LE GRAND VOYAGE

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LE GRAND VOYAGE Page 68

by Jean M. Auel


  Il dévisageait Ayla intensément, comme s’il voulait la persuader par la seule force de son regard. Finalement, il y renonça, sachant que sa décision était prise et qu’il serait à ses côtés pour l’aider. Au plus profond de son cœur, il avait envie de sauver ses nouveaux amis, mais il devait d’abord se convaincre qu’il ne pouvait pas empêcher Ayla de rester. Il se jura de ne laisser personne lui faire de mal.

  — Très bien, concéda-t-il. J’avais dit aux hommes que tu ne tolérerais jamais qu’on traite quiconque de la sorte, mais je ne pense pas qu’ils m’aient cru. Nous aurons besoin d’aide pour les sortir de l’Enclos. J’avoue que l’invitation de S’Armuna m’a surpris. Ce ne doit pas être dans ses habitudes. Son foyer est petit et à l’écart des autres, il n’est pas prévu pour recevoir des hôtes. Qu’est-ce qui te fait croire qu’elle souhaite notre retour ?

  — Parce qu’elle a interrompu Attaroa pour nous inviter, et que la Femme Qui Ordonne en a été contrariée. Est-ce que tu fais confiance à S’Armuna ?

  Jondalar réfléchit.

  — Je me le demande. J’ai plus confiance en elle qu’en Attaroa, mais ça ne veut rien dire. Sais-tu que S’Armuna a connu ma mère ? Elle a vécu dans la Neuvième Caverne quand elle était jeune, et elle était amie avec Marthona.

  — Ah, c’est donc pour cela qu’elle parle si bien ta langue ! Mais si elle connaissait ta mère, pourquoi n’a-t-elle rien fait pour toi ?

  — Je me suis posé la question. Peut-être ne le voulait-elle pas. Je pense qu’il s’est passé quelque chose entre ma mère et elle. Je ne me souviens pas que Marthona m’ait parlé de quelqu’un qui serait venu vivre avec eux dans sa jeunesse. J’ai mon idée sur S’Armuna. Elle a soigné ma blessure, et bien qu’elle ne se soit jamais donné cette peine pour d’autres, j’ai le sentiment qu’elle est prête à en faire davantage. Mais Attaroa ne le permettra jamais.

  Ils déchargèrent Rapide et installèrent leur campement, aussi peu tranquilles l’un que l’autre. Jondalar alluma le feu pendant qu’Ayla préparait le dîner. Jondalar devait être affamé après son séjour dans l’Enclos, et elle décida d’augmenter les portions. Dès qu’il aurait avalé quelques bouchées, l’appétit lui reviendrait.

  Jondalar s’accroupit près du feu et contempla la femme qu’il chérissait. Puis il s’approcha d’elle.

  — Femme, avant que tu ne sois trop occupée, dit-il en l’enlaçant, j’ai salué un cheval et un loup, mais je n’ai pas encore salué comme elle le mérite celle qui compte le plus pour moi.

  Ayla lui sourit avec amour.

  — Je ne suis jamais trop occupée pour toi, affirma-t-elle.

  Il se pencha pour baiser ses lèvres, d’abord doucement, puis le souvenir des jours passés à craindre de l’avoir perdue lui revint.

  — J’ai cru ne jamais te revoir, avoua-t-il dans un sanglot en la serrant contre son cœur. J’ai cru que tu étais morte. Aucun des supplices d’Attaroa n’aurait pu être pire que de te savoir morte.

  Il la serra à l’étouffer, elle ne chercha pas à se dégager. Il baisa sa bouche, son cou et ses mains retrouvèrent vite les moindres détails de son corps qu’elles connaissaient si bien.

  — Jondalar, je suis sûre qu’Epadoa est sur nos traces... Le souffle court, il relâcha son étreinte.

  — Tu as raison, ce n’est pas le moment. Si les Louves nous surprenaient, nous ferions une proie facile.

  Il se reprochait son abandon et voulut se justifier.

  — C’est que... tu comprends, j’ai eu si peur de te perdre. D’être ici avec toi, c’est... c’est comme un Don de la Mère, et... et j’ai eu envie de L’honorer tout de suite.

  Ayla se serra contre lui, cherchant à lui signifier qu’elle ressentait le même désir. Elle nota qu’il n’avait jamais éprouvé le besoin de justifier son désir auparavant. Mais elle ne voulait pas d’explication. Elle aussi luttait pour ne pas se laisser aller à oublier le danger qui les guettait.

  — Jondalar... murmura-t-elle, vaincue par le désir. Après tout, nous avons beaucoup d’avance sur Epadoa, il lui faudra du temps pour nous retrouver... et Loup nous préviendra...

  Jondalar la regarda, saisissant peu à peu l’invitation. Son visage soucieux se détendit et ses yeux bleus brillèrent de désir.

  — Ayla, tu es ma femme, ma femme merveilleuse que j’aime tant ! murmura-t-il d’une voix rauque.

  Aussi brefs que furent leurs ébats, l’intensité en avait été telle qu’il fallut du temps à Ayla pour s’en remettre. Lorsque Jondalar, craignant de l’écraser sous le poids de son corps, se dégagea et roula sur le côté, elle ressentit un inexplicable sentiment de perte, et regretta qu’ils ne pussent rester ainsi soudés l’un à l’autre. D’une certaine manière, il la complétait, et la vive conscience d’avoir failli le perdre, sa douloureuse absence, l’envahirent d’une émotion si poignante que ses yeux s’emplirent de larmes.

  Jondalar vit une perle transparente surgir au coin de l’œil d’Ayla, et couler le long de sa joue dans l’oreille. Il s’accouda et observa la jeune femme.

  — Que se passe-t-il, Ayla ? s’inquiéta-t-il.

  — Rien, je suis heureuse d’être avec toi, assura-t-elle alors qu’une autre larme perlait sous sa paupière.

  Jondalar effleura la goutte du bout du doigt et goûta le liquide salé.

  — Si tu es heureuse, pourquoi pleures-tu ? demanda-t-il, bien qu’il devinât la réponse.

  Incapable d’articuler un mot, elle secoua la tête en silence. Il constata en souriant qu’elle partageait son bonheur d’être ensemble de nouveau. Il se pencha pour déposer un baiser sur ses yeux gonflés, sur sa joue, sur sa bouche.

  — Je t’aime, moi aussi, murmura-t-il à son oreille.

  Une légère secousse souleva sa verge, et il regretta de ne pouvoir recommencer une deuxième fois, mais Epadoa était sur leurs traces, et elle ne tarderait pas à les retrouver.

  — Il y a un cours d’eau tout près d’ici, déclara Ayla. J’ai besoin de me laver. J’en profiterai pour remplir les outres.

  — Veux-tu que je t’accompagne ? proposa l’homme, à la fois pour rester encore avec elle, mais aussi pour la protéger.

  Ils ramassèrent leurs habits et leurs bottes, prirent les outres, et marchèrent jusqu’à un ruisseau assez large, où un mince filet d’eau avait échappé à l’étreinte de la glace. Le contact de l’eau gelée fit frissonner Jondalar qui ne se serait jamais lavé dans un froid pareil si Ayla n’avait pas été là. Quelle que fût la température de l’eau, elle éprouvait toujours le besoin de se laver après avoir partagé les Plaisirs. Il n’ignorait pas que cela faisait partie des rituels du Clan que sa mère adoptive lui avait enseignés, même si Ayla invoquait maintenant plus volontiers la Mère en marmonnant des phrases en mamutoï.

  Ils remplirent les outres, et en rentrant au campement, Ayla se souvint de la scène qu’elle avait surprise juste avant qu’on ne coupât les lanières de vêtements de Jondalar.

  — Pourquoi as-tu refusé de t’accoupler avec Attaroa ? demanda-t-elle alors. Tu as blessé sa fierté devant tout son peuple.

  — J’ai ma fierté, moi aussi. Personne ne m’obligera à partager le Don de la Mère. Et d’ailleurs, ça n’aurait rien changé. Elle avait déjà l’intention de me transformer en cible avant mon refus, j’en suis sûr. Mais je crois que c’est toi qui devrais te méfier. « Discourtoise et inhospitalière »... pouffa-t-il, avant de redevenir plus sérieux. Elle te hait. Si elle en a l’occasion, elle nous tuera tous les deux.

  30

  Cette nuit-là, Ayla et Jondalar ne dormirent que d’un œil, prêts à se relever au moindre bruit. Ils avaient attaché les chevaux à proximité et Ayla garda Loup près d’elle, sachant qu’il la préviendrait à la première alerte. Mais son sommeil fut peuplé de rêves menaçants, chaotiques et sans avertissement ni message clair. Loup revenait dans chacun d’eux.

  Elle se réveilla avec les premières lueurs du jour qui filtraient à travers les branches dénudées des saules et des bouleaux. Il faisait encore sombre dans le vallon encais
sé, mais peu à peu l’aube naissante lui permit de distinguer les aiguilles épaisses des épicéas et celles plus longues des pins de pierre. Une neige poudreuse était tombée pendant la nuit, recouvrant les résineux, les broussailles, l’herbe et les fourrures de couchage d’une fine pellicule blanche. Ayla était bien au chaud dans la fourrure.

  Elle avait presque oublié le plaisir de sentir Jondalar dormir à ses côtés, et elle traîna encore un peu dans sa couche pour profiter de sa présence. Mais ses pensées la tourmentaient. Il fallait qu’elle s’occupe de ce qu’elle apporterait à la fête. Lorsqu’elle voulut se glisser hors de la fourrure, elle sentit le bras de Jondalar la retenir.

  — Pourquoi te lever si tôt ? demanda-t-il en picorant son cou de baisers légers. Il y a si longtemps que je ne t’ai pas eue près de moi, je ne veux pas que tu partes.

  — Je n’ai pas envie de me lever, dit-elle en se pelotonnant contre lui. Il fait froid et j’aimerais mieux rester dans les fourrures avec toi, mais je dois préparer les mets que nous apporterons à la fête d’Attaroa, et aussi ton repas du matin. Tu n’as pas faim ?

  — Si, maintenant que tu en parles, je pourrais manger un cheval entier, proclama-t-il l’œil rivé sur Whinney et Rapide.

  — Oh, Jondalar ! s’exclama Ayla, choquée.

  — Non, pas un des nôtres, rassure-toi. Tu sais, je ne mangeais que ça dernièrement... quand je mangeais. Il fallait que je sois affamé pour pouvoir avaler de la viande de cheval. Quand on a faim, on dévorerait n’importe quoi, et il n’y a aucun mal à ça.

  — Je sais, mais tu n’as plus besoin d’en manger, maintenant.

  Ils restèrent quelques instants blottis l’un contre l’autre. Puis, Ayla rejeta les fourrures et se leva.

  — Le feu s’est éteint, annonça-t-elle. Si tu le rallumes, je préparerai notre infusion. Nous aurons besoin d’un bon feu aujourd’hui, et de beaucoup de bois.

  La veille, pour leur repas, Ayla avait confectionné une soupe épaisse avec de la viande de bison et des racines séchées, en y ajoutant quelques pignons, mais Jondalar n’avait pas réussi à tout manger. Après avoir mis le reste de côté, elle avait pris un plein panier de petites pommes, à peine plus grosses que des cerises, qu’elle avait cueillies en pistant Jondalar. Les pommes gelées se balançaient aux branches dénudées d’un arbre nain sur le versant sud d’une colline. Elle avait coupé les petites pommes durcies en deux, les avait épépinées et bouillies avec des gratte-culs, et avait laissé reposer le mélange près du feu pendant la nuit. Au petit matin, le liquide refroidi et épaissi par la pectine naturelle avait pris la consistance de la gelée, parsemée de petits morceaux de pommes caoutchouteux.

  Avant de préparer l’infusion matinale, Ayla ajouta un peu d’eau dans le restant de soupe, mit des pierres à chauffer pour cuire leur repas et goûta la gelée de pommes. Le gel avait estompé l’acidité aigrelette des petites pommes et l’ajout de gratte-culs avait donné au mélange une coloration rougeâtre et une douce saveur piquante. Elle en servit un bol à Jondalar pour accompagner sa soupe.

  — Je n’ai jamais rien mangé d’aussi bon ! s’exclama-t-il après la première bouchée. Qu’est-ce qui donne tant de goût ?

  — La faim.

  — Oui, tu as sans doute raison, marmonna-t-il la bouche pleine. J’ai de la peine pour ceux qui sont restés dans l’Enclos.

  — Personne ne devrait avoir faim quand la nourriture abonde, s’enflamma Ayla. En temps de disette, c’est différent.

  — Ça arrive parfois à la fin d’un hiver particulièrement rigoureux. As-tu déjà souffert de la faim ?

  — Il m’est arrivé de sauter quelques repas, mais quand on sait chercher, on trouve de quoi manger... à condition d’être libre de ses mouvements.

  — J’ai vu des gens mourir de faim parce qu’ils n’avaient plus de provisions et ne savaient pas où s’en procurer d’autres. Mais toi, tu sais toujours. Comment peux-tu savoir tant de choses ?

  — C’est Iza qui me les a apprises, mais tout ce qui pousse m’a toujours intéressée. Je crois qu’avant d’être recueillie par Iza je suis presque morte de faim. Mais j’étais trop petite et je ne me souviens plus très bien. Iza disait qu’elle n’avait jamais connu personne qui apprenait aussi vite où trouver à manger, ajouta-t-elle avec un sourire ému. Surtout quand on considère que je n’étais pas née avec la mémoire du Clan. Elle prétendait que c’était la faim qui m’avait appris.

  Après avoir dévoré une deuxième portion de nourriture, Jondalar regarda Ayla trier soigneusement ses réserves de provisions et commencer les préparatifs du mets qu’elle souhaitait cuisiner pour la fête. Elle s’était longuement demandée dans quel récipient elle pourrait faire cuire une quantité suffisante d’ingrédients pour le Camp des S’Armunaï tout entier. En effet, ils avaient laissé le plus gros de leur matériel dans la cachette, au milieu des épineux, et n’avaient emporté que l’essentiel.

  Elle répartit le contenu de leur outre la plus grosse dans divers bols et récipients, et sépara ensuite la poche de la peau de bête qui la recouvrait, et qui avait été cousue avec la fourrure à l’intérieur. La poche elle-même provenait d’un estomac d’aurochs et n’était pas totalement étanche, mais ne suintait que très peu. Les poils de la peau absorbaient l’humidité, ce qui laissait l’extérieur relativement sec. Elle fendit le haut de la poche et la fixa sur un cadre de bois avec les tendons qu’elle conservait avec ses outils à couture. Elle remplit d’eau le récipient ainsi obtenu et attendit qu’une fine pellicule d’humidité apparût à la surface.

  Le grand feu que Jondalar avait allumé plus tôt avait donné suffisamment de braises incandescentes pour qu’elle pût déposer son nouveau récipient directement dessus, gardant de l’eau à portée de la main pour compenser la perte de liquide due à l’évaporation. En attendant que l’eau bouille, Ayla commença à tisser un panier avec des rameaux de saule et des tiges d’herbe que la neige avait ramollies.

  Lorsque l’eau parvint à ébullition, Ayla y émietta de la viande maigre séchée et des galettes riches en graisse. Elle ajouta dans le bouillon un mélange de céréales. Elle comptait l’enrichir de racines séchées carottes sauvages, arachides – ainsi que de cosses de légumineuses, de groseilles et d’airelles séchées. Elle l’épiça ensuite avec un choix d’herbes, pas-d’âne, ail des ours, basilic, oseille, reine des prés, et ajouta une pincée du précieux sel qu’elle avait réussi à garder depuis la Réunion d’Été des Mamutoï, à l’insu de Jondalar.

  Jondalar s’activait autour du campement. Il ramassait du bois, allait chercher de l’eau, cueillait des herbes et coupait des rameaux de saule pour les paniers qu’Ayla tressait. Il était si heureux d’être avec elle qu’il ne pouvait la quitter des yeux, et Ayla était heureuse de le sentir près d’elle. Mais lorsqu’il remarqua la quantité de nourriture qu’elle puisait dans leur réserve, il commença à s’inquiéter. Le jeûne forcé qu’il venait de subir avait aiguisé son angoisse de la disette.

  — Ayla, tu te rends compte de tout ce que tu as utilisé ? Si tu continues, nous allons manquer de vivres !

  — Je veux que tout le Camp d’Attaroa ait à manger, hommes et femmes. Qu’ils sachent les réserves qu’ils pourraient avoir s’ils travaillaient ensemble.

  — Dans ce cas, je prends mon propulseur et je vais voir si je trouve de la viande, déclara-t-il.

  Elle lui jeta un coup d’œil surpris. Jusqu’à présent, ils avaient surtout vécu sur la nourriture qu’ils glanaient en route, et quand ils piochaient dans leurs réserves, c’était davantage par commodité que par nécessité. En outre, la plus grosse partie des vivres était restée avec la tente, près de la rivière. Elle l’observa attentivement, et s’aperçut seulement à quel point il avait maigri. Elle commença à cerner l’explication de son comportement inhabituel.

  — C’est une excellente idée, approuva-t-elle. Emmène donc Loup avec toi. Il t’aidera à débusquer le gibier, et il te préviendra s’il renifle une présence humaine. Je suis certaine qu’Epadoa et les Louves d’Attaroa
nous recherchent.

  — Si Loup m’accompagne, qui t’avertira ?

  — Whinney. Elle sent quand un étranger approche. Ne t’absente pas trop longtemps, j’aimerais partir dès que le mets sera prêt.

  — Ce sera long ? demanda-t-il d’un air tourmenté.

  — Non, je ne crois pas. Mais je n’ai pas l’habitude de cuisiner pour autant de personnes, alors je ne sais pas exactement.

  — Bon, il vaut mieux que j’attende. Je chasserai plus tard.

  — Comme tu voudras. Si tu restes ici, pourrais-tu me rapporter encore du bois ?

  — J’y vais. Et ensuite j’emballerai le matériel pour que nous puissions partir dès que tu auras terminé.

  Le mets fut plus long à préparer qu’Ayla ne l’avait pensé et, vers le milieu de la matinée, Jondalar partit finalement avec Loup en reconnaissance, davantage soucieux de s’assurer qu’Epadoa n’était pas dans les parages que de tuer du gibier. Loup le suivit avec un tel empressement... après avoir reçu l’autorisation d’Ayla, que Jondalar s’en étonna. Il avait toujours considéré l’animal comme appartenant à Ayla, et ne pensait jamais à l’emmener avec lui. Loup s’avéra un bon compagnon et leva effectivement un lapin que Jondalar décida de lui abandonner.

  A son retour, Ayla lui offrit une copieuse portion du délicieux brouet qu’elle avait cuisiné pour le Camp. D’habitude, ils ne prenaient jamais plus de deux repas par jour, mais dès qu’il sentit le fumet appétissant, il se rendit compte qu’il avait encore faim. Ayla se servit une petite part et en donna aussi à Loup.

  A la mi-journée, ils purent enfin se mettre en route. Pendant la cuisson de son plat, Ayla avait tressé deux paniers en forme de bol, profonds et de bonne taille, l’un plus grand que l’autre. Elle avait rempli les deux récipients du brouet riche et épais, et y avait même ajouté des pignons du pin de pierre. Elle savait qu’après leur régime à base de viande maigre, ceux du Camp apprécieraient un repas riche en huile et en graisse. Elle pressentait aussi, sans en connaître les explications diététiques, que cette nourriture était la plus appropriée en hiver, pour la chaleur et l’énergie qu’elle permettait d’emmagasiner. Elle avait enrichi son brouet de céréales pour que tous fussent rassasiés et satisfaits.

 

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