RÉVÉLATION

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RÉVÉLATION Page 5

by Stephenie Meyer


  — Respire profondément, me conseilla mon mentor du jour. Et tâche de te calmer, sinon tu vas transpirer et anéantir ton maquillage.

  — C’est comme si c’était fait ! ripostai-je en lui décochant mon regard le plus ironique possible.

  — Il faut que je me prépare. Es-tu capable de rester seule deux minutes ?

  — Euh… peut-être.

  Levant les yeux au ciel, elle fila.

  Je me focalisai sur ma respiration, comptai les mouvements de mes poumons, tout en contemplant les dessins que la lumière de la salle de bains formait sur le tissu brillant de ma jupe. Je craignais d’observer mon reflet dans la glace, je redoutais que mon image en robe de mariée ne provoque un accès de panique.

  Alice revint avant que j’aie compté deux cents respirations, dans une tenue qui épousait comme une cascade argentée les contours de son corps mince.

  — Alice ! Wouah !

  — Merci, mais ce n’est rien. Personne ne me regardera, aujourd’hui. Du moins tant que tu seras dans la même pièce que moi.

  — Ha ! Ha ! Très drôle.

  — Bon, tu te contrôles, ou faut-il que je t’amène Jasper ?

  — Il est revenu ? Ma mère est ici ?

  — Elle vient de franchir le seuil. Elle monte.

  Renée avait atterri deux jours auparavant, et j’avais passé un maximum de temps en sa compagnie, lorsque je réussissais à l’arracher à Esmé et aux décorations, s’entend. D’après ce que j’en avais vu, elle s’amusait plus qu’un gosse qui se serait laissé enfermer une nuit entière à Disneyland. D’une certaine façon, je m’étais sentie aussi flouée que Charlie. Tant de terreur vaine à l’idée de sa réaction…

  — Oh ! Bella ! s’exclama-t-elle, aux anges, avant même d’avoir refermé la porte de la salle de bains derrière elle. Tu es magnifique, chérie ! Je crois que je vais pleurer ! Alice, tu es formidable ! Toi et Esmé devriez vous lancer dans l’organisation de mariages. Où as-tu déniché pareille robe ? Elle est splendide ! Si gracieuse, si élégante ! Bella, on dirait que tu sors tout droit d’une adaptation de Jane Austen ! (Sa voix me parvenait, légèrement assourdie, cependant que les contours de la pièce étaient quelque peu flous.) C’est une idée véritablement originale que d’avoir conçu la fête autour du thème de la bague de Bella. Et d’un tel romantisme ! Quand je pense qu’elle est dans la famille depuis les années 1900 !

  Alice et moi échangeâmes un coup d’œil complice. Ma mère se trompait de plus d’un siècle quant à ma tenue. Et les noces n’étaient pas du tout centrées sur la bague mais sur Edward.

  Sur le seuil résonna un raclement de gorge bruyant et gêné.

  — Renée ? lança Charlie. Esmé dit qu’il est temps que tu redescendes.

  — Eh bien, Charlie, tu as fière allure ! s’écria ma mère.

  Son ton presque choqué expliqua sans doute la sécheresse de la réponse.

  — C’est l’œuvre d’Alice.

  — Il est déjà l’heure ? marmonna Renée, l’air presque aussi nerveuse que moi. Tout est allé si vite. J’en ai le vertige.

  Ainsi, nous étions deux.

  — Embrasse-moi avant que je ne m’en aille, insista Renée. Attention, ne déchire pas ta robe.

  Elle me serra doucement contre elle en me prenant par la taille puis fila vers la porte. Au dernier moment, elle se retourna.

  — Dieu tout-puissant, j’ai failli oublier ! Où est la boîte, Charlie ?

  Mon père fourragea dans ses poches pendant une minute avant de sortir un écrin blanc qu’il tendit à ma mère. Cette dernière en souleva le couvercle et me le tendit.

  — Quelque chose de bleu, dit-elle.

  — Et d’ancien1, précisa Charlie. Ils appartenaient à ta grand-mère Swan. Nous avons fait remplacer les strass par des saphirs.

  L’écrin renfermait deux gros peignes en argent. Des pierres bleu sombre étaient insérées dans les motifs floraux compliqués qui surmontaient les dents. Ma gorge se serra.

  — Maman… Papa… Vous n’auriez pas dû.

  — Alice nous a interdit de nous occuper d’autre chose, se défendit Renée. Chaque fois que nous avons essayé, elle a failli nous égorger.

  Un rire hystérique s’échappa de mes lèvres. Alice s’empressa d’avancer et glissa vivement les peignes à la base de mes tresses.

  — Ils sont vieux et bleus, commenta-t-elle en reculant de quelques pas pour m’admirer. Ta robe est neuve… alors, tiens.

  Elle me lança un objet que j’attrapai par réflexe. Une jarretière blanche et vaporeuse atterrit dans mes paumes.

  — Elle est à moi, me précisa-t-elle, et elle s’appelle reviens.

  Je rougis.

  — Parfait, se réjouit-elle aussitôt. Un peu de couleur, c’est tout ce qui te manquait. Je te déclare officiellement parfaite. Et maintenant, ajouta-t-elle en se tournant vers mes parents, il faut que vous rejoigniez les autres, Renée.

  — À vos ordres !

  Ma mère m’envoya un baiser avant de disparaître.

  — Vous voulez bien aller chercher les fleurs, Charlie ?

  Profitant de l’absence de mon père, Alice me prit la jarretière et plongea sous ma robe. Le contact de ses doigts glacés autour de ma cheville me fit pousser un cri étouffé. Tandis que je me tortillais sur place, elle remonta fermement l’accessoire à sa place désignée. Lorsque Charlie revint avec deux bouquets blancs, aériens, elle s’était relevée. Leur parfum m’enveloppa d’une brume douillette.

  En bas, Rosalie, la meilleure musicienne de la famille après Edward, commença à jouer du piano. Le canon de Pachelbel. Je me mis à haleter.

  — Du calme, Bella, dit Charlie. Elle a l’air malade, lança-t-il ensuite à Alice. Tu crois qu’elle va tenir le coup ?

  Là encore, sa voix paraissait très lointaine. Je ne sentais plus mes jambes.

  — Elle a intérêt, rétorqua mon amie.

  Elle vint se placer devant moi, dressée sur la pointe des pieds afin de me fixer droit dans les yeux. Ses mains dures s’emparèrent de mes poignets.

  — Concentre-toi, Bella, m’ordonna-t-elle. Edward t’attend au rez-de-chaussée.

  Respirant profondément, je m’encourageai à reprendre contenance. La mélodie se transforma peu à peu en un thème nouveau.

  — C’est le moment, Bella, me lança Charlie.

  — Bella ? insista Alice.

  — Oui, couinai-je. Edward. D’accord.

  Je la laissai me pousser hors de la pièce, escortée par Charlie.

  Dans le couloir, la musique était plus audible. Elle flottait dans l’escalier à l’unisson des arômes floraux par milliers. Afin de me forcer à avancer, je m’attachai à l’image de mon promis, qui patientait en bas. Les notes étaient familières. La marche nuptiale de Wagner, enjolivée d’un torrent de trilles.

  — À moi d’entrer en scène ! pépia Alice. Compte jusqu’à cinq, Bella, puis suis-moi.

  Sur ce, elle entama une danse lente et gracieuse le long des marches. J’aurais dû me rendre compte plus tôt que lui confier le rôle de demoiselle d’honneur était une erreur. J’aurais en effet l’air bien gauche après elle. Une fanfare éclata brusquement, et je reconnus le signal.

  — Empêche-moi de tomber, papa, soufflai-je.

  Charlie passa ma main sous son bras et l’y serra fermement. Nous avançâmes à pas lents au rythme de la mélodie, cependant que je me répétais de descendre degré après degré. Je ne relevai les yeux qu’une fois en sécurité au rez-de-chaussée. Les murmures de l’assistance m’étaient parvenus au fur et à mesure que j’apparaissais. Le rouge m’était monté aux joues ; naturellement, j’étais de ces mariées promptes à s’empourprer.

  Sitôt mes pieds libérés des marches traîtresses, je le cherchai. L’espace d’une seconde, je fus distraite par la profusion de fleurs blanches qui étaient accrochées en girandoles sur tout ce qui n’était pas vivant dans la pièce, guirlandes qui dégoulinaient de longs rubans de gaze blanche. Je m’arrachai au spectacle de ce dais pour scruter les rangées de chaises
drapées de satin, rougissant encore plus au fur et à mesure que je prenais conscience de la foule qui me fixait, jusqu’à ce que je le découvre enfin, debout devant une arche croulant sous le poids d’autres fleurs mêlées de tulle.

  Je me rendis à peine compte que Carlisle était à son côté, et le père d’Angela derrière eux deux. Je ne vis pas ma mère au premier rang, sa place assignée, ni ma future belle-famille, ni aucun invité – cela attendrait.

  Je n’avais d’yeux que pour Edward ; son visage emplit mon champ de vision, submergea mon esprit. Ses prunelles étaient d’un or incandescent ; l’ampleur de son émotion rendait ses traits sans défaut presque sévères. Puis son regard croisa le mien, et sa bouche se fendit d’un sourire heureux qui me coupa le souffle. Tout à coup, seule la pression de la main de Charlie sur la mienne m’empêcha de me ruer vers mon promis.

  La musique était trop lente à mon goût, et j’avais du mal à ne pas la devancer. Par bonheur, le trajet était très court. Enfin, ô enfin, je fus rendue. Edward me tendit la main, et Charlie plaça la mienne dessus, en un geste symbolique vieux comme le monde. Lorsque j’effleurai le froid miracle de sa peau, j’eus l’impression d’être arrivée chez moi.

  L’échange des vœux fut simple, mots traditionnels qui avaient été répétés des millions de fois, même si notre couple était unique en son genre. Nous avions juste demandé à M. Weber d’effectuer un infime changement et, au lieu de l’ancestral « jusqu’à ce que la mort nous sépare », il dit : « tant que nous vivrons tous deux ». Au moment où il prononçait ces paroles, mon univers, qui avait été sens dessus dessous pendant si longtemps, parut retrouver sa signification et son équilibre. Je compris à quel point j’avais été sotte de redouter le mariage, comme s’il avait été un cadeau d’anniversaire non désiré ou une manifestation embarrassante, à l’instar du bal de fin d’année. Je plongeai mes yeux dans ceux brillants et triomphants d’Edward et devinai que, moi aussi, j’avais gagné. Parce que plus rien n’importait, sinon que j’allais pouvoir rester à son côté.

  Je ne me rendis compte de mes larmes qu’à l’instant où vint mon tour de parler.

  — Oui, réussis-je à balbutier en un chuchotement à peine audible, tout en clignant des paupières pour continuer à le voir.

  — Oui, assena-t-il à son tour.

  M. Weber nous déclara mari et femme, puis les mains d’Edward s’emparèrent avec douceur de mon visage, comme s’il était constitué de pétales aussi délicats que ceux des fleurs qui se balançaient doucement au-dessus de nous. Malgré les larmes qui m’aveuglaient, je m’efforçai d’appréhender la réalité nouvelle : l’être stupéfiant en face de moi était mien. Ses yeux dorés semblaient vouloir pleurer eux aussi, si une telle chose avait été possible. Il se pencha vers moi, je me hissai sur la pointe des pieds et refermai mes mains (bouquet compris) autour de son cou.

  Il m’embrassa avec tendresse et adoration ; j’oubliai la foule, les lieux, l’heure, la raison… me rappelant juste qu’il m’aimait, qu’il me voulait, que j’étais sienne.

  S’il déclencha le baiser, il dut également l’interrompre. Je m’accrochais à lui, insoucieuse des rires étouffés et des raclements de gorge de l’assistance. Ses doigts finirent par m’écarter, et il recula pour me contempler. En surface, son brusque sourire était amusé, presque moqueur. Mais plus en profondeur, il révélait une joie authentique, qui faisait écho à celle que j’éprouvais.

  Le public applaudit, et Edward fit tourner notre couple en direction de nos amis et familles. Je fus incapable de le quitter des yeux pour les regarder.

  Ma mère fut la première à m’enlacer, et son visage strié de larmes fut la première chose que je vis quand je daignai enfin me détacher de mon époux. Puis je passai de mains en mains, de bras en bras, à peine consciente de qui me félicitait, mon attention tout entière concentrée sur les doigts d’Edward qui ne me lâchaient pas. Je ne fis la distinction qu’entre les embrassades molles et tièdes des humains et celles mesurées et fraîches de ma nouvelle famille. Seule une étreinte brûlante se différencia des autres, celle de Seth Clearwater, qui avait bravé la horde de vampires afin de représenter mon loup-garou préféré, mon ami perdu.

  1 La tradition américaine veut que, pour qu’une union soit placée sous le signe du bonheur et de la longévité, la mariée porte sur elle un accessoire bleu (couleur de la modestie et de la pureté), un accessoire ancien, un autre neuf et un dernier emprunté à quelqu’un. Parfois, les promises se contentent d’un seul objet, déléguant les autres à leurs demoiselles d’honneur.

  4

  GESTE

  Après les rites officiels, la fête proprement dite enchaîna en douceur, preuve de l’organisation parfaite d’Alice. Au-dessus de la rivière, le crépuscule s’installait. La cérémonie avait duré exactement le temps escompté, ce qui avait permis au soleil de commencer sa descente derrière les arbres. Dans les branches, les lampes brillaient, illuminant les fleurs blanches, quand Edward me conduisit dans le jardin, au-delà de la baie vitrée du salon. Dehors, d’autres corolles répandaient par milliers leurs fragrances et formaient une tente aérienne au-dessus de la piste de danse installée sur l’herbe, entre deux cèdres ancestraux.

  Le rythme se mollifia, cependant que la soirée estivale nous enveloppait. Les invités s’égayèrent sous la douce lueur des ampoules, et les amis que nous venions d’embrasser vinrent une nouvelle fois nous féliciter. À présent, nous avions le loisir de discuter et de rire.

  — Félicitations, les enfants ! nous lança Seth Clearwater en baissant la tête pour passer sous une guirlande de fleurs.

  Sa mère, Sue, se tenait juste à côté de lui, surveillant nos commensaux avec une intensité soucieuse. Son visage mince et dur arborait une expression sévère que renforçaient ses cheveux coupés aussi court que ceux de sa fille Leah, et je me demandai si elle avait adopté cette coiffure par solidarité avec ses enfants. De l’autre côté de Seth, Billy Black était plus détendu.

  Lorsque je regardais le père de Jacob, j’avais toujours l’impression de voir deux personnes en une. Il y avait le vieil homme en fauteuil roulant, aux joues ridées et au sourire d’une blancheur éclatante – celui que tout le monde connaissait. Mais il y avait aussi le descendant direct d’une longue lignée de chefs aux puissants pouvoirs surnaturels, doté d’une autorité naturelle. La magie avait beau avoir, en raison de l’absence d’un catalyseur, sauté une génération, Billy faisait bien partie de la légende. Il en était imprégné, comme l’était son fils, l’héritier désigné des mythes, qui avait cependant refusé cette charge. Sam Uley avait donc pris le relais et agissait en chef de meute, désormais.

  Billy paraissait étrangement à l’aise, malgré l’assistance, malgré l’événement. Ses yeux noirs luisaient comme s’il avait été porteur d’une bonne nouvelle. Son attitude m’impressionna. Ce mariage avait dû lui sembler une très mauvaise chose, la pire qui pût arriver à la fille de son meilleur ami. Je me doutais qu’il n’était pas évident pour lui de contenir ses sentiments, dans la mesure où notre union était de mauvais augure pour le traité passé entre les Cullen et les Quileute, lequel stipulait que ma nouvelle famille n’avait pas le droit de créer de nouveau vampire. Les loups savaient qu’une infraction se profilait, et les Cullen ignoraient quelle serait leur réaction. Avant l’alliance, elle aurait consisté en une attaque immédiate, une guerre. Maintenant que les vieux ennemis se connaissaient mieux, le pardon l’emporterait-il ?

  Comme pour répondre à cette interrogation, Seth s’approcha d’Edward en tendant les bras, et ils se donnèrent l’accolade. Sue frémit.

  — Je suis heureux que les choses se soient arrangées pour vous deux, déclara Seth.

  — Merci, répondit Edward. Tes paroles me vont droit au cœur. Merci aussi à vous, ajouta-t-il à l’intention de Sue et de Billy. Pour avoir permis à Seth de venir. Et pour avoir soutenu Bella aujourd’hui.

  — De rien, dit Billy de sa voix grave et rocailleuse.

  Ses accents optimistes m’éton
nèrent. Une trêve plus solide se dessinait peut-être à l’horizon.

  Comme une file d’attente était en train de se former, Seth prit congé et poussa le fauteuil de Billy en direction du buffet. Sue les accompagna, une main posée sur l’épaule de chacun. Angela et Ben nous présentèrent leurs vœux de bonheur, suivis des parents d’Angela, puis de Mike et de Jessica. Ces deux-là se tenaient par la main, ce qui me surprit : j’ignorais qu’ils s’étaient rabibochés. J’en fus contente.

  Après les humains survinrent mes cousins par alliance de Denali. Quand la femme qui ouvrait la marche, Tanya à en juger par ses boucles d’un blond vénitien, enlaça Edward, je retins mon souffle. Elle était escortée par trois autres vampires aux prunelles dorées qui me dévisageaient avec une curiosité non feinte : une femme aux longs cheveux blond clair et raides comme des épis de blé, et un couple brun dont la peau pâle était teintée de matité. Tous quatre étaient si beaux que mon estomac se noua.

  — Ah ! lança Tanya sans lâcher Edward, comme tu m’as manqué !

  Il rit et se dégagea habilement en plaçant ses doigts sur son épaule et en reculant d’un pas, comme s’il désirait mieux la regarder.

  — Trop de temps a passé, Tanya, répondit-il. Tu as l’air en forme.

  — Toi aussi.

  — Permets-moi de te présenter ma femme.

  C’était la première fois qu’il utilisait ce mot depuis que la cérémonie l’avait officialisé. Il paraissait sur le point d’exploser de joie. Le clan de Denali ne s’y trompa pas, et tous rirent d’un ton léger.

  — Tanya, voici ma Bella.

  Ma rivale était aussi splendide que ce que mes pires cauchemars avaient prédit. Elle me détailla d’un air bien plus interrogatif que résigné avant de me prendre la main.

  — Bienvenue dans la famille, Bella, déclara-t-elle avec un petit sourire contraint. Nous nous considérons comme les parents lointains de Carlisle, et je suis réellement désolée de… l’incident survenu récemment et durant lequel nous ne nous sommes pas comportés comme nous l’aurions dû. Je regrette de ne pas t’avoir rencontrée plus tôt. Nous pardonneras-tu ?

 

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