Les chasseurs de mammouths

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Les chasseurs de mammouths Page 44

by Jean M. Auel


  — Le Camp accepte-t-il cette femme ? demanda Mamut à l’assemblée.

  — Nous l’acceptons, répondirent-ils à l’unisson.

  — Y a-t-il ici quelqu’un qui la refuse ?

  Il se fit un silence prolongé. Ayla se demandait si Frébec allait opposer une quelconque objection, mais personne ne dit mot.

  — Talut, chef du Camp du Lion, veux-tu graver la marque ? psalmodia Mamut.

  Ayla vit Talut sortir son grand poignard de sa gaine et son cœur battit plus vite. Elle n’était pas préparée à cela. Elle ignorait ce qu’il allait faire du poignard mais, quoi que ce fût, elle était convaincue qu’elle n’apprécierait pas. Le géant lui prit le bras, remonta sa manche et posa la pointe du couteau de silex sur la peau. Puis, rapidement, il traça une courte ligne droite. Le sang perla. Ayla ressentit la douleur de l’entaille mais elle n’en laissa rien paraître. Du poignard qui conservait des traces de sang, Talut grava la même marque sur la plaque d’ivoire accrochée à son cou, et que tenait Mamut. La rainure ainsi produite se teignit de rouge. Mamut, alors, prononça quelques mots qu’Ayla ne comprit pas. Elle ne se rendit pas compte que personne d’autre ne les comprenait.

  — Ayla compte désormais au nombre du peuple du Camp du Lion, qui fait lui-même partie des Chasseurs de Mammouths, proclama Talut. Cette femme est maintenant et sera à jamais Ayla des Mamutoï.

  Mamut prit une petite coupe, versa sur l’entaille un liquide piquant – une solution cicatrisante, comprit-elle –, avant de faire pivoter Ayla face à l’assemblée.

  — Faites bon accueil à Ayla des Mamutoï, membre du Camp du Lion, fille du Foyer du Mammouth...

  Il marqua une pause avant d’ajouter :

  — Choisie par l’Esprit du Grand Lion des Cavernes.

  Le groupe répéta ses paroles. Pour la seconde fois de sa vie, se dit la jeune femme, elle était accueillie, acceptée comme membre à part entière d’un peuple dont elle connaissait à peine les coutumes. Les yeux clos, elle entendait les mots faire écho dans sa tête. Une idée la frappa soudain. Mamut avait inclus son totem dans sa présentation : Elle n’était plus Ayla du Clan mais elle n’avait pas perdu son totem ! Elle demeurait sous la protection du Lion des Cavernes. Mieux encore, elle n’était plus Ayla de Nulle Part, elle était Ayla des Mamutoï !

  18

  — Partout où tu seras, Ayla, tu pourras toujours te réclamer du sanctuaire du Foyer du Mammouth. Accepte ce signe, fille de mon foyer, dit Mamut.

  Il ôtait de son bras un bracelet d’ivoire gravé de lignes en zigzag. Il en rattacha les extrémités percées d’un trou au bras de la jeune femme, juste au-dessous de l’entaille. Il la serra ensuite chaleureusement dans ses bras.

  Ayla avait les yeux pleins de larmes lorsqu’elle se dirigea vers la plate-forme de couchage où elle avait disposé ses cadeaux, mais elle les essuya avant de prendre une grande coupe de bois. Elle était ronde, solide, mais d’une finesse uniforme. Elle n’était pas ornée de motifs peints ou gravés. Seul la décorait un dessin subtil, harmonieusement équilibré, dans le grain même du bois.

  — Accepte, te prie, présent de coupe à remèdes, de fille de foyer, Mamut, dit-elle. Et, si permets, fille de foyer emplira coupe chaque jour avec remède pour jointures douloureuses de bras, de doigts, de jambes.

  — Ah, je serais bien heureux de moins souffrir de mon arthrite, cet hiver, répondit-il en souriant.

  Il prit la coupe, la passa à Talut, et celui-ci, après l’avoir examinée, hocha la tête, la passa à Tulie.

  Tulie détailla l’objet d’un œil critique. Au premier regard, elle la jugea simpliste parce qu’elle n’y trouvait pas la décoration gravée ou peinte à laquelle elle était habituée. Mais, en regardant la coupe de plus près, en passant les doigts sur un poli remarquable, en appréciant la forme et la symétrie parfaites, elle dut convenir que c’était là un ouvrage d’un art consommé, le plus beau de son espèce, peut-être, qu’elle eût jamais vu. La coupe passa de main en main, éveillant l’intérêt et la curiosité à propos des autres cadeaux qu’allait faire Ayla. Chacun se demandait si tous les présents seraient aussi superbement originaux.

  Talut s’avança ensuite, étreignit vigoureusement Ayla et lui offrit un poignard en silex à manche d’ivoire, protégé par une gaine de cuir teint en rouge, semblable à celui que Deegie portait à sa ceinture. Ayla sortit le poignard de sa gaine, devina aussitôt que la lame avait dû être façonnée par Wymez. Ranec, soupçonnait-elle, avait sculpté et ciselé le manche.

  Pour Talut, la jeune femme apporta une lourde fourrure sombre. Il eut un large sourire lorsqu’il déplia la grande cape faite d’une peau de bison entière et la jeta sur ses épaules. L’épaisse toison faisait paraître le géant plus colossal encore, et il en était ravi. Il remarqua alors la façon dont la fourrure s’ajustait à ses épaules pour retomber en plis souples. Il en examina de plus près l’intérieur.

  — Nezzie ! Vois un peu ça, dit-il. As-tu jamais vu cuir plus doux sous une peau de bison ? Et c’est si chaud. Je ne veux pas qu’on en fasse quoi que ce soit d’autre, je crois, pas même une pelisse. Je vais la porter telle qu’elle est.

  Ayla souriait de son plaisir. Elle était heureuse de voir son présent si bien reçu. Jondalar, qui était resté dans les derniers rangs, regardait par-dessus les têtes des gens plus proches et prenait lui aussi plaisir à la réaction de Talut. Il l’escomptait mais ne s’en réjouissait pas moins de voir son opinion confirmée.

  Nezzie serra Ayla contre son cœur ; lui offrit un collier de coquillages en spirale, magnifiquement assortis, séparés les uns des autres par de petits anneaux soigneusement taillés dans des tibias de renards arctiques. Devant, en manière de pendentif, était accroché un grand croc de lion des cavernes. Ayla le maintint, pendant que Tronie le lui attachait sur la nuque. Après quoi, elle baissa les yeux pour l’admirer. Elle se demandait comment on s’y était pris pour percer la racine de la dent de lion.

  La jeune femme alla repousser la tenture qui dissimulait la plateforme. Elle prit une grande corbeille couverte, la posa aux pieds de Nezzie. Elle semblait toute simple, cette corbeille. Aucune des herbes dont elle avait été tressée n’avait été teinte, et ni les flancs ni le couvercle n’étaient ornés de dessins géométriques coloriés ou de représentations stylisées d’oiseaux ou d’autres animaux. Mais, sur un examen plus attentif, la brave femme découvrit le motif du tressage, l’habileté du travail. La corbeille était suffisamment étanche pour servir de récipient de cuisine, elle le savait.

  Elle souleva le couvercle pour mieux l’examiner et le camp tout entier exprima à haute voix sa surprise. Divisé en compartiments par des bandes flexibles d’écorce de bouleau, le panier était empli de vivres. Il y avait des petites pommes dures, des carottes sauvages, douces ou non, des tubercules riches en féculents, noueux et tout épluchés, des cerises dénoyautées et séchées, des boutons d’hémérocalle encore verts, des graines d’astragale dans leurs gousses, des champignons, des queues d’oignons verts, et quelques autres légumes. Le tout soigneusement séché. Nezzie eut un sourire chaleureux à l’adresse de la jeune femme. C’était un cadeau parfait.

  Tulie s’approcha ensuite. Son étreinte, sans manquer de chaleur, fut plus protocolaire, et, lorsqu’elle offrit son présent à Ayla, ce ne fut pas tout à fait avec panache, mais le geste marquait un sens bien dosé de l’importance de la cérémonie. Son cadeau était une petite boîte de bois décorée avec une exquise délicatesse, taillée en forme de petit coffret aux angles arrondis. On y voyait des poissons, ciselés ou peints, et l’on y avait collé de petits morceaux de coquillages. L’ensemble donnait l’impression d’une eau fourmillante de poissons et de végétation aquatique. Ayla souleva le couvercle et découvrit ainsi l’usage d’une boîte aussi précieuse. Elle était remplie de sel.

  Elle avait quelque idée de la valeur du sel. Durant son séjour dans le Clan, qui vivait près de la mer de Beran, elle ne s’était jamais interrogée sur son importance. On se le procurait facilement et l’on y conservait même certains
poissons. Mais, dans les terres de l’intérieur, lorsqu’elle vivait dans sa vallée, elle n’avait pas de sel, et il lui avait fallu un certain temps pour s’habituer à cette pénurie. Le Camp du Lion était encore plus éloigné de la mer. Le sel, tout comme les coquillages, devait parcourir une longue distance. Tulie, pourtant, venait de lui en offrir une pleine boîte. C’était un don rare et précieux.

  Ayla se sentait pénétrée du respect qui convenait lorsqu’elle apporta le cadeau destiné à Celle Qui Ordonne. Jondalar, espérait-elle, ne s’était pas trompé en suggérant ce qui lui paraissait le plus approprié. La fourrure qu’elle avait choisie était la peau d’un léopard des neiges, celui qui avait tenté de lui arracher une proie, l’hiver où Bébé et elle apprenaient à chasser ensemble. Elle avait simplement eu l’intention de lui faire peur pour l’éloigner, mais le jeune lion des cavernes avait eu d’autres idées, Ayla avait abattu, d’une pierre de sa fronde, le félin plus âgé mais plus petit, au moment où le combat semblait proche, et l’avait achevé d’une autre pierre.

  Le présent était manifestement inattendu, et les yeux de Tulie exprimèrent sa joie. Mais ce fut seulement lorsqu’elle céda à la tentation de jeter sur ses épaules la somptueuse fourrure d’hiver qu’elle en remarqua la qualité unique, celle que Talut avait déjà relevée. Elle était, sur l’envers, d’une incroyable douceur. En général, les fourrures étaient plus raides que les cuirs. Une fourrure, par sa nature même, ne pouvait se travailler que sur l’envers, avec les grattoirs utilisés pour étirer et assouplir. Le matériau ainsi traité était plus solide, plus durable que les fourrures d’Ayla, traitées uniquement à la graisse. Mais la méthode employée par les Mamutoï pour préserver les peaux rendait le cuir moins flexible, moins souple. Tulie, étonnée et impressionnée, décida qu’elle découvrirait la méthode de la jeune femme.

  Wymez s’approchait avec un objet enveloppé d’une peau fine et douce. Ayla ouvrit le paquet, retint son souffle. C’était une magnifique pointe de sagaie pareille à celles qu’elle avait tant admirées. Elle brillait, à la lueur du feu, comme une pierre précieuse. Elle-même donna à Wymez une solide natte en herbes tressées, sur laquelle il pourrait s’asseoir pour travailler. Presque tout ce qu’elle tressait était dépourvu de motifs colorés, mais, au cours du dernier hiver passé dans sa caverne, elle s’était mise à faire des expériences avec des herbes de couleurs variées. Le résultat, associé à ses habituels motifs de tressage, donnait sur cette natte un effet subtil mais reconnaissable d’amas stellaire, qu’elle appréciait beaucoup. Au moment où elle choisissait les cadeaux à offrir, les flammes qui rayonnaient du centre lui avaient rappelé les pointes de sagaies de Wymez, et la texture du tissage avait évoqué pour elle les petits éclats aigus qu’il faisait sauter du silex. Elle se demandait si la ressemblance allait le frapper.

  Après avoir examiné la natte, il accorda à la jeune femme l’un de ses rares sourires.

  — C’est magnifique. Ça me rappelle le travail que faisait la mère de Ranec. Elle savait mieux que personne l’art de tresser les herbes. Je devrais ménager cette natte, je suppose, l’accrocher au mur, mais je préfère m’en servir. Je m’installerai dessus pour travailler. Elle m’aidera à fixer mon esprit sur le but à atteindre.

  Son accolade n’eut rien de la réticence avec laquelle il s’exprimait. Ayla comprit que, derrière une façade réservée, Wymez était un homme amical, chaleureux, compréhensif.

  Les échanges de cadeaux ne se faisaient pas selon un ordre établi d’avance. Celui que remarqua ensuite la jeune femme fut Rydag : debout près de la plate-forme, il attendait de pouvoir attirer son attention. Elle s’assit, lui rendit son étreinte fougueuse. Il ouvrit alors la main, lui montra un long tube, prélevé sur l’os creux d’une patte d’oiseau. Des trous y étaient ménagés. Elle prit l’objet, le tourna, le retourna entre ses mains, sans bien en saisir l’usage. Il le lui reprit, le porta à sa bouche et souffla. Le sifflet émit un son strident. Ayla essaya à son tour, sourit. Elle offrit à l’enfant un capuchon chaud et imperméable, fait dans une peau de glouton, comme en faisaient les gens du Clan. Mais elle se sentit déchirée lorsqu’il l’ajusta sur sa tête, tant il lui rappelait Durc.

  — Je lui ai donné un sifflet semblable pour qu’il puisse m’appeler s’il a besoin de moi. Il lui arrive de ne pas avoir assez de souffle pour crier, mais il lui en reste toujours suffisamment pour souffler là-dedans, expliqua Nezzie. Celui-ci, c’est lui qui l’a fait.

  Deegie surprit la jeune femme en lui offrant la tenue qu’elle avait prévu de porter pour la soirée. En voyant la façon dont Ayla la regardait, la jeune fille avait décidé de la lui donner. Ayla ne trouvait plus de mots. Elle avait les yeux pleins de larmes.

  — Jamais possédé si beaux vêtements, balbutia-t-elle.

  Elle offrit à Deegie son propre cadeau. C’était toute une série de corbeilles et de récipients de bois, de tailles différentes, exécutées avec un art consommé. On pouvait les utiliser comme coupes, pour boire, ou comme écuelles pour la soupe, ou même pour faire la cuisine. Deegie en trouverait l’usage dans son propre foyer, quand elle serait unie à Branag. Dans une région où le bois était relativement rare, où les ustensiles étaient faits le plus souvent d’os ou d’ivoire, c’était là un cadeau unique. Les deux jeunes femmes, ravies l’une et l’autre, s’étreignirent avec toute la chaleur de deux sœurs.

  Pour montrer qu’il n’avait pas l’intention de refuser à Ayla un présent convenable, Frébec lui fit présent d’une paire de hautes bottes de fourrure, dont le haut était décoré de piquants de porc-épic. Elle fut heureuse d’avoir choisi pour lui quelques-unes de ses meilleures peaux de renne, recueillies en été. Les poils du renne étaient creux, pareils à de minuscules tubes remplis d’air, et ainsi naturellement calorifuges. La peau d’été était à la fois la plus chaude et la plus légère, la plus pratique et la plus confortable de toutes les fourrures à porter pour les chasses d’hiver et, en conséquence, la plus précieuse. Avec ce qu’Ayla offrait à Frébec, on pourrait confectionner une tenue complète, tunique et jambières, qui, par les plus grands froids, ne nécessiterait guère qu’une pelisse enfilée par-dessus, et lui éviterait d’être surchargé et engoncé. Comme les autres, il remarqua la souplesse de ses peaux mais il ne dit rien, et son accolade fut distante.

  Fralie donna à Ayla des moufles assorties aux bottes. Elle reçut en retour un magnifique bassin de bois pour faire la cuisine, garni d’un sac empli de feuilles sèches.

  — Tisane te plaira, j’espère, Fralie, dit Ayla.

  Elle regardait la jeune femme bien en face, comme pour souligner ses paroles.

  — Est bon boire coupe le matin au réveil, et peut-être autre le soir, avant sommeil. Si tu aimes, donnerai autres feuilles quand celles-là finies.

  Fralie hocha la tête. Elles s’étreignirent. Frébec les observait, soupçonneux, mais Fralie recevait simplement un cadeau de la dernière en date des membres du Camp du Lion, et il ne pouvait guère s’en plaindre. Ayla, de son côté, n’était pas entièrement satisfaite des circonstances. Elle aurait préféré soigner Fralie ouvertement, mais user de ce subterfuge valait mieux que ne pas l’aider du tout, et Fralie refusait de se trouver placée dans une situation où il pourrait apparaître qu’elle faisait un choix entre sa mère et son compagnon.

  Crozie s’avança ensuite. Elle adressa un signe d’approbation à la jeune femme, lui tendit un petit sac de cuir en forme de bourse. Il était teint en rouge, habilement décoré de petites perles d’ivoire et de broderies blanches en triangles pointés vers le bas. Des petites plumes de grues blanches étaient attachées tout autour du fond circulaire. Ayla l’admira ouvertement, mais, voyant qu’elle ne faisait pas un geste pour ouvrir la bourse, Deegie lui conseilla de le faire. A l’intérieur se trouvaient des cordons et des fils, faits de poils de mammouth, de tendons de fourrures et de fibres végétales. Tous étaient enroulés avec soin autour de petites phalanges d’os. Le sac contenait aussi des lames tranchantes et des perçoirs. Ayla était enchantée. Ell
e voulait apprendre la manière dont s’y prenaient les Mamutoï pour coudre des vêtements et les orner.

  Elle alla prendre sur sa plate-forme un petit bol de bois muni d’un couvercle bien ajusté et le tendit à la vieille femme. Crozie, après l’avoir ouvert, regarda Ayla d’un air intrigué. Le bol était plein d’une matière grasse d’un blanc pur, marbré – une graisse animale, sans saveur, sans odeur, sans couleur, qui avait été clarifiée dans l’eau bouillante. Crozie la huma et sourit mais elle demeurait perplexe.

  — Je fais eau de rose... avec pétales, tenta d’expliquer Ayla. Mélange avec... autres choses.

  — C’est ce qui lui donne ce parfum agréable, sans doute, mais à quoi ça sert-il ?

  — Est pour mains, visage, coudes, pieds. Fait sentir bien. Adoucit. La jeune femme prit un peu du produit, en frictionna le dos de la vieille main desséchée, ridée, gercée. Crozie toucha sa main avant de fermer les yeux pour caresser du bout des doigts la peau plus douce. La vieille mégère rouvrit les paupières et Ayla crut voir ses prunelles briller d’un éclat nouveau. Il n’y avait cependant aucune trace de larmes. Mais, quand la vieille femme la serra contre elle, elle la sentit trembler de tout son corps.

  Chaque échange de cadeaux augmentait l’impatience de l’assemblée à voir les autres. Ayla prenait plaisir à donner autant qu’à recevoir. Jamais elle ne s’était sentie aussi comblée, entourée, désirée. Si elle se laissait aller à y penser, des larmes de joie lui montaient aux yeux.

  Ranec se tenait à l’écart : il attendait la fin des échanges. Il voulait être le dernier, pour que son présent ne risquât pas de se confondre avec les autres. Parmi tous les cadeaux recherchés, uniques, qu’elle aurait reçus, il voulait que le sien fût mémorable. Ayla mettait de l’ordre sur la plate-forme, aussi encombrée qu’au début de la distribution, lorsqu’elle remarqua le cadeau préparé pour Ranec. Elle dut réfléchir un instant avant de comprendre qu’elle n’avait toujours pas échangé de présents avec lui. Elle prit l’objet entre ses mains, se retourna pour chercher du regard l’homme à la peau sombre et se trouva en face de son sourire taquin.

 

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