites-le tuer par monsieur tout à votre aise, et que je sois pendu si je reviens jamais dans votre maison.

  Et il s'enfonça sous la hêtrée, en gesticulant avec sa canne.

  Bouvard, quand Pécuchet rentra, était lui-même dans une grande agitation.

  Il venait de recevoir Foureau, exaspéré par ses hémorroïdes. Vainement avait-il soutenu qu'elles préservent de toutes les maladies, Foureau n'écoutant rien, l'avait menacé de dommages et intérêts. Il en perdait la tête.

  Pécuchet lui conta l'autre histoire, qu'il jugeait plus sérieuse — et fut un peu choqué de son indifférence.

  Gouy, le lendemain eut une douleur dans l'abdomen. Cela pouvait tenir à l'ingestion de la nourriture ? Peut-être que Vaucorbeil ne s'était pas trompé ? Un médecin après tout doit s'y connaître ! et des remords assaillirent Pécuchet. Il avait peur d'être homicide.

  Par prudence, ils congédièrent le bossu. Mais à cause du déjeuner lui échappant, sa mère cria beaucoup. Ce n'était pas la peine de les avoir fait venir tous les jours de Barneval à Chavignolles !

  Foureau se calma — et Gouy reprenait des forces. À présent, la guérison était certaine ; un tel succès enhardit Pécuchet.

  — Si nous travaillions les accouchements, avec un de ces mannequins…

  — Assez de mannequins !

  — Ce sont des demi-corps en peau, inventés pour les élèves sages-femmes.

  Il me semble que je retournerais le foetus ?

  Mais Bouvard était las de la médecine.

  — Les ressorts de la vie nous sont cachés, les affections trop nombreuses, les remèdes problématiques — et on ne découvre dans les auteurs aucune définition raisonnable de la santé, de la maladie, de la diathèse, ni même du pus !

  Cependant toutes ces lectures avaient ébranlé leur cervelle.

  Bouvard, à l'occasion d'un rhume, se figura qu'il commençait une fluxion de poitrine. Des sangsues n'ayant pas affaibli le point de côté, il eut recours à un vésicatoire, dont l'action se porta sur les reins. Alors, il se crut attaqué de la pierre.

  Pécuchet prit une courbature à l'élagage de la charmille, et vomit après son dîner, ce qui l'effraya beaucoup. Puis observant qu'il avait le teint un peu jaune, suspecta une maladie de foie, se demandait : Ai-je des douleurs ? et finit par en avoir.

  S'attristant mutuellement, ils regardaient leur langue, se tâtaient le pouls, changeaient d'eau minérale, se purgeaient ; — et redoutaient le froid, la chaleur, le vent, la pluie, les mouches, principalement les courants d'air.

  Pécuchet imagina que l'usage de la prise était funeste. D'ailleurs, un éternuement occasionne parfois la rupture d'un anévrisme — et il abandonna la tabatière. Par habitude, il y plongeait les doigts ; puis, tout à coup, se rappelait son imprudence.

  Comme le café noir secoue les nerfs Bouvard voulut renoncer à la demi-tasse ; mais il dormait après ses repas, et avait peur en se réveillant ; car le sommeil prolongé est une menace d'apoplexie.

  Leur idéal était Cornaro, ce gentilhomme vénitien, qui à force de régime atteignit une extrême vieillesse. Sans l'imiter absolument, on peut avoir les mêmes précautions, et Pécuchet tira de sa bibliothèque un Manuel d'hygiène par le docteur Morin.

  Comment avaient-ils fait pour vivre jusque-là ? Les plats qu'ils aimaient s'y trouvent défendus. Germaine embarrassée ne savait plus que leur servir.

  Toutes les viandes ont des inconvénients. Le boudin et la charcuterie, le hareng saur, le homard, et le gibier sont réfractaires. Plus un poisson est gros plus il contient de gélatine et par conséquent est lourd. Les légumes causent des aigreurs, le macaroni donne des rêves, les fromages considérés généralement, sont d'une digestion difficile. Un verre d'eau le matin est dangereux ; chaque boisson ou comestible étant suivi d'un avertissement pareil, ou bien de ces mots : mauvais ! — gardez-vous de l'abus ! — ne convient pas à tout le monde. — Pourquoi mauvais ? où est l'abus ? comment savoir si telle chose vous convient ?

  Quel problème que celui du déjeuner ! Ils quittèrent le café au lait, sur sa détestable réputation ; et ensuite le chocolat, — car c'est un amas de substances indigestes ; restait donc le thé. Mais les personnes nerveuses doivent se l'interdire complètement. Cependant, Decker au XVIIe siècle en prescrivait vingt décalitres par jour, afin de nettoyer les marais du pancréas.

  Ce renseignement
ébranla Morin dans leur estime, d'autant plus qu'il condamne toutes les coiffures, chapeaux, bonnets et casquettes, exigence qui révolta Pécuchet. Alors ils achetèrent le traité de Becquerel où ils virent que le porc est en soi-même un bon aliment, le tabac d'une innocence parfaite, et le café indispensable aux militaires.

  Jusqu'alors ils avaient cru à l'insalubrité des endroits humides. Pas du tout ! Casper les déclare moins mortels que les autres. On ne se baigne pas dans la mer sans avoir rafraîchi sa peau. Bégin veut qu'on s'y jette en pleine transpiration. Le vin pur après la soupe passe pour excellent à l'estomac. Lévy l'accuse d'altérer les dents. Enfin, le gilet de flanelle, cette sauvegarde, ce tuteur de la santé, ce palladium chéri de Bouvard et inhérent à Pécuchet, sans ambages ni crainte de l'opinion, des auteurs le déconseillent aux hommes pléthoriques et sanguins.

  Qu'est-ce donc que l'hygiène ?

  — Vérité en deçà des Pyrénées, erreur au delà affirme M. Lévy ; et

  Becquerel ajoute qu'elle n'est pas une science.

  Alors ils se commandèrent pour leur dîner des huîtres, un canard, du porc au choux, de la crème, un Pont-l'Évêque, et une bouteille de Bourgogne. Ce fut un affranchissement, presque une revanche ; et ils se moquaient de Cornaro ! Fallait-il être imbécile pour se tyranniser comme lui ! Quelle bassesse que de penser toujours au prolongement de son existence ! La vie n'est bonne qu'à la condition d'en jouir. — Encore un morceau ? — Je veux bien. — Moi de même ! — À ta santé ! — À la tienne ! — Et fichons-nous du reste ! Ils s'exaltaient.

  Bouvard annonça qu'il voulait trois tasses de café, bien qu'il ne fût pas un militaire. Pécuchet, la casquette sur les oreilles, prisait coup sur coup, éternuait sans peur, et sentant le besoin d'un peu de champagne, ils ordonnèrent à Germaine d'aller de suite au cabaret, leur en acheter une bouteille. Le village était trop loin. Elle refusa. Pécuchet fut indigné.

  — Je vous somme, entendez-vous ! je vous somme d'y courir.

  Elle obéit, mais en bougonnant, résolue à lâcher bientôt ses maîtres, tant ils étaient incompréhensibles et fantasques.

 

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