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Fascination

Page 10

by Stephenie Meyer


  — Non.

  Mais j'avais répondu trop vite, car le sourire resurgit.

  — Et toi, vas-tu me parler de ta famille ? attaquai-je pour détourner son attention. Elle doit être bien plus intéressante que la mienne.

  Aussitôt, il retrouva sa prudence naturelle.

  — Que veux-tu savoir ?

  — Les Cullen t'ont adopté ?

  — Oui.

  J'hésitai une seconde, puis me lançai :

  — Qu'est-il arrivé à tes parents ?

  — Ils sont morts il y a des années.

  — Désolée.

  — Je ne m'en souviens pas bien. Carlisle et Esmé les ont remplacés depuis si longtemps.

  — Et tu les aimes.

  C'était une affirmation. La tendresse de sa voix avait suffi à m'en convaincre.

  — Oui. Je doute qu'il y ait meilleures personnes au monde.

  — Tu as beaucoup de chance.

  — J'en suis conscient.

  — Et ton frère et ta sœur ?

  Il jeta un coup d'œil à la pendule du tableau de bord.

  — Mon frère et ma sœur, sans parler de Jasper et Rosalie, vont être furieux si je les fais languir sous l'averse.

  — Désolée. Il faut que tu y ailles.

  Pourtant, je n'avais pas envie de quitter sa voiture.

  — De ton côté, tu préfères sûrement récupérer ta camionnette avant que le Chef Swan rentre, histoire de ne pas avoir à mentionner le petit incident de tout à l'heure.

  — Je suis sûre qu'il est déjà au courant, ronchonnai-je. Il n'y a pas de place pour les secrets, à Forks.

  Il éclata d'un drôle de rire.

  — Amuse-toi bien à la mer... joli temps pour bronzer, ajouta-t-il, allusion à la pluie qui dégringolait.

  — Je te vois, demain ?

  — Non. Emmett et moi avons décidé de nous octroyer un week-end précoce.

  — Qu'est-ce que vous avez prévu ? lançai-je en priant pour que ma voix ne trahisse pas trop ma déception.

  Un ami avait le droit de demander ça, non ?

  — Une randonnée du côté des Goat Rocks, au sud du mont Rainier.

  Je me rappelai Charlie mentionnant que les Cullen allaient souvent camper.

  — Ah bon. Profites-en bien, lui souhaitai-je, feignant l'enthousiasme.

  Je ne crois pas l'avoir trompé, cependant.

  — Accepterais-tu de me rendre service, ce week-end ?

  Il se tourna vers moi, plongeant ses pupilles d'or incandescent dans les miennes pour jouer à fond de leur pouvoir. J'acquiesçai, tétanisée.

  — Ne le prends pas mal, continua-t-il, mais j'ai l'impression que tu es de ces gens qui attirent les accidents comme un aimant. Alors... tâche de ne pas tomber à l'eau ni de te faire écraser par quoi que ce soit, d'accord ?

  Il me gratifia de son sourire en coin. En vain, car ma fascination s'était évanouie en entendant ses paroles — je le fusillai du regard.

  — On verra ! aboyai-je en bondissant sous la pluie.

  Je claquai la portière derrière moi avec une violence inutile. Il s'éloigna sans se départir de sa bonne humeur.

  1 Bruce Wayne : le séduisant milliardaire qui se transforme en Batman ; Peter Parker : l'étudiant maladroit qui devient Spiderman.

  6

  HISTOIRES EFFRAYANTES

  Assise dans ma chambre, j'essayais de me concentrer sur le troisième acte de Macbeth. En réalité, je guettais le bruit annonçant ma Chevrolet. J'aurais cru que, en dépit du fracas de la pluie, j'aurais détecté son rugissement. Pourtant, lorsque j'allai pour la énième fois jeter un coup d'œil par la fenêtre, ma voiture, soudain, était là.

  J'aurais aimé échapper à la journée du lendemain. Ce vendredi se révéla d'ailleurs à la hauteur de mes réticences. Il y eut, bien sûr, les commentaires sur mon évanouissement. Jessica, en particulier, sembla prendre beaucoup de plaisir à colporter l'histoire. Heureusement, Mike ne se prêta pas aux racontars, et nul ne parut être au courant de l'implication d'Edward. Cela n'empêcha pas Jessica de me bombarder de questions à propos de notre déjeuner en tête-à-tête.

  — Alors, qu'est-ce que te voulait Edward Cullen, hier ? me demanda-t-elle en maths.

  — Aucune idée, répondis-je, sincère. Il ne me l'a pas vraiment dit.

  — Tu avais l'air sacrément en rogne, insista-t-elle.

  — Ah bon ? éludai-je.

  — Tu sais, c'était la première fois que je le voyais s'asseoir avec quelqu'un qui n'est pas de sa famille. Bizarre.

  — En effet.

  Ma retenue eut le don de l'agacer, et elle écarta ses boucles sombres avec impatience — j'imagine qu'elle avait escompté me tirer quelques ragots à se mettre sous la dent.

  Le pire fut que je le guettai quand même, alors que je savais qu'il ne viendrait pas. Quand j'entrai à la cafétéria avec Jessica et Mike, je ne pus m'empêcher de regarder sa table, où Rosalie, Alice et Jasper discutaient, penchés les uns vers les autres. Pas plus que je ne pus empêcher la morosité de me submerger lorsque je compris que j'ignorais combien de temps se passerait avant que je le revisse.

  Dans mon groupe habituel, tout le monde ne parlait que des projets du lendemain. Mike avait retrouvé son entrain, extrêmement confiant dans les services météorologiques locaux qui avaient promis du soleil. Je n'y croirais que quand je l'aurais vu. Mais le temps s'était réchauffé, presque seize degrés. La sortie ne serait peut-être pas totalement nulle.

  Au cours du déjeuner, j'interceptai plusieurs regards peu amènes de Lauren. Je n'en compris la raison que quand notre groupe quitta la cantine. Je marchais juste derrière elle, à une dizaine de centimètres de ses cheveux lustrés blond platine, ce dont elle n'était visiblement pas consciente. « ... ne sais pas pourquoi Bella (mon nom presque craché) ne s'assied pas dorénavant avec les Cullen », la surpris-je en train de marmonner à Mike. Je n'avais encore jamais remarqué quelle voix déplaisante et nasale elle avait, et je fus stupéfaite de la méchanceté qui en suintait. Je ne la connaissais vraiment pas bien, pas assez en tout cas pour qu'elle me déteste comme ça — enfin, à mon avis.

  — C'est mon amie, me défendit Mike avec loyauté, quoique d'un ton un peu possessif. Elle mange avec nous.

  Je m'arrêtai afin de laisser passer Jess et Angela. Je ne tenais pas à en entendre plus.

  Ce soir-là au dîner, Charlie parut ravi de mon excursion à La Push. S'il se sentait sûrement coupable de m'abandonner à la maison durant les week-ends, il avait néanmoins consacré suffisamment d'années à se construire des habitudes pour les briser maintenant. Bien sûr, il connaissait le nom de tous ceux qui seraient de la partie, ainsi que leurs parents et leurs grands-parents sans doute. Il approuvait. Je me demandai s'il serait aussi favorable à mon projet de me rendre à Seattle en compagnie d'Edward Cullen. Non que j'eusse l'intention de l'en avertir.

  — Papa, demandai-je d'un air décontracté, tu connais un coin qui s'appelle... Goat Rocks, un truc dans le genre ? Je crois que c'est au sud du mont Rainier.

  — Oui. Pourquoi ?

  Je haussai les épaules.

  — Des gens parlaient d'aller y camper.

  — Ce n'est pas l'endroit idéal. Il y a trop d'ours. On y va en général que pour la saison de chasse.

  — Oh, j'ai sans doute mal compris.

  J'avais espéré m'offrir une grasse matinée mais, le samedi, une luminosité inhabituelle me réveilla. J'ouvris les yeux sur une clarté jaune qui illuminait mes carreaux. Incroyable ! Je me précipitai à la fenêtre pour vérifier. Je ne rêvais pas — le soleil brillait. Certes trop bas dans le ciel, pourtant c'était bien lui. Des nuages bordaient l'horizon, mais laissaient place à une grande tache bleue au milieu. Je traînassai aussi longtemps que possible devant ma vitre, me régalant du spectacle, craignant qu'il ne s'effaçât si je m'éloignais.

  Chez Newton — « Le Spécialiste des activités de plein air » — se trouvait au nord de la ville. J'étais déjà passé devant sans m'y arrêter : ayant banni lesdites activités pour un bon moment, je n'avai
s aucun besoin de matériel. Sur le parking, je me garai à côté de la Suburban de Mike et de la Sentra de Tyler. Y étaient attroupés Éric et deux garçons avec qui je partageais mes cours et dont j'étais presque sûre qu'ils s'appelaient Ben et Conner. Jess, flanquée d'Angela et Lauren, était entourée de trois filles parmi lesquelles une sur laquelle j'étais tombée en cours de gym le vendredi. Elle m'adressa d'ailleurs un regard mauvais quand je sortis de ma camionnette et échangea des messes basses avec Lauren qui secoua ses cheveux blonds et me gratifia d'un coup d'œil dédaigneux.

  Ça promettait donc d'être un de ces jours sans. Mike, lui, parut content de me voir.

  — Tu es venue ! s'exclama-t-il, ravi. Ne t'avais-je pas dit qu'il ferait beau, aujourd'hui ?

  — Et ne t'avais-je pas dit que je serais là ?

  — Nous n'attendons plus que Lee et Samantha... à moins que tu aies invité quelqu'un.

  — Non, affirmai-je avec aplomb en croisant les doigts pour que ce mensonge ne me revienne pas en pleine figure.

  Et aussi pour qu'un miracle se produise et qu'Edward apparaisse.

  — Tu monteras dans ma voiture ? me proposa Mike, visiblement satisfait par ma réponse. C'est ça ou le minibus de la mère de Lee.

  — Bien sûr.

  Un sourire s'épanouit sur ses lèvres. Il était tellement facile de lui faire plaisir.

  — Tu pourras t'installer devant, promit-il.

  Je dissimulai mon dépit. Il n'était pas aussi facile de faire plaisir à la fois à Mike et à Jessica. Celle-ci nous observait d'un air renfrogné. Heureusement, le nombre joua en ma faveur. Lee vint avec deux personnes de plus et, tout à coup, chaque siège fut nécessaire. Je réussis à coincer Jess entre Mike et moi sur le siège avant de la Suburban. Mike aurait pu montrer un peu plus de joie mais, au moins, sa future cavalière fut rassérénée.

  La Push n'était distante de Forks que de vingt-cinq kilomètres. La route était pour l'essentiel bordée de forêts denses et somptueuses et, deux fois, nous croisâmes les méandres de la large rivière Quillayute. Je me réjouis d'avoir la place près de la fenêtre. Nous avions baissé les carreaux — la voiture devenait un peu étouffante, avec neuf personnes à bord — et je tâchai d'absorber un maximum de soleil.

  J'avais beaucoup fréquenté les plages autour de La Push pendant mes étés à Forks, et le croissant long de deux kilomètres de First Beach m'était familier. La vue était toujours aussi époustouflante. Les vagues couleur acier, même par beau temps, s'abattaient, moutonneuses, sur la côte rocheuse grise. Des îles aux falaises escarpées émergeaient des eaux du port ; leurs sommets étaient découpés en multiples pics et plantés de hauts sapins austères. La plage n'était qu'une mince bande de sable le long de l'eau, vite remplacée par des millions de grandes pierres lisses qui, de loin, paraissaient uniformément ardoise mais qui, de plus près, couvraient toutes les palettes de la roche : ocre foncé, vert océan, lavande, gris-bleu, or terne. La laisse de haute mer était jonchée de bois flotté, énormes troncs blanchis par les vagues salées, certains amalgamés à la lisière de la forêt, d'autres gisant, isolés, juste au-delà de l'atteinte du ressac.

  Un vent vif, frais et chargé de sel soufflait du large. Des pélicans flottaient au gré de la houle tandis que des mouettes blanches et un aigle solitaire tournoyaient au-dessus. Les nuages bordaient toujours le ciel, menaçant de l'envahir à tout moment mais, pour l'instant, le soleil brillait bravement dans son halo bleu.

  Nous descendîmes sur la plage derrière Mike, qui nous conduisit jusqu'à un cercle de rondins apportés par la mer qui avait visiblement déjà servi à abriter des pique-niques comme le nôtre. Un foyer plein de cendres froides en occupait le centre. Éric et le garçon qui, d'après moi, s'appelait Ben, allèrent ramasser des branches mortes bien sèches à l'orée de la forêt et eurent tôt fait d'ériger un assemblage en forme de tipi au-dessus des restes noircis des feux de camp précédents.

  — As-tu déjà vu brûler du bois flotté ? me demanda Mike.

  J'étais assise sur l'un des troncs décolorés. Les autres filles s'étaient regroupées et discutaient avec entrain de part et d'autre de moi.

  — Non, répondis-je.

  Mike s'agenouilla près du foyer et enflamma une brindille à l'aide d'un briquet. Il plaça soigneusement son tison au milieu de l'échafaudage.

  — Ça va te plaire, alors. Regarde bien les couleurs.

  Il incendia une nouvelle branchette et la positionna à côté de la première. Les flammes ne tardèrent pas à lécher le bois.

  — Elles sont bleues ! m'écriai-je, stupéfaite.

  — C'est le sel. Chouette, non ?

  Après avoir installé un troisième brandon là où la flambée n'avait pas encore pris, il vint s'asseoir près de moi. Heureusement, Jess était juste de l'autre côté. Se tournant vers lui, elle l'entreprit. Je contemplai les drôles de flammes vertes et bleues qui montaient vers le ciel.

  Au bout d'une demi-heure à discuter, quelques garçons proposèrent une balade aux bassins de marée naturels tout proches. Pour moi, ce fut un dilemme. D'un côté, j'adorais ces vastes piscines d'eau de mer laissées par le ressac. Enfant, elles m'avaient fascinée ; elles étaient l'une des rares choses que j'avais envie de voir lorsque je venais à Forks. De l'autre, j'étais tombée dedans plus souvent qu'à mon tour. Ce qui n'était pas trop grave à sept ans, surveillée par mon père. Cela me rappela la demande d'Edward — ne pas prendre de bain forcé.

  Ce fut Lauren qui força ma décision. Elle refusa de se promener, car elle n'avait absolument pas les chaussures adéquates. La plupart des filles, sauf Jessica et Angela, choisirent elles aussi de rester sur la plage. J'attendis que Tyler et Éric s'engagent à leur tenir compagnie avant de me lever sans bruit pour me joindre aux randonneurs. Mike accueillit ma présence par un immense sourire.

  Le trajet n'était pas long, mais perdre le ciel de vue dans les sous-bois m'oppressa. La lumière verte des frondaisons détonnait étrangement avec les rires adolescents qui fusaient, elle était trop glauque et menaçante pour s'harmoniser avec le badinage du groupe. Je devais prêter attention à chacun de mes pas, évitant prudemment les racines par terre et les branches au-dessus de moi, et je ne tardai pas à me retrouver à la traîne. Je finis par émerger de ce confinement émeraude et débouchai de nouveau sur les rochers de la côte. C'était marée basse, et un chenal s'était formé sur la grève. Le long de ses rives couvertes de galets, des creux d'eau peu profonds qui ne se vidaient jamais complètement grouillaient de vie.

  Je pris garde à ne pas trop me pencher au-dessus de ces océans miniatures. Les autres, pleins d'audace, sautaient de rocher en rocher et se perchaient périlleusement à leur extrême bord. Je dénichai une pierre à peu près stable dominant l'un des plus grands bassins et m'y assis avec prudence, fascinée par l'aquarium naturel qui s'étalait à mes pieds. Les lumineux bouquets d'anémones ondulaient sans fin au gré d'un courant invisible, des coquillages chantournés filaient sur le pourtour de la vasque en cachant les crabes, des étoiles de mer s'agrippaient, immobiles, aux rochers et les unes aux autres tandis qu'une minuscule anguille noire striée de blanc sinuait entre les algues d'un vert éclatant, attendant le retour de la mer. J'étais tout entière au spectacle, à l'exception d'une petite partie de mon cerveau qui s'interrogeait sur ce qu'Edward était en train de faire et tentait d'imaginer ce qu'il aurait dit s'il avait été avec moi.

  Les garçons finirent par avoir faim, et je me relevai, raide, pour les suivre. Ce coup-ci, je m'efforçai de garder le rythme en traversant les bois et, naturellement, je tombai plusieurs fois, récoltant quelques égratignures sur les paumes et tachant mon jean de vert au niveau des genoux. Mais bon, ça aurait pu être pire.

  De retour à First Beach, nous découvrîmes que le groupe que nous y avions laissé s'était agrandi. Nous rapprochant, nous distinguâmes les chevelures d'un noir de jais et les peaux cuivrées d'adolescents de la réserve venus bavarder. La nourriture circulait déjà, et les gars se précipitèrent pour réclamer leur part tandis qu'Éric nous présentait au
fur et à mesure que nous regagnions le cercle de bois flotté. Angela et moi arrivâmes bonnes dernières. Lorsque Éric prononça mon nom, je remarquai qu'un Indien plus jeune, assis sur une pierre proche du foyer, me regardait avec intérêt. Je m'installai près d'Angela, et Mike nous apporta des sandwichs et un choix de canettes, cependant que celui qui semblait être le plus âgé de nos visiteurs récitait les prénoms de ses sept camarades. Tout ce que je retins, ce fut qu'une des filles s'appelait Jessica, et le gamin Jacob.

  La compagnie d'Angela était relaxante, car elle n'éprouvait pas le besoin de combler le silence en bavardant. Elle me laissa toute liberté de méditer pendant notre repas. Je réfléchis à la façon chaotique dont le temps paraissait s'écouler à Forks, passant à toute vitesse par moments pour ne laisser surnager dans ma mémoire que quelques images isolées plus distinctes que les autres, mais ralentissant aussi parfois, chaque seconde lourde de sens et se gravant dans mon esprit. Je savais exactement ce qui différenciait ces deux tempos, et cela m'ennuyait.

  Durant le pique-nique, les nuages commencèrent à grignoter furtivement le ciel bleu, dissimulant quelquefois le soleil, dessinant de longues ombres sur la plage et noircissant les vagues. Après le déjeuner, les gens s'égaillèrent par deux ou trois. Certains choisirent de longer la grève en essayant de sauter de rocher en rocher au-dessus des eaux tumultueuses ; d'autres se préparèrent pour une deuxième expédition aux bassins de marée. Mike, suivi à la trace par Jessica, décida de se rendre au village, et quelques-uns de nos visiteurs les escortèrent, tandis que leurs camarades se joignaient à la balade. Je finis par me retrouver seule sur mon rondin en compagnie de Lauren et de Tyler, qui s'occupaient avec le lecteur CD que quelqu'un avait pensé à apporter, et de trois adolescents de la réserve assis à divers endroits du cercle. Parmi eux, le dénommé Jacob et le plus âgé des garçons, celui qui avait joué les porte-parole.

  Quelques minutes après qu'Angela fut partie avec les randonneurs, Jacob s'approcha d'un pas nonchalant et s'assit à côté de moi. Il paraissait avoir quatorze, peut-être quinze ans, et avait de longs cheveux noirs luisants retenus par un élastique au niveau de la nuque. Sa peau brun-roux était belle et soyeuse ; ses yeux sombres étaient profondément enfoncés au-dessus des méplats prononcés de ses joues. Quelques traces de rondeur enfantine s'attardaient encore autour de son menton. L'un dans l'autre, un fort joli visage. Néanmoins, cette impression positive fut gâchée dès qu'il ouvrit la bouche.

 

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