by Klopmann
– Maintenant ?
– Maintenant, oui. Je passe vous prendre dans une demi-heure. Tout le monde de retour à 17 heures dans mon bureau ! Béroud, accompagnez Wolf. Vous retournerez voir aussi la femme de Verrat. J'en veux plus sur la vie, la santé et la personnalité de son mari. Béroud nous a dit qu'il déprimait. Je veux savoir comment et pourquoi il déprimait. Quels étaient ses soucis. L'emploi du temps de sa femme, franchement, c'est un peu court. Surtout qu'on sait depuis le début qu'elle n'était pas à la télé. Il y a autre chose. Moi, je ne crois pas au hasard.
Un ange passa.
– Bref, je ne suis pas très satisfait de vos résultats. Mais on ne va pas s'attarder là-dessus ! Pour retourner l'œuf, on a un jour. Pas deux. Alors, allons-y.
À l'invitation de Solnia, les trois se levèrent et prirent la peine de replier leurs chaises comme l'avait fait Vernes. Solnia ne bougea pas. Il attendrait leur départ et prendrait son temps pour se déplier. Il prendrait aussi un analgésique puissant. Et un café. Le mal avait une demi-heure pour disparaître. Une demi-heure. Pas une minute de plus. Parce que, après, il lui faudrait affronter la pluie et s'engouffrer dans une voiture dont il n'était pas sûr qu'il pourrait s'extraire, si ça continuait.
XXII
Ce matin-là Vespa n'avait le cœur à rien. Il savait que son sujet « congrès » tiendrait encore un jour : comme aucun journaliste ne semblait s'y être intéressé, il ne risquait pas d'être grillé. C'était une manifestation marginale, pas même indiquée dans le catalogue officiel. Pure coquetterie si les organisateurs du colloque avaient choisi la période du festival – d'ailleurs, il leur avait fallu payer cher pour réserver des chambres. Il n'existait toutefois aucun lien organique entre le grand rassemblement cinématographique et le séminaire, à l'exception des films que l'on projetait entre deux conférences d'historiens du cinéma aux psy invités.
On comptait là d'éminents praticiens et d'autres qui l'étaient moins : avec beaucoup de civilité, ils maintenaient tacitement, entre eux, une hiérarchie aussi redoutable que dans les grandes administrations. Vespa décida d'aller voir. Il n'y aurait pas de sujet ce soir sur Cannes, point à la ligne ! Mais où donc pouvait bien être Maggie Blum ? Silverstein avait regagné les Amériques mais d'autres vedettes allaient débarquer sous les couleurs de WPC et, sans doute, lui donner du travail aussi. Et même, leur donner du travail, aux deux. Ils étaient si complémentaires ! Chacun avait besoin de l'autre : Maggie utilisait les médias et Vespa recherchait les bons coups… Donnant-donnant. Par calcul plus que par pudeur, personne, à la rédaction de General TV, ne se risquait à souligner que la promotion indirecte des films profitait à la World Pictures Company, qui plaçait ainsi dans le journal – la grand-messe du soir, la meilleure tranche en taux d'écoute – une pub d'enfer déguisée en info. En revanche, la chose n'avait pas échappé au directeur des programmes, que d'aussi bonnes relations avec la société détentrice des droits de tant de films populaires arrangeaient plutôt. À chacun son intérêt.
Bien sûr, Vespa avait été entendu, à l'hôtel de police. Aux regards croisés des plantons sur son passage, à la déférence indue que lui manifestaient les policiers, il comprit qu'ils regardaient aussi General TV et qu'ils l'avaient reconnu. C'est qu'il possédait l'art de se mettre en situation, de se profiler dans l'image comme pour signer son sujet. Il n'avait pas été reçu en suspect mais, quand même, il devait l'être un peu aux yeux des enquêteurs. C'était la règle, tous ceux qui avaient côtoyé Sillagy devaient passer à la moulinette. Mais l'entretien n'avait pas traumatisé Vespa : au contraire, son esprit curieux se satisfaisait parfaitement de cette nouvelle expérience. Elle lui parut assez conforme à l'idée qu'en donnaient les scénaristes au cinéma. Il avait ensuite regagné le Grand Palace qui reprenait lentement sa vie normale, si l'on faisait abstraction de l'agent posté, en uniforme, devant la 412. Mais il ne le vit pas. Ce n'était pas son étage. Dans l'ensemble, les clients de l'hôtel évitaient de traîner dans les couloirs comme s'ils y ressentaient des vibrations néfastes.
Si on frappe, je me méfie…, se dit-il en souriant. Il s'approcha du téléphone. Pas de Maggie Blum. Il laissa un message à la divinité rousse, fuma une cigarette en regardant à la télé une conférence de presse que la chaîne locale diffusait en direct, puis sombra dans un grand sommeil réparateur. Au réveil, une violente angoisse le saisit. Je manque quoi ? Je dois faire quoi ? Où dois-je aller et pourquoi suis-je en retard ? De combien ? La tension retomba tandis que Vespa commençait de recouvrer ses esprits : aujourd'hui, congé ! Il savait bien que ce serait impossible ; qu'il sortirait avec sa caméra, qu'il songerait au découpage du prochain sujet, qu'il lui faudrait appeler Babette Loup pour prendre de ses nouvelles et fixer rendez-vous, que le répit serait de courte durée, qu'il ne compenserait pas la déperdition nerveuse due au meurtre de Bertrand… Mais enfin, il se dit qu'il allait, pour une fois, ne rien faire.
Le maître du bunker, Bernard Temple, était du genre formaliste. Il scruta son interlocuteur d'une manière appuyée ne laissant place à aucun doute : il n'aimait pas ce Wolf. Il n'aimait pas son insistance, il n'aimait pas ne pas dominer la discussion, il n'aimait pas le style vestimentaire de son visiteur ; Wolf saisit au vol ce vent d'hostilité pour mieux renforcer sa propre énergie. Il bluffa :
– Vous êtes soumis à un chantage. Nous le savons. Soit vous me parlez, soit je lance mes amis journalistes sur la question.
Wolf risquait le tout pour le tout mais savait qu'il n'y avait pas d'autre moyen de s'informer auprès de cet oiseau-là : à défaut, il pourrait toujours présenter de plates excuses, ça ne coûte rien. Wolf savait jouer à l'éléphant dans un magasin de porcelaine et entretenait cette qualité avec tout le soin qu'il négligeait d'accorder à sa chevelure filasse. Il fallait bien essayer. Il observa Temple, un instant déstabilisé, le regard plongé dans sa tasse comme si le marc allait lui indiquer la voie à suivre. Puis le directeur craqua un bon coup en relevant les yeux pour fusiller Wolf :
– Pas un chantage. Pas même une menace. Mais une affaire curieuse quand même. Tenez, regardez.
Il avait déjà préparé son dossier. Il s'attendait par conséquent à devoir livrer sa confession. Les collègues l'avaient bien chauffé ; un homme aux abois ne résiste pas longtemps à la pression. Mais comment donc avait fait la môme Blanche pour repérer cette inquiétude ? Mystères de l'intuition féminine, se dit Wolf sans imaginer un instant qu'elle pût être, tout simplement, plus fine et plus habile que lui. Ce qu'il ne percevait pas non plus, c'est que Vlad Solnia connaissait ses lieutenants comme s'il avait personnellement accouché de chacun et qu'il jouait de leurs styles variés. Il savait les charger de missions en apparence anodines mais dont il escomptait qu'elles auraient pour mérite de chauffer un peu la colle… Plus d'un suspect avait craqué à être ballotté ainsi entre deux caractères contradictoires.
La fourre qu'il lui tendit contenait deux lettres « personnelles » et anonymes au contenu semblable. Wolf remarqua du premier coup qu'il n'y aurait pas grand-chose à tirer du support : deux feuilles blanches. Pour l'instant, Temple n'était suspect de rien sinon d'avoir tenté de cacher une information. Wolf jeta un regard déjà las – l'entretien pourtant ne faisait que commencer – sur les feuillets. Du papier ordinaire et, dessus, une frappe informatique banale en Times, la police la plus courante ; des millions de machines pouvaient cracher un tel graphisme. Impossible d'en établir l'origine. Et la façon brutale dont Temple tirait les feuilles – déjà mille fois manipulées – de la fourre avait probablement détruit toute éventuelle empreinte. Bref, il lui faudrait se concentrer sur le contenu exclusivement. Ce qu'il fit en lisant à haute voix, prenant son temps comme pour s'imprégner de chaque mot. Dans un enchaînement monotone, ceux-ci brisèrent le silence.
À BERNARD TEMPLE
Personnelle
Vous qui êtes aux commandes d'un outil de pouvoir et de persuasion, sachez que rien ne remplace la puissance de l'âme.
Les manipulations médiatiques ne peuvent rien contre la pensée.
L
'expérience à laquelle nous allons nous livrer représente le plus beau défi que l'esprit puisse livrer à l'ordre – votre ordre que nous refusons.
Inutile de dire que ce n'était pas signé.
– Quand avez-vous reçu cette lettre ? demanda Wolf.
– Avant la mort de Charly Verrat. Lisez l'autre.
Le silence se fit plus pesant encore. Le redouté patron de General TV semblait plus abattu et impuissant par le fait qu'il avait dû dévoiler sa faiblesse qu'en raison même du contenu des lettres, dont le sens lui échappait. L'autre disait :
À BERNARD TEMPLE
Personnelle
Notre moyen de contrôle semble au point. Nous poursuivrons nos expériences et reprendrons contact avec vous.
– Et ensuite, que s'est-il passé ? reprit Wolf.
– Rien, justement. Sauf que Visseur est mort à son tour, et que nous avons commencé d'avoir des policiers dans toute la maison.
– Vous exagérez un peu, observa Wolf qui n'aimait pas que l'on titille son amour-propre. Nous ne sommes pas très nombreux. Pas assez, à mon goût. Et puis, vous avez voulu cacher ces foutues lettres, pas vrai ? À quoi bon ?
Il décida de mettre son argot en veilleuse pour la suite de l'entretien, sans quoi l'autre allait se formaliser. Déjà qu'il était sur les pattes de derrière.
– Et à quoi bon vous les remettre ? Elles n'ont ni queue ni tête.
– Cela demande à être prouvé. La deuxième sent le chantage. Dans un premier temps, vous avez refusé d'évoquer cette hypothèse avec ma collègue. Le fait est qu'on pourrait vous demander de l'argent ou, pire, un temps d'antenne.
– Je ne crois pas que ce serait pire.
– Tout dépend de ce qui devrait y être dit.
– Une affaire politique ?
– J'pense pas. Cette histoire d'âme est tout de même bizarre. Avez-vous eu des problèmes avec une secte, par exemple ?
– C'est très vendeur, les sectes. Mais non. Nous avons rendu compte de l'affaire du Parvis solaire, du congrès des Témoins de la lumière et fait connaître les adeptes de la Pensée universelle lors de leur congrès… Peut-être deux ou trois autres encore, mais rien que de très normal. Des reportages d'actualité, rien à dire. D'ailleurs, ils n'ont amené aucun courrier.
– Comment le savez-vous ? Tout remonte à votre niveau ?
– Non, mais j'ai interrogé M. Depassy, le patron des actualités, enfin l'ancien patron. Figurez-vous que j'y ai pensé aussi, à une histoire de secte. Le style.
– Alors, vous aggravez votre cas.
– Comment ça, j'aggrave mon cas ? s'enquit Temple en feignant la surprise.
– Vous avez été le premier à songer à un chantage et vous nous l'avez caché.
– Je l'admets. Je l'ai d'ailleurs caché à tout le monde. J'ai voulu garantir à cette maison une sérénité qu'elle est toujours prompte à perdre. Il suffit de laisser traîner un os dans les couloirs, vous savez, et ils sont bientôt dix ou quinze à le ronger avant de se battre. Vous ne connaissez pas la télévision. Les ragots, les rumeurs, les jalousies, les costards que les uns taillent aux autres, les infos dirigées glissées à des journalistes de l'extérieur qui nous font du mal… Si je faisais connaître à chaque fois mes angoisses, General TV ne vivrait plus et moi non plus.
Bon point, ça. Ce type était plus sensible qu'il n'y paraissait. Mais un peu lâche, aussi. Quand il en aurait le temps, Wolf irait voir comment et quand il était arrivé à la tête de l'entreprise : il savait par expérience que les circonstances de toute nomination en apprennent toujours beaucoup sur le caractère des individus. Avait-il le profil putschiste ou celui d'un intrigant ? d'un flatteur ou d'un chanceux ? Venait-il du sérail où l'avait-on nommé par décision politique ? Lui avait-on adressé personnellement ces lettres en raison du poste en vue qu'il occupait ou pour des raisons plus personnelles, donc ciblées ? Wolf rassemblait ses esprits. Rien n'indiquait que ces lettres présentaient quelque intérêt pour l'enquête, sauf qu'elles avaient été cachées. L'orgueilleux Temple avait pensé qu'il s'en sortirait tout seul, c'était tout. Pas de quoi fouetter un chat.
– Vous n'avez pas gardé les enveloppes ?
– Quand ma secrétaire me remet un courrier, l'enveloppe y est toujours attachée. C'est une habitude que j'ai établie afin de lui être agréable : l'adresse de l'expéditeur manque souvent sur la lettre et comme ça, quand je dicte ma réponse, on n'a pas besoin de faire de recherches.
Il parlait trop. Un système de défense. Quelque chose clochait à ce niveau. Les petits voyants intérieurs de Wolf passaient au rouge. Il l'interrompit brutalement :
– Mais ?
– Mais voilà : il n'y avait pas d'enveloppe.
– Donc quelqu'un l'avait mise de côté ou jetée, c'est bien cela ?
– Peut-être.
– Et dans ce cas, on aurait contrevenu à vos instructions ?
– Certainement.
– Vous gardez toujours les enveloppes ?
– Les lettres sont archivées avec.
– Mais il n'y en avait pas.
– Je vous l'ai déjà dit !
– Mais vous ne m'avez pas dit dans quels cas il n'y a pas d'enveloppe…
L'interphone grésilla. Temple ne laissa pas le temps à sa secrétaire d'émettre le moindre son :
– Je ne prends pas d'appel. Je ne suis pas là.
– Merci. Donc, vous…
– Oui, oui. Je sais. C'est bien ce qui m'inquiète. En fait, je vais aller droit au but : il n'y a pas d'enveloppe quand il s'agit de courrier interne.
Droit au but… Il en avait de bonnes. L'attention de Wolf s'éveilla subitement.
– Vous pensez que cette lettre vous a été adressée de l'intérieur de la maison ?
– Je le pense, oui. Nous avons des enveloppes de service pour ça. On ouvre, on sort le contenu et on garde l'enveloppe de service avant de la réexpédier dans un autre service ; on en manipule tous les jours.
Précédant la demande de Wolf, Temple tendit une de ces enveloppes de papier recyclé. Elle portait en grosses lettres la mention « interne » sous le logo de General TV. Cinq colonnes de quinze cases racontaient sa vie : dans chacune, un nom et le numéro d'un bureau indiquaient par où elle avait cheminé. L'expéditeur n'y était jamais mentionné. Le directeur ajouta :
– J'ai déjà recherché celles qui ont conduit ici ces deux torchons. Impossible à retrouver. Nous en avons des centaines, et beaucoup mentionnent mon nom. N'importe qui peut en saisir dans les bureaux, écrire un nom en grosses lettres et déposer l'enveloppe dans une bannette de courrier interne. Nos services fonctionnent bien, il y a quatre levées par jour. Autant dire qu'elles ne traînent pas.
Wolf récapitula in petto. Un, les courriers avaient été adressés de l'intérieur. Deux, tout le monde pouvait se procurer ces enveloppes. Trois, l'expéditeur avait certainement masqué son écriture. Pas compliqué d'écrire T-E-M-P-L-E, 24 Nord 14. Quoique…
– Tout le monde connaît votre adresse interne ?
– Il y a des annuaires à côté des bannettes.
Quatre, tout cela ne menait à rien.
– Vous permettez que j'emporte ces lettres ?
Le visage de Temple passa en un instant du rouge au gris, sa couleur naturelle. Il n'avait aucune intention de laisser filer ces lettres chez de potentiels bavards, mais la perspective de voir le lieutenant tourner les talons le mettait en joie. Il bougonna :
– Allez-y…
Ce qui voulait au moins dire deux choses. Wolf glissa les feuilles dans une enveloppe en plastique qu'il glissa ostensiblement au plus profond de sa maigre serviette. Histoire de calmer la paranoïa du directeur. Il commençait à en avoir plein le dos.
– Je vais vous demander encore une chose, monsieur Temple.
– Demandez.
– Vous aimez le cinéma, n'est-ce pas ?
Temple s'intéressait en fait surtout aux chiffres, mais son statut ne lui permettait pas de répondre négativement. Quant à Wolf, il n'y connaissait pas grand-chose mais venait de se régaler
d'une cassette que lui avait prêtée Vernes.
– J'adore le cinéma.
– Vous connaissez Molinaro ?
– On passe parfois ses films. Très populaire, Molinaro.
– Vous avez vu L'Emmerdeur ? Film français, 1973…
– Oui, je le connais. Jacques Brel et Lino Ventura.
– Eh bien, dites-vous bien que s'il vous prenait encore l'idée de mener votre petite enquête personnelle sur un point qui vous tracasse sans m'en référer, je serais votre « emmerdeur » et vous m'auriez tout le temps dans les pattes. Je préférerais vous voir jouer franc jeu.
– Je n'y manquerai pas, fit l'autre en se levant, manière de signaler que l'entretien était terminé.
En raccompagnant le lieutenant à la porte, Temple fut traversé d'une désagréable sensation. Dans ce film à deux personnages, l'un est un royal casse-pieds et l'autre un tueur à gages. Qu'avait donc voulu dire le lieutenant ? Il ne pensait tout de même pas que…
Mais Wolf ne pensait à rien. À rien d'autre que déstabiliser le hautain personnage, comme on secoue un prunier pour en faire tomber les fruits. Début prometteur. Il n'imaginait plus rien. Sauf qu'une bonne bière lui serait d'un précieux secours. L'ascenseur ne s'arrêta pas en route et le mena directement à la sortie. Juste le temps de lire un dazibao furieux scotché à la hâte sur le miroir :
« Marreux ne passera pas. La Tronche, c'était grave, Marreux, ce sera pire. L'info refusera la dictature. » Pas de signature. Une manie dans la maison ? Joyeuse ambiance.
XXIII
C'était Vernes qui avait hérité de Véronique Verrat. Pas une sinécure. La malheureuse était décomposée et son visage indiquait le récent passage de torrents de larmes. Le gosse qui s'amusait à courir joyeusement après le chat contrastait dans la scène. C'était high tech chez les Verrat. Du verre et de l'alu, des lignes élégantes, un soupçon de cuir noir tendu ; beau mais un peu froid. L'éclairage compensait subtilement. Que de la lumière indirecte, et des lampes d'un tout autre style, du faux Lalique. Le mariage était assez réussi. Peu de livres, des milliers de disques et une photo encadrée au mur : Verrat posait avec B.B. King et Buddy Guy au détour, sans doute, d'un de ces grands festivals d'été qu'il aimait à fréquenter avec ses copains musiciens. Dans ce monde qu'il connaissait bien, il avait dû se débrouiller avec le pote d'un pote pour franchir les barrages et rencontrer ces géants de la guitare blues sur un coin de scène. Verrat avait posé la main sur la guitare de B.B. King, elle-même légendaire. Lucille, elle s'appelle. Vernes choisit cette ouverture :