Complete Works of Gustave Flaubert

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Complete Works of Gustave Flaubert Page 335

by Gustave Flaubert


  Scène iv.

  Elle eut un enfant, le plus joli du monde ; elle l’aimait, le caressait, le baisait à toute heure du jour ; c’était des joies sans fin, car c’était toute sa joie et son amour que cet enfant-là. p74

  Son mari trouvait que ses couches l’avaient rendue laide, les cris de son fils l’ennuyaient, il ne l’aima que plus tard, lorsque la réputation du fils eut rejailli sur le père.

  Cependant il retourna chez les filles et recommença sa vie de garçon. Sa femme restait le soir auprès du berceau, à prier Dieu et à pleurer. De temps en temps l’enfant ouvrait les bras et bégayait, ses petites mains potelées flattaient les joues de sa mère, rougies par de grosses larmes.

  Scène v.

  Ce fut donc, d’une part, une vie de dévouement, de sacrifices, de combats ; et, de l’autre, une vie d’orgueil, d’argent, de vice, une vie froide et dorée comme un vieil habit de valet tout galonné ; et ils restèrent ainsi étrangers l’un à l’autre, habitant sous le même toit, unis par la loi, désunis par le cœur.

  Il y eut d’un côté des larmes, des nuits pleines d’ennui, d’angoisses, des veilles, des inquiétudes, de l’amour ; et de l’autre, des soucis, des sueurs, de l’envie, de la haine, des remords, des insomnies, des mensonges, une vie misérable et riche.

  Tous deux allèrent où tout va, dans la mort. La femme mourut d’abord, seule avec un prêtre et son fils ; on vint dire à monsieur que madame était morte ; il s’habilla de noir et fit commander le cercueil. La scène vi est toute remplie par un rire de Yuk, qui termina ici la comédie bourgeoise, en ajoutant qu’on eut beaucoup de peine à enterrer le mari, à cause de deux cornes effroyables qui s’élevaient en spirales. Comment diable les avait-il gagnées, avec une petite femme si vertueuse ?

  Ils continuèrent ainsi à marcher de droite et de gauche, furetant dans chaque ruisseau pour y trouver p75

  une vertu, dans chaque tas de boue pour y découvrir de l’or ; ils regardaient dans toutes les maisons, il en sortait des cris de deuil, des chants de joie, là c’était une bière, ici un tonneau défoncé.

  Le jour vint et la ville commença à s’éveiller ; les hommes allaient par les rues, les uns revenaient d’une orgie, d’autres pleuraient, affamés ; il y en avait qui tombaient d’épuisement et d’autres, pleins de vin, qu’écrasaient les roues des chars.

  On entendit le cheval qui piaffait sur les pavés, et les pas d’hommes pressés qui couraient sur les dalles ; déjà l’or roulait sur les tables, le fouet claquait sur les épaules de l’esclave, la prostitution ouvrait sa porte vénale, le vice se réveillait, le crime aiguisait son poignard et montait ses machines, la journée allait recommencer.

  Il y avait un homme en haillons ; le souffle du matin refroidissait sa peau, et quand le soleil vint à paraître il grelotta de plaisir, remua les épaules et sourit bêtement, on eût dit qu’il eût voulu faire entrer en lui la chaleur du soleil. Son teint était jaune, ses cheveux et sa barbe noire étaient couverts de poussière et de brins de paille, son grand œil bleu était vide et avait faim, sa bouche, entr’ouverte, avait un froid rire de bête fauve affamée. Yuk, Satan, Smarh, en ouvriers.

  YUK.

  Qu’as-tu, mon camarade ?

  LE PAUVRE.

  Ce que j’ai ? Mais qu’êtes-vous, vous-même ? Personne jusqu’ici ne m’avait adressé une pareille question, ils passaient tous en me regardant. Mais n’êtes-vous p76

  pas du pays ? Oui, je le vois à vos vêtements. Oh ! Si vous venez du beau pays d’Allemagne, dites-moi si le Rhin coule toujours, si la cathédrale de Cologne, avec ses saints de pierre, est toujours debout ; dites-moi si les arbres ont toujours des feuilles, car, pour moi, je crois que la nature est changée depuis que je suis dans cette ville hideuse.

  YUK.

  Voyons, contez-nous cela, à des compagnons de votre état, de votre pays.

  LE PAUVRE.

  Mon état ? Je n’en ai pas. Mon pays ? Je n’en ai plus. Est-ce qu’il y en a pour le malheureux ? Celui qui a un pays, c’est celui qui est heureux, mais le malheureux n’a pour patrie que son cœur plein d’angoisse. Que voulez-vous que je vous dise ? Je ne sais rien, si ce n’est que je hais les riches et que j’ai faim. Je suis parti de mon pays parce qu’on m’en a chassé avec des huées et des pierres, car mes guenilles étaient sanglantes, il y avait une infamie dans notre famille. Ah ! L’infamie, c’est de vivre comme je vis. J’ai donc été sans savoir où, à l’aventure, marchant dans les routes et les campagnes, vivant en volant une pomme, un fruit, un morceau de pain ; on me repoussait toujours, on disait que j’étais laid.

  Yuk, riant.

  Ah ! Ah ! Ah !

  LE PAUVRE.

  Je n’avais appris aucun métier, je ne savais que manger et je n’avais rien à manger ; parfois, j’étais pris d’une fureur immense, et il me semblait que j’aurais broyé le monde d’un coup de pied. Il me fallait, le soir, aller disputer aux chiens les immondices du coin de la borne et les haillons jetés dans la p77

  boue ; il y en avait pourtant qui sont heureux, qui font de larges repas, et quand je me demande pourquoi cela, il y a là un abîme que je ne peux combler.

  Yuk, riant.

  Ah ! Ah ! Ah !

  LE PAUVRE.

  Ne ris pas, par dieu ! Mais écoute donc. Personne ne m’a aimé, ni homme, ni femme, ni chien, car, un jour, il y en a un qui est venu vers moi, mais, comme je ne pouvais le nourrir, il m’a mordu, et s’en est allé. Cependant, une fois, je ne sais dans quel village, j’étais parvenu à ramasser un sac d’argent en travaillant à la charpente de l’église, j’allais me marier, Marthe m’aimait ; elle vint deux fois seule, le soir, sur le rivage, me dire qu’elle m’aimerait toujours, elle avait des fleurs dans ses cheveux, elle chantait ; puis, je ne sais comment, elle n’a plus voulu de moi, un plus riche l’a prise.

  YUK.

  C’est ça, compère, les jeunes filles aiment les beaux cavaliers riches et les pourpoints de velours.

  LE PAUVRE.

  Ne me parlez pas des riches, encore une fois, -je les hais ! Moi qui meurs de faim à la porte de leurs palais, j’ai dans le cœur des trésors de haine pour eux, et quand il fait froid, que j’ai faim, que je suis malheureux et misérable, je me nourris de cette haine, et cela me fait du bien.

  Satan, se logeant dans l’oreille du pauvre. Celui-là (désignant Yuk) a une bourse sur lui ; — tue-le, tu l’auras ; on ne te verra pas, et, d’ailleurs, quand on te verrait… tue-le, c’est un homme méchant. p78

  Pourquoi, quand tu lui contais tes maux, s’est-il mis à rire ? C’est un riche au cœur dur. Yuk se découvre et laisse voir un magnifique costume ; une bourse garnie de diamants pend à sa ceinture. Le Pauvre, en lui-même.

  ô mon dieu ! Voilà des pensées que je n’avais jamais eues. En effet, si j’allais être riche à mon tour, heureux, avoir des laquais, des chevaux, des tables somptueuses, me faire servir comme un prince ? … mais tuer un homme !

  Satan, en lui-même.

  Bah ! Un homme ! On ne le saura pas. Dépêche-toi, personne ne passe dans la rue maintenant. Il lui glisse un poignard dans la main ; le pauvre, fasciné, se rue sur Yuk qui tombe par terre percé de coups.

  SATAN.

  Voilà la police ! … un homme d’assassiné ! Prenez-moi ce gueux-là !

  Le corps de l’ouvrier reste par terre, percé de coups, mais Yuk se relève.

  YUK.

  Vous croyiez vraiment que j’étais mort ? Oh ! Par dieu, il n’y aurait plus de monde, ni de création, du jour où je cesserais de vivre. Moi, mourir ! Ce serait drôle. Est-ce que je ne suis pas aussi éternel que l’éternité ? Moi, mourir ! Mais je renais de la mort même, je renais avec la vie, car je vis même dans les tombeaux, dans la poussière ; cela est impossible. Celui qui dira que je ne suis plus mentira comme l’évangile. Mourir ? Mais il n’y aurait plus ni gouvernement, ni religion, ni vertu, ni morale, ni lois. Qui donc alors tiendrait la couronne, l’épée, revêtirait la robe ? Qui donc serait médecin, poète, avocat, prêtre ? Est-ce qu’il y aurait quelque chose à faire ? L
a vie deviendrait p79

  ennuyeuse et bête comme une vieille femme. Mourir ? Mais où en seraient les ménages qui sont garants de la foi conjugale ?

  Ah ! Je me fâche à cette horrible idée d’anarchie sociale, la morale publique ; la morale publique, les mœurs, les institutions philanthropiques, les vertus, les systèmes, les théories, songez-y, si je mourais, tout cela mourrait aussi. Comment serait-on alors ? Comment concevez-vous l’idée d’un monde sans moi, sans que j’en occupe les trois quarts, sans que je le fasse vivre en entier ?

  Les gens du guet prennent le pauvre.

  SATAN.

  Tant mieux ! Ce drôle-là m’assommait. Mais, au reste, il serait fâcheux de le faire mourir sitôt, réservons-le. Il faudra qu’il brûle sa prison, viole six religieuses et massacre une trentaine de personnes avant de rendre l’âme.

  Le pauvre s’échappe des mains des soldats. Yuk se frotte les mains, s’étend au soleil, crache au nez d’un magistrat, et pisse sur l’église. C’était une haute église, avec son porche noirci, ses aiguilles et ses pyramides de pierre. Elle était vénérable tant elle était vieille ; ils y entrèrent. La nef était haute, vide, solitaire ; les minces et sveltes colonnes projetaient leurs ombres sur les dalles usées. Le jour se mourait, et cependant le soleil, passant à travers les vitraux rouges, jetait une lueur qui semblait s’étendre comme celle des lampes suspendues. Il y avait quelque chose de grand et de triste dans cette église ; elle était haute, si haute que les hommes paraissaient petits en bas, il n’y avait plus ni encens aux pieds de la vierge ni fleurs sur l’autel, l’orgue avait tu sa grande voix ; — seulement, tout au fond, un drap noir, un cercueil, la messe des morts. p80

  Celui qui était étendu dans la bière n’avait jamais tué, ni pillé, ni violé ; il n’avait point été aux galères, ni repris de justice ; c’était un honnête homme. Quand il sortit de l’église et qu’il passa, traîné dans les rues, chacun se découvrit, -on salua la charogne.

  Mais le prêtre s’était dépêché, il a vite renvoyé le mort en terre. Pauvre prêtre ! Il avait déjà, dans la journée, béni six unions, fait trois baptêmes, enterré quatre chrétiens, et, quant aux communions, elles sont innombrables. Il se dépêcha, sa concubine l’attendait, elle était dans le bain chaud depuis longtemps, elle s’ennuyait. Il partit, il jeta vite la robe blanche, et rêva l’adultère.

  L’église vide… oh ! Vide comme vous savez ; il n’y avait plus ni chants du peuple, ni voix du prêtre, ni prière de l’orgue.

  Qu’elle devait être belle, pourtant, les jours d’hiver, avec ses mille cierges allumés, son peuple chantant en se promenant dans les galeries, quand tout chantait et vibrait d’amour, quand, depuis la voûte jusqu’aux tombeaux, depuis le vitrail jusqu’à la pierre, tout ne formait qu’un chant, qu’une allégresse ! Qu’elle était belle, pourtant, les jours d’été, quand les moissonneurs couverts de sueur entraient et faisaient bénir les gerbes de blé ; quand les dames de haut parage, avec leurs cours de pages, de chevaliers, rois, empereurs et papes, quand tous venaient là prier, pleurer, aimer ; quand les chevaliers, avant de partir pour le pays de Palestine, venaient prendre leur épée et qu’ils disaient un éternel adieu au grand portique noir où le soleil rayonne, au clocher d’ardoises où la voix d’airain chante, et prie dans sa cage de pierre ! … plus rien ! Vide comme un squelette ! Quand des pas d’homme se font entendre, il semble que l’on entend un gémissement, comme un soupir. On y voit, assis sur leurs tombeaux de pierre, les évêques, les cardinaux, les ducs drapés dans leurs p81

  manteaux de granit, étendus la bouche béante ; ils semblent dormir comme des morts. Au bas de l’église circule une pluie ruisselante, froide et grasse, une pluie verte qui suinte des murs ; le sol usé est bourré de cadavres, la terre résonne, les morts sont tassés, et la génération vivante marche sur les générations éteintes. à mesure qu’elle avance, elle s’enfonce dans la terre des tombeaux, et la suivante lui marche sur la tête.

  Tout est usé, flétri, fatigué ; le plâtre est tombé d’entre les pierres, les figures de saints sont grises et mangées par le temps ; la rosace, avec ses gerbes, se décolore ; la voûte elle-même s’éventre, surchargée et effrayée de l’abîme qu’elle a sous elle. Alors Smarh se mit à pleurer amèrement et il dit : — hélas ! Hélas ! Est-ce qu’il est venu quelque conquérant qui a emporté les vases d’or pour en ferrer ses chevaux ? Est-ce qu’on a enlevé les reliques des saints ! Les hosties sacrées ? Pourquoi donc les chants ont-ils cessé ? Pourquoi l’encensoir est-il vide ? Pourquoi y a-t-il tant de vers qui se traînent sur les tombeaux ? Pourquoi tant d’herbes et de mousses sur les murs ? Les cierges sont éteints, les fleurs sont fanées.

  Autrefois, les dimanches, les enfants venaient tout joyeux s’agenouiller aux pieds de la vierge, et ils chantaient en regardant la flamme remuer sur la robe étoilée de Marie ; mais il n’y a plus d’enfants ici, j’en ai vu qui détournaient la tête en passant. Quand la neige couvrait la terre, quand la pluie tombait, quand la grêle battait les vitraux, tous venaient se réfugier sous la voûte, qui s’étendait sur eux comme l’aile d’une colombe. Quand le malheur avait frappé quelqu’un, il venait là, auprès du drap de l’autel, sécher ses pleurs, guérir ses maux. J’en ai vu qui frappaient la terre de leur front et qui mouillaient de leurs larmes les pavés de marbre, et quand ils se p82

  relevaient, il y avait un sourire d’espérance dans leurs âmes ! Ils avaient entrevu le ciel dans le malheur, le bonheur dans la foi !

  L’église.

  On ne veut plus de moi ; demain, les maçons m’attaqueront par ma base, me renverseront, me démoliront pierre à pierre.

  Le Bénitier.

  Ils sont venus prendre mon eau, ils se sont lavé les mains. En vain j’ai écumé, bouillonné, ils ont craché dans mon onde et se sont amusés à voir les cercles que cela faisait.

  La Nef.

  Tout a passé sous moi : noces, funérailles, morts et vivants. J’étais l’écho des chants, je renvoyais les soupirs et les cris de douleurs ; c’était vers moi que volait l’encens, que montaient le parfum des fleurs, et la voix des prières, la fumée des cierges. Que de fois j’ai resplendi, j’ai vibré ! Mais je suis triste, j’ai envie de me coucher sur les dalles qui sont à mes pieds.

  Les Colonnes.

  Autrefois on nous entourait de guirlandes, maintenant nous sommes nues. Nous sommes, depuis six cents ans, séparées les unes des autres, nous nous enfonçons sous terre ; je crois que l’église tout entière s’affaisse dans un bourbier, on dirait d’un démon qui pèse sur son toit et l’écrase.

  Les Vitraux.

  Que de fois le soleil a illuminé nos couleurs, maintenant nos reflets n’éclairent plus rien. Les pierres de la rue viennent nous casser chaque jour, les vents nous p83

  jettent par terre ; il faudra remporter toutes nos fleurs, toutes nos couleurs aux pieds du bon Dieu.

  Les Dalles.

  On nous a usées, nous sommes trouées en maints endroits, nous sommes lasses d’être foulées par des pieds impurs, les morts qui sont sous nous semblent nous repousser de dessus eux. Pourquoi nous a-t-on tirées des flancs de la montagne, où nous étions si paisibles, au sein de la terre ?

  La Cloche.

  Depuis longtemps je suis muette, personne ne vient plus prendre mon bourdon et faire aller ma bascule ; est-ce que les hommes sont tous morts ? Autrefois ma voix d’airain chantait à tue-tête, je faisais trembler mon clocher tout frêle, la tour remuait, ivre, et frémissait sous mon poids. Je chantais bien haut dans les airs, et je voyais arriver des campagnes hommes, femmes, vieillards et enfants, accourant, accourant vite et se pressant sous mon portail. Du jour où on me monta ici, j’ai toujours été fêtée, honorée comme la reine de l’édifice, comme la tête de la cathédrale. N’était-ce pas moi, en effet, qui portais la prière de tous dans mes spirales d’harmonie ? Aujourd’hui seulement je me tais, je m’ennuie toute seule, et, si haut, le vertige me prend ; je crois que je vais m’écrouler avec mon clocher, j’ai plutôt envie de me faire fondre en boulets
et de courir dans la plaine.

  Les Gargouilles.

  Voilà assez longtemps que nous sommes là, droites, hérissées, suspendues ; on nous regarde en bas sans terreur. Autrefois nous crachions l’eau de l’orage, en grimaçant si bien qu’on avait peur ; maintenant ils nous regardent d’en bas en ricanant. Oh ! J’ai envie p84

  de m’en aller, de me détacher de la pierre et de sauter ; je m’allonge tant que je peux, mais j’ai les pieds pris dans la cathédrale. En nous efforçant toutes à la fois, nous pourrons peut-être nous en déraciner, ou l’entraîner derrière nous ; faisons tous nos efforts, poussons en avant, tendons nos jarrets de granit, hérissons nos crinières de pierre. Nous avons envie de nous mettre à marcher sur la terre avec les serpents et de sauter par bonds, au lieu de rester suspendues dans l’infini, à regarder la foule s’agiter en bas et les hiboux battre des ailes autour de nos flancs. Et Satan aussitôt dit à l’église : — non, je ne veux plus de toi ! Il y a longtemps que tu me gênes dans ma marche et que tes aiguilles embarrassent mes pas ; je t’abattrai, car tu es belle quoique vieille, et je te hais de ma haine éternelle ; je t’abattrai, car tu obstrues mes rues, et les chars courront mieux quand tu n’y seras plus.

  Tu n’as plus pour te défendre ni l’amour du croyant ni celui de l’artiste, mon esprit s’est infiltré dans tes veines depuis la base de ton plus profond pilier jusqu’à l’air qui surmonte ta plus haute aiguille, le vice suinte de tes pierres, et le doute te ronge à la face et te mange la figure. Que veux-tu faire ? Tu vas retomber sur la terre, où l’herbe te couvrira pour toujours.

  Ainsi, mon bénitier, comme tu es de marbre blanc et solide, tu seras ma coupe où je bois du sang, ton eau servira à laver les pieds de quelque cheval de guerre. La nef va tomber par terre, la voûte va s’éventrer comme un ventre trop plein et qui crève.

 

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