Tout à coup, Mike sortit des toilettes en titubant. Il était blême et en sueur. Il avait l'air très mal en point.
— Oh, Mike ! m'écriai-je.
— Ça ne vous ennuie pas si on rentre ? chuchota-t-il.
— Non, bien sûr que non.
Récupérant ma main, je me précipitai pour le soutenir tant il paraissait chancelant.
— Le film était un peu trop sanglant pour toi ? s'enquit Jacob, impitoyable.
— Je n'en ai rien vu, rétorqua Mike en le fusillant du regard. J'ai eu envie de vomir avant même qu'ils éteignent les lumières.
— Pourquoi n'as-tu rien dit ? le grondai-je.
— J'espérais que ça passerait.
— Un instant ! lança Jacob quand nous atteignîmes la porte.
Il fila à grands pas vers le stand de pop-corn.
— Auriez-vous la gentillesse de me donner un pot vide ? demanda-t-il à la vendeuse.
Un simple coup d'œil à Mike suffit à la décider d'accepter.
— Emmenez-le, et vite ! le supplia-t-elle.
Visiblement, c'était elle qui était chargée de nettoyer les sols.
J'entraînai Mike dehors. Il inhala profondément l'air glacé et humide. Jacob était juste derrière nous, et il m'aida à installer Mike à l'arrière de la voiture avant de lui tendre le pot avec sérieux.
— S'il te plaît, lui dit-il seulement.
Nous descendîmes les fenêtres pour laisser la fraîcheur nocturne aérer le véhicule, espérant que ça soulagerait Mike. Je me pelotonnai pour ne pas geler sur place.
— Tu as froid ? me demanda Jacob en m'attirant à lui avant que j'aie eu le temps de répondre.
— Pas toi ?
Il secoua la tête.
— Tu dois avoir de la fièvre, alors, maugréai-je.
J'étais transie. J'effleurai son front — il était incandescent.
— Nom d'un chien, Jake ! Tu es brûlant !
— Ah bon ? Je me porte comme un charme, pourtant.
Soucieuse, je tâtai une nouvelle fois son front. Sa peau irradiait.
— Tu as les doigts glacés ! se plaignit-il.
— Peut-être que c'est moi, en effet.
À l'arrière, Mike grogna avant de vomir dans son pot. Je serrai les dents en priant pour supporter le bruit et l'odeur. Anxieusement, Jacob vérifia par-dessus son épaule que sa voiture n'avait pas été profanée.
Le trajet me sembla plus long qu'à l'aller. Jacob se taisait, perdu dans ses pensées. Il n'avait pas ôté son bras de mes épaules, et il dégageait une telle chaleur que le vent froid en était agréable. De mon côté, j'avais les yeux rivés sur le pare-brise, accablée par la culpabilité. J'avais eu tort de l'encourager. Ça n'avait été rien que de l'égoïsme. Que j'aie tenté de clarifier ma position n'importait guère. S'il nourrissait un tant soit peu d'espoir que notre relation pût tourner à autre chose que de l'amitié, c'est que je n'avais pas été assez ferme. Mais comment lui expliquer de façon àce qu'il comprît ? J'étais une coquille creuse. À l'instar d'une maison vide, abandonnée, j'avais été inhabitable durant des mois. J'allais vaguement mieux, à présent — le salon était en meilleur état. Mais ça n'était que cela : une unique et toute petite pièce. Jacob méritait mieux qu'une masure délabrée à restaurer. Il aurait beau déployer des trésors d'énergie, il n'arriverait pas à me retaper. Pourtant, je savais que je ne le repousserais pas. J'avais trop besoin de lui ; j'étais intéressée. Si je me montrais plus explicite, il admettrait peut-être qu'il valait mieux m'oublier. L'idée déclencha mes frissons, et il resserra son étreinte.
Je reconduisis Mike chez lui avec sa Suburban, tandis que Jacob suivait pour me ramener ensuite. Sur le chemin du retour, il ne dit mot, et je me demandai s'il réfléchissait aux mêmes choses que moi. Peut-être était-il en train de changer d'avis.
— Vu qu'il est encore tôt, je m'inviterais bien un moment, murmura-t-il en se garant près de la Chevrolet, mais je crois que tu as raison. J'ai de la fièvre. Je me sens un peu... bizarre.
— Oh non ! Pas toi aussi ! Tu préfères que je te raccompagne ?
— Non. Je ne suis pas encore malade. Juste... dérangé. Si nécessaire, je m'arrêterai.
— Tu m'appelles dès que tu es chez toi, d'accord ?
— Oui, oui.
Il fronça les sourcils et se mordit les lèvres, les yeux perdus sur l'obscurité. J'ouvris ma portière et m'apprêtai à sortir, mais il attrapa doucement mon poignet. Une fois encore, je remarquai à quel point sa peau brûlait la mienne.
— Qu'y a-t-il, Jake ?
— Il faut que je te dise quelque chose, Bella. Sauf que j'ai peur que ça fasse un peu tarte.
J'étouffai un soupir. La scène qui s'était déroulée au cinéma allait recommencer.
— Vas-y.
— Bon... Voilà, je sais que tu es très malheureuse. Ça ne t'aidera pas beaucoup, sans doute, mais je voudrais que tu comprennes que je serai toujours là. Je ne te laisserai jamais tomber. Je te promets que tu pourras toujours compter sur moi. La vache, qu'est-ce que c'est nul ! Enfin, tu piges, quoi. Je ne te ferai jamais de mal.
— Je sais, Jacob. Et je compte déjà sur toi. Plus que tu le soupçonnes, d'ailleurs.
Un sourire fendit son visage comme le soleil incendie les nuages. Je me serais coupé la langue. Je n'avais rien proféré qui ne fût vrai. Or, j'aurais dû mentir. La vérité n'était pas bonne à dire. Elle risquait de le blesser. Parce que moi, je le laisserais tomber.
— Vaut mieux que je rentre, maintenant, marmonna-t-il avec une expression étrange.
Je m'extirpai rapidement de la voiture.
— Téléphone ! criai-je alors qu'il démarrait.
Je le regardai s'éloigner. Au moins, il paraissait en état de tenir un volant. Je restai à contempler la rue déserte, pas très en forme à mon tour, mais pas pour des raisons physiques.
Comme j'aurais aimé que Jacob Black fût mon frère, mon frère de sang. Ainsi, j'aurais bénéficié d'une revendication légitime à son égard sans pour autant m'attirer de blâme. Dieu m'était témoin que je n'avais jamais cherché à l'utiliser. Mais je ne pouvais m'empêcher d'interpréter mon sentiment de culpabilité comme une preuve du contraire. Plus encore, je n'avais pas cherché à m'en éprendre. Car, au plus profond de mon corps, dans la moelle de mes os, du sommet de ma tête à la plante de mes pieds, dans le trou de ma poitrine, j'étais certaine d'une chose — aimer donnait le pouvoir de briser l'autre.
Or, j'avais été cassée au-delà du réparable.
Pourtant, j'avais besoin de Jacob. Comme d'une drogue. Je m'étais servie de lui comme d'une béquille pendant trop longtemps, et je me retrouvais bien plus impliquée envers lui que je n'avais souhaité l'être avec quiconque. À présent, tout en ne supportant pas qu'il risque de souffrir, j'étais incapable d'éviter de le faire souffrir. Il croyait que le temps et la patience me changeraient ; j'avais beau savoir qu'il n'en serait rien, je l'autorisais à courir sa chance.
Il était mon meilleur ami, je l'aimerais toujours, ça ne suffirait jamais. Jamais.
J'entrai dans la maison et me postai près du téléphone en me rongeant les ongles.
— Le film est déjà terminé ? s'étonna Charlie en me voyant débarquer.
Il étais assis par terre, à quelques centimètres de la télévision. Sûrement un match passionnant.
— Mike est tombé malade, expliquai-je. Une espèce de gastro-entérite.
— Et toi, ça va ?
— Il me semble, répondis-je prudemment.
Après tout, j'avais été exposée à la contagion.
Je m'appuyai au plan de travail de la cuisine, à deux pas de l'appareil, et m'efforçai de prendre patience. Je repensai à la drôle d'expression qui avait traversé le visage de Jacob. Mes doigts se mirent à tambouriner sur le Formica. J'aurais dû insister pour le ramener. Les yeux rivés sur l'horloge, je comptai les minutes. Dix. Quinze. Même lorsque c'était moi qui conduisais, il ne fallait qu'un quart d'heure pour atteindre La Push. Or, Jacob roulait plus vite que moi. Dix-huit minute
s. Je m'emparai du combiné, composai son numéro. Ça sonna dans le vide. Billy dormait peut-être. Ou alors, je m'étais trompée. Je recommençai. À la huitième tonalité, alors que j'allais raccrocher, Billy répondit.
— Allô ?
Ses intonations étaient soucieuses, comme s'il avait craint de mauvaises nouvelles.
— Billy, c'est moi, Bella. Jake est-il arrivé ? Il est parti d'ici il y a une vingtaine de minutes.
— Il est ici, murmura-t-il d'une voix blanche.
— Il devait m'appeler, m'énervai-je. Il ne se sentait pas bien quand il m'a quittée, et je m'inquiétais.
— Il était... trop malade. Il ne va pas bien du tout.
Billy était distant, et je devinai qu'il lui tardait d'être auprès de son fils.
— N'hésitez pas si vous avez besoin d'aide, proposai-je en songeant à Billy, coincé sur son fauteuil. Je peux passer...
— Non, non, s'empressa-t-il de refuser. On va se débrouiller. Reste chez toi.
Sa façon de le dire me parut presque impolie.
— Comme vous voudrez.
— Au revoir, Bella.
Il raccrocha.
— Au revoir, bougonnai-je.
Enfin, il était à la maison, c'était déjà ça. Bizarrement, je n'en étais pas pour autant soulagée. Je grimpai lourdement l'escalier, mal à l'aise. Je ferais peut-être un saut le lendemain avant d'aller travailler pour vérifier son état. Je pourrais lui apporter une soupe — nous en avions une boîte quelque part.
Mes plans tombèrent cependant à l'eau quand, dans la nuit, je me réveillai. Il était quatre heures trente. Je fonçai à la salle de bains, où Charlie me découvrit une demi-heure plus tard, la joue appuyée contre le carrelage frais de la baignoire. Il m'observa un long moment.
— Gastro, finit-il par énoncer.
— Oui, gémis-je.
— Il te faut quelque chose ?
— Appelle les Newton de ma part, murmurai-je d'une voix rauque. Dis-leur que j'ai attrapé la même chose que Mike, et que je ne pourrai pas venir aujourd'hui. Et que je m'excuse.
— Pas de souci.
Je passai le reste de la journée sur le sol de la salle de bains. Je dormis quelques heures, la tête posée sur une serviette froissée. Charlie annonça qu'il avait du boulot (en réalité il avait sûrement envie d'accéder à des toilettes), déposa un verre d'eau près de moi, afin que je me réhydrate, et fila. À son retour, il me réveilla. Je vis que ma chambre était plongée dans l'obscurité — la nuit était tombée. Charlie monta s'enquérir de mon état.
— Toujours vivante ?
— En quelque sorte.
— Tu as envie de quelque chose ?
— Non merci.
Il hésita, visiblement pas dans son élément.
— Bien, soupira-t-il avant de redescendre à la cuisine.
Quelques minutes plus tard, le téléphone sonna. Charlie eut une courte conversation à voix basse avant de raccrocher.
— Mike va mieux ! me lança-t-il.
Voilà qui était encourageant. Il avait été atteint environ huit heures avant moi. Plus trop de temps à tenir, donc. L'estomac retourné, je me redressai pour vomir dans les toilettes.
Je me rendormis sur ma serviette mais, quand je me réveillai, j'étais dans mon lit, et de la lumière filtrait par la fenêtre. Je ne me rappelais pas avoir bougé ; Charlie avait dû me porter jusqu'ici. Il avait également posé un verre d'eau sur la table de nuit. Mourant de soif, je l'avalai d'un trait, bien que le liquide eût une saveur désagréable après avoir stagné toute la nuit.
Je me levai prudemment, histoire de ne pas déclencher de nouvelles nausées. J'étais faiblarde et j'avais un goût atroce dans la bouche — sinon, ça allait. Je consultai ma montre. Mes vingt-quatre heures s'étaient écoulées. Je ne tentai pas le diable et restreignis mon petit déjeuner à des biscuits secs. Charlie était apparemment soulagé que je sois rétablie.
Une fois sûre que je n'aurais pas à passer la journée dans la salle de bains, je téléphonai à Jacob. Ce fut lui qui répondit. Rien qu'au son de sa voix, je devinai qu'il n'était pas tiré d'affaire.
— Allô ? grogna-t-il.
— Oh, Jake ! Tu as l'air d'aller super-mal.
— Je suis super-mal.
— Désolée de t'avoir obligé à sortir avec moi. C'est nul.
— Ça m'a fait plaisir d'être venu. Ne t'en veux pas, tu n'y es pour rien.
— Tu vas guérir très vite. Moi, c'était fini ce matin.
— Tu as été malade aussi ? demanda-t-il, à peine audible.
— Oui, mais ça va maintenant.
— Tant mieux.
— Je pense que, d'ici quelques heures, tu seras beaucoup mieux, l'encourageai-je.
— Je crois que je n'ai pas la même chose que toi.
Sa voix était si faible, à présent, que j'eus des difficultés à le comprendre.
— Ce n'est pas une grippe intestinale ? m'étonnai-je.
— Non.
— C'est quoi, alors ?
— Tout, chuchota-t-il. J'ai mal partout.
Ses intonations rendaient sa souffrance presque tangible.
— Qu'est-ce que je peux faire, Jake ? Que veux-tu que je t'apporte ?
— Rien. Ne viens pas.
Cette réponse abrupte me rappela ma conversation avec Billy.
— J'ai déjà été exposée, objectai-je.
Il m'ignora.
— Je te téléphonerai quand je serai en état. Je te dirai quand passer.
— Jacob...
— Il faut que je te laisse.
— N'oublie pas de me recontacter.
— C'est ça.
Je perçus une espèce d'amertume dans cette réplique. Le silence s'installa, chacun attendant que l'autre termine la discussion.
— À bientôt, finis-je par marmonner.
— Attends que je t'appelle, répéta-t-il.
— D'accord... Salut, Jacob.
— Bella..., murmura-t-il.
Il raccrocha.
10
LA CLAIRIÈRE
Jacob ne rappela pas.
À mon premier coup de fil, Billy décrocha et me dit que son fils était encore alité. J'insistai, m'assurai qu'il l'avait conduit chez un médecin. Malgré ses allégations, et pour une raison qui m'échappait, je ne le crus pas. Le lendemain et le surlendemain, je téléphonai de nouveau, plusieurs fois par jour — personne.
Le samedi, je décidai de me passer d'invitation et d'y aller. La petite maison rouge était vide. Cela m'effraya. Jacob était-il si malade qu'il avait fallu le transporter à l'hôpital ? Je m'y arrêtais en rentrant chez moi mais, à l'accueil, l'infirmière m'assura que ni Jacob ni Billy n'y avaient mis les pieds.
J'obligeai Charlie à contacter Harry Clearwater dès qu'il rentra du travail. J'attendis, anxieuse, tandis qu'il bavardait avec son vieil ami. Il me sembla que la conversation s'éternisait, sans même qu'il fût question de Jacob. Apparemment, c'était Harry qui avait été hospitalisé, afin de subir des tests pour le cœur. À la nouvelle, Charlie fronça les sourcils, mais l'autre réussit à le rassurer à force de plaisanteries, et mon père finit par se remettre à rire. Ce n'est qu'alors qu'il demanda après Jacob. Ses répliques, des « mouais » et des « ah » pour l'essentiel, ne me renseignèrent guère sur la conversation, et il dut poser sa main sur la mienne pour que mes doigts cessent de jouer du tambour sur le plan de travail.
Enfin, il termina son appel et se tourna vers moi.
— D'après Harry, les lignes étaient en dérangement. Voilà pourquoi tu n'as pas pu les joindre. Billy a emmené Jake chez le docteur, ce serait une mononucléose. Il est très fatigué ; Billy interdit toute visite.
— Comment ça ?
— S'il te plaît, Bella, évite de les embêter, me morigéna-t-il. Billy sait s'occuper de son fils. Ce dernier ne tardera pas à se remettre. Sois patiente.
Je laissai tomber. Charlie était trop soucieux au sujet de Harry ; il était clair que mes problèmes importaient moins que celui-là. Je montai donc dans m
a chambre, allumai l'ordinateur et dénichai un site consacré à la mononucléose dans le moteur de recherche.
Mes connaissances sur la maladie se limitaient à ce qu'on était censé l'attraper par les baisers ce qui, visiblement, n'était pas le cas de Jacob. Je parcourus rapidement la description des symptômes — il avait de la fièvre, certes, mais pour le reste... Pas de maux de gorge intenables, pas d'épuisement, pas de névralgies, en tout cas rien de tout cela avant qu'il soit rentré du cinéma. Il avait affirmé se porter comme un charme. Les signes de l'infection pouvaient-ils se développer aussi rapidement ? Le site assurait que les différentes douleurs apparaissaient en premier... Je m'interrompis, contemplai l'écran de l'ordinateur en me demandant pourquoi j'agissais ainsi et pourquoi j'étais aussi suspicieuse, à croire que je doutais de l'histoire servie par Billy. Pour quelle raison aurait-il menti à Harry ? Je n'étais qu'une sotte. Je m'angoissais et, pour être honnête, la perspective d'être privée de Jacob me rendait nerveuse. Je lus le reste de l'article en diagonale, traquant d'autres informations. Je m'arrêtai en apprenant qu'une mononucléose pouvait durer plus d'un mois.
De quoi Billy avait-il peur ? Le site stipulait que le malade devait éviter les efforts physiques, en aucun cas il ne recommandait de supprimer les visites. Les risques de contagion étaient minimes. J'allais donner une semaine à Billy avant de me manifester. C'était un délai on ne peut plus généreux.
Huit jours, ce fut long. Dès le mercredi, je fus persuadée que je ne tiendrais pas jusqu'au samedi. Quand j'avais décidé de laisser les Black tranquilles, je m'étais dit que Jacob ne tolérerait pas très longtemps les règles imposées par son père. Chaque jour, au retour du lycée, je vérifiai le répondeur téléphonique en quête d'un message. Il n'y en eut aucun. Trois fois, je trichai et tentai d'appeler. Les lignes ne fonctionnaient toujours pas.
Je traînai à la maison, beaucoup trop à mon goût, et trop seule aussi. Sans Jacob, sans mon adrénaline, sans mes distractions, tout ce que j'avais réprimé se réveilla lentement. De nouveau, les rêves furent pénibles. Je n'en voyais plus venir la fin. Ne restait que l'atroce vacuité, la plupart du temps en forêt, le reste au milieu de la mer de fougères vide où la villa blanche n'existait plus. Parfois, Sam Uley apparaissait dans les bois et m'observait. Je l'ignorais, sa présence n'étant d'aucun réconfort et ne comblant en rien ma solitude. Elle n'empêchait pas non plus que je reprenne conscience en criant, nuit après nuit. Le trou dans ma poitrine était pire que jamais. J'avais cru le contrôler, mais je me surpris à me plier en deux un peu plus chaque jour, à me serrer les côtes et à haleter, comme privée d'air.
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