COMMENT JE SUIS DEVENUE IRRESISTIBLE

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COMMENT JE SUIS DEVENUE IRRESISTIBLE Page 10

by KLASKY


  Montrose s’exécute et s’assied près de moi avec son autorité naturelle. Melissa est obligée de s’installer sur l’autre canapé avec Neko qui nous a rejoints une fois son verre plein. Montrose attend que tout le monde soit attentif pour se tourner vers moi.

  — Il faut que cela cesse.

  On ne discute pas ! Je retiens un fou rire de protestation qui remonte du fond de ma gorge, en plus du petit goût de citron.

  — Vous ne comprenez pas la puissance de la sorcellerie. Les énergies que vous avez libérées dans la maison ce soir ont été ressenties à des kilomètres…

  — Ressenties…

  Mon estomac fait un saut périlleux.

  — … par les gardiens et les autres sorcières. Et par les créatures qui sont à leur recherche.

  Montrose fait un signe vers la porte et les jardins coloniaux plongés dans l’obscurité qui entourent ma maison.

  Je lève le menton d’un air de défi tout en me frottant les bras pour faire disparaître la chair de poule.

  — Vous essayez juste de me faire peur !

  — J’espère que j’ai réussi.

  Montrose prend mon verre et le pose sur la table. Une partie de mon cerveau note que sa main est plus chaude que je ne l’aurais cru. Et aussi que ses doigts sont plus doux. Compte tenu du ton sur lequel il vient de nous parler, je m’attendais à ce que sa peau soit rugueuse. Je note aussi qu’il prend bien soin de placer le verre sur un dessous-de-verre gris ardoise, pour protéger ma table basse d’éventuelles traces.

  — Ecoutez, nous pouvons mettre fin à ceci immédiatement. Les Pactes accordent la priorité aux sorcières qui ont tout le matériel entre les mains : les livres, les runes et les cristaux. Mais attention, vous ne devez pas abuser de ce privilège. Si vous le souhaitez, vous pouvez tout remettre en place dans votre cave.

  — Les remettre en place ?

  Ces mots sonnent faux, même en les prononçant à haute voix.

  — L'Assemblée des Sorcières accepterait cette restitution avec joie. Il est d’ailleurs probable qu’elles ne vous considéreront même pas comme propriétaire de ces objets, mais les choses avancent lentement au Tribunal d’Hécate.

  Le Tribunal d’Hécate. On croirait qu’il s’agit d’un tribunal chargé d’arbitrer les conflits mineurs ou les accidents de la circulation. Je me mets à rire, un peu mal à l’aise, bouleversée par l’étrangeté de toute cette histoire.

  — Jane, je suis sérieux.

  Jane. Il m’a appelée par mon nom.

  Brusquement, je regarde d’un autre œil David Montrose, le gardien d’Hécate. Ce n’est pas un tyran venu chez moi pour me punir d’avoir tripoté les jouets de quelqu’un d’autre. Non, il est venu pour me protéger et m’apprendre ce que j'ignore encore. C'est un gentil...

  Neko gâche tout en ricanant. Montrose lui lance un œil noir.

  — Vous pouvez rire à votre guise. Mais irez-vous rendre des comptes au Tribunal d’Hécate lorsque la querelle de propriété sera à l’ordre du jour ?

  Très gêné, Neko finit par détourner le regard. Ce Montrose, impossible de lui faire baisser les yeux! Des yeux bruns chocolat, avec des petites taches vertes qui donnent de la profondeur à son regard. Je prends soudain conscience qu’il a des petits plis autour des yeux et des rides près de la bouche. Il a le menton légèrement fendu au milieu (difficile dans son cas de parler de fesses d’ange !). Tous ces petits défauts sont sans doute là pour éviter que son visage ne soit trop parfait. Je constate qu’il s’est rasé ce matin, mais sa peau laisse apparaître l’ombre d’une barbe naissante.

  L'espace d’un instant, je l’imagine en train de m’embrasser. Je ressens presque le contact de cette barbe sur ma joue et la douceur de ses lèvres. J’imagine ses mains, si merveilleusement chaudes et douces, courir sur mon bras. Je sens sa paume accueillir ma nuque tandis qu’il m’attire à lui. J’imagine mes doigts se mêler à ses cheveux, jouer avec ses boucles…

  — Bon !

  A peine Montrose a-t-il prononcé ce mot que le charme est rompu. Je me retrouve dans mon salon, assise le dos bien droit sur mon canapé. Je contemple le verre de mojito sur la table en me demandant à quel stade d’ébriété je me trouve. Après tout, je ne connais absolument rien de Montrose, pas comme Jason Templeton, en tout cas. Comment puis-je laisser ce gardien supplanter mon Petit Ami Virtuel, ne serait-ce que dans mes pensées ?

  Attendez! Personne ne remplace personne! Montrose est venu ici en qualité de gardien. Il est ici pour guider mes pas dans l’art de la magie, pour s’assurer que je ne briserai pas quelques bizarres lois astrales, pour m’aider à conserver toutes ces choses étranges qui, semble-t-il, sont devenues ma propriété. Et si j’ai l’impression d’être attirée par lui, c’est sans doute à cause de cette vieille habitude que j’ai de craquer pour les hommes de pouvoir. Mon premier béguin, c’était mon prof de sciences sociales du CM1, M. Solomon. Et j’ai carrément craqué pour mon professeur de littérature en première année de fac. Puis je suis tombée raide dingue de mon premier patron dans une boîte où j’avais déniché un petit boulot d’été, à la bibliothèque publique de Springfield.

  Oh là là, je l’ai échappé belle ! Toute ma carrière de sorcière peut être remise en question si je ne m’interdis pas d’avoir un faible pour mon gardien.

  Mon gardien ? Ma carrière de sorcière ? Non, mais, tu t’entends ?

  Apparemment, j’ai pris ma décision. Je vais m’initier à tous ces trucs de sorcières, découvrir quels sont mes pouvoirs et trouver comment les utiliser.

  Je demande :

  — Bien, on fait quoi, maintenant ?

  Je vois Melissa se pencher vers moi. Je la connais assez pour lire sur son visage : elle nage en pleine confusion. Il faut dire qu’elle ne peut pas connaître toutes les pensées qui viennent de me traverser l’esprit. Et puis il faut croire que j’ai moi-même l’air assez ahuri.

  Neko, lui, fait des sauts de carpe sur mon canapé. On dirait un petit garçon à qui l’on vient d’annoncer qu’on fêtera son anniversaire, le 4 Juillet et Noël le même jour !

  Il s’exclame :

  — Oui, c’est ça ! Nous allons nous amuser comme des fous.

  Melissa est de plus en plus larguée.

  — Comment ça ? Que se passe-t-il ?

  David la regarde, puis pose de nouveau les yeux sur moi.

  — Vous préférez lui en parler ou me laisser faire ?

  J’ai du mal à avaler ma salive. Je répète la phrase dans ma tête avant de dire à haute voix :

  — Je veux en savoir plus. Je veux apprendre à être une sorcière.

  Satisfait, David hoche la tête tandis que Melissa s’abstient de poser la douzaine de questions qui lui viennent spontanément à l’esprit.

  — Commençons par le commencement. Règle n° 1 : pas d’alcool.

  — Vous voulez dire, pour ce soir ?

  — Jamais plus d’alcool.

  Melissa éclate de rire.

  — Alors ça, ça m’étonnerait beaucoup !

  Je la foudroie du regard. Je ne suis quand même pas une pocharde. J’ai toujours su précisément la quantité exacte que je buvais, et c’est toujours en toute connaissance de cause que je passe au verre suivant. Je jette un coup d’œil en direction de la cuisine par-dessus l’épaule de ma copine. Je vois la bouteille de rhum vide, la baguette magique posée sur la table de travail. Bon… disons qu’il m’arrive de déroger à ma règle. Par exemple, quand mon démon familier force un peu la dose.

  David décrète d’une voix calme :

  — Il le faudra bien si elle veut en apprendre davantage.

  Soudain, je comprends qu’à ce stade, il est important pour moi de présenter mes propres revendications. J’ai quand même passé huit années avec Scott, à l’écouter me dire ce que je devais faire et quand je devais le faire. Je ne vais pas laisser un autre homme, un inconnu qui plus est, prendre en charge ma vie sans me rebeller. Même s’il en connaît bien plus que moi en matière de sorcellerie.

  — Je ne boirai pas quand je
travaillerai avec vous. Je ne boirai pas quand je serai sorcière.

  Neko s’esclaffe bruyamment. On dirait les rires préenregistrés d’une sitcom.

  — Comme si c’était à vous de définir les règles!

  Je lui jette un regard mauvais et je me tourne vers David.

  — Je parle sérieusement. N’allez pas croire que Melissa et moi nous enivrons tous les soirs… Je ne peux pas laisser ces histoires de sorcellerie régir toute ma vie.

  — Ces histoires de sorcellerie? Décidément vous ne comprenez pas…

  — Et ce sera toujours le cas si vous instaurez des règles qui feront de moi quelqu’un d’autre.

  Je discute avec lui comme une héroïne des comédies de Shakespeare… Espérons que l’esprit de Béatrice soit à la hauteur du mépris de Bénédict !

  — Je ne vous laisserai pas m’enfermer dans un couvent.

  Un couvent? Où suis-je allée chercher un truc pareil? Personne n’a parlé de couvent, ni de sexe, ni d’autres restrictions. Il est juste question de boissons. Je continue à fixer David, mais le rouge me monte aux joues.

  J’ignore ce qui se passe alors. Peut-être est-ce dû aux efforts que je fais pour cacher mes joues en feu, ou ma soudaine détermination. Peut-être est-ce tout simplement qu’il se fait tard et que David doit rentrer chez lui (ou ailleurs. Disons l’endroit où il vit en attendant que je prononce une nouvelle formule magique peu « orthodoxe » !).

  Toujours est-il qu’il hoche la tête en disant :

  — Très bien.

  Neko s’en étrangle.

  — Très bien?

  Sa réaction est une bonne chose, car je ne sais plus trop sur quel point David est d’accord avec moi.

  — Absolument. Vous pourrez boire un verre ou deux, mais pas lorsque vous exercerez vos pouvoirs magiques. Ni lorsque nous travaillerons ensemble.

  Je tends la main, comme si nous venions de négocier un accord commercial de première importance. Et je me fends d’un large sourire, sans trop savoir pourquoi. Peut-être à cause de toute cette polémique autour des mojitos, mais je pense qu’il y a une autre raison. En fait, je suis fière de moi, fière d’avoir dit ce que je voulais et d’avoir tenu bon jusqu’à ce que j’obtienne gain de cause.

  David me serre trois fois la main, comme on le fait entre hommes d’affaires, et je ne peux m’empêcher de baisser les yeux. Lorsque je relève la tête pour voir son visage, impossible de croiser son regard.

  Il me lance :

  — Nous commençons demain. Après dîner.

  — Après dîner.

  A m’entendre, on croirait que j’accepte ce genre d’invitations – un coaching sur la sorcellerie – à longueur d’année…

  David se lève. Alors qu’il s’apprête à ouvrir la porte d’entrée (il a déjà la main sur le verrou), il fait demi-tour. Il se déplace rapidement, comme un chien de berger qui fait rentrer dans le troupeau un mouton égaré. Ebahie, je le vois prendre sur l’assiette en céramique de la table basse un des gâteaux confectionnés par Melissa. Il mord dedans, et ses magnifiques dents blanches semblent plus blanches encore sur fond de sablé et de chocolat.

  Il mâche consciencieusement la première bouchée et l’avale en disant :

  — Mmm… Il mérite bien le nom de Désir!

  Melissa en reste bouche bée, mais c’est mon visage à moi qui vire à l’écarlate tellement je suis gênée. David plonge son regard dans le mien.

  — A demain.

  — A demain.

  Je ferme la porte derrière lui. Je mets un moment à reprendre mes esprits avant de m’écrouler dans les bras de Melissa et de Neko. Ils sont là, autour de moi, à pousser des petits cris excités, et je me demande bien pourquoi. Est-ce parce que je suis une sorcière? Ou parce que je me suis montrée plus maligne qu’un invité exigeant ? Ou bien fêtent-ils tout simplement une maîtresse de maison (doublée d’une amie) totalement épuisée et qui a bu quelques verres de trop ?

  Quelle importance, d’ailleurs ? Ce sont mes amis, et ils sont contents de ce qui m’arrive. Au point d’en oublier de me reprocher d’être à court de mojitos…

  9

  Quelqu’un a vidé un cendrier dans ma bouche. Sans doute celui qui m’a cogné le front avec un marteau à panne bombée. Celui-là même qui a posé des ampoules de dix mille kilowatts à la fenêtre de ma chambre.

  Je gémis et je roule sur le côté en remontant l’oreiller sous ma tête. Ma couette glisse par terre (Qui a fait un gros nœud avec pendant que je dormais ?) et aussitôt, l’air glacial qui balaie mes bras et mes jambes me donne la chair de poule. Je me penche en jurant pour récupérer la couette, mais ma main ne la trouve pas. J’explore un peu plus loin : toujours rien. Résignée à me battre contre l’être diabolique qui a saboté mon sommeil, ne serait-ce que pour récupérer ma couette, je m’assieds dans mon lit.

  La pendule indique 8 h 45 en chiffres rouge fluo agressifs.

  8 h 45 !

  Je dois être au boulot dans un quart d’heure!

  Tout en recommençant à jurer comme un charretier, je me rue dans le couloir. Un simple coup d’œil au salon me remémore tous les événements de la nuit précédente. Avons-nous vraiment rempli une nouvelle carafe, en remplaçant le rhum par de la vodka, et le jus de citron vert par du jus d’orange glacé ? Nous sommes-nous, en un mot, concocté des vodkas orange à la menthe pour faire descendre les deux derniers Désirs d’Amande qui ont fait office de souper ? Rien qu’à cette pensée, mon ventre en frémit.

  Bien. L’heure n’est pas aux regrets. Ce qui est fait est fait.

  Je m’asperge le visage d’eau glacée et j’attaque ma bouche pâteuse au Colgate, à grands coups de brosse à dents. Je fais la grimace en me grattant les papilles.

  — Je me demandais quand vous alliez vous décider à vous réveiller…

  Surprise par la soudaine arrivée de Neko, j’avale la moitié de mon dentifrice et je lui lance :

  — ... quoi vez pas révllée... ?

  — Pardon? Seriez-vous encore sous l’emprise de l’alcool? Je ne comprends pas un mot de ce que vous dites.

  Je crache dans le lavabo.

  — Pourquoi ne m’avez-vous pas réveillée ?

  — Vous aviez besoin de vos huit heures de sommeil pour être en beauté. A partir de maintenant, vous allez travailler avec David Montrose, et en ma qualité de démon familier, je dois m’assurer que vous soyez sous votre meilleur jour.

  Il sourit d’un air rusé et jette sur moi un regard critique. Le tableau qu’il contemple ne doit pas être très glamour, avec mes cheveux en pétard et un reliquat de dentifrice au coin des lèvres…

  — Je dois être au boulot dans quinze minutes !

  Il jette un coup d’œil sur sa montre superclasse.

  — Il vous en reste dix…

  — Aaaah…

  J’agrippe une serviette pour me sécher le visage. Ma brosse se prend dans les nœuds de mes cheveux mais je force le passage pour regagner ma chambre. Je claque la porte et je remercie mentalement Evelyn d’avoir eu l’idée originale d’attirer le chaland avec ces costumes d’un autre âge. Au moins, je n’ai pas à me casser la tête pour choisir ma tenue. Mon costume colonial me tend les bras dans mon placard.

  Je fouille dans un des tiroirs de la commode pour choisir mes sous-vêtements. Je n’ai pas le choix, il ne me reste qu’un slip et un soutien-gorge propres. Je lance un regard venimeux vers le couloir.

  — Neko!

  — Oui?

  Il est debout juste en face de ma porte, si près de moi que le son de sa voix me fait sursauter et que je jette par pur réflexe un coup d’œil à mon Imbécile de Poisson. Mais le tétra continue de nager dans son aquarium comme si de rien n’était. Je saupoudre l’eau d’une pincée de daphnies en me rappelant qu’il serait temps de changer son eau. Nouveau coup d’œil à la pendule : 8 h 55. Ce ne sera pas pour aujourd’hui.

  — Neko, vous êtes censé m’aider, non ?

  Je lui pose la question les dents serrées tout en enfilant mon slip et en me battant avec les a
grafes de mon soutien-gorge. Franchement, mes vêtements m’allaient mieux l’automne dernier… A l’époque, j’étais toujours fiancée à Scott. C’était avant que je trouve du réconfort auprès de mes meilleurs amis, Ben et Jerry. Avec le concours d’un million de carafes de mojitos… sans oublier ceux d’hier soir et les vodkas orange à la menthe ! Je m’intime l’ordre de ne plus y penser.

  — C’est vrai ?

  Neko s’est arrangé pour répondre sous forme de question. Je l’imagine, la tête tournée sur le côté, réfléchissant à ce que je lui demande.

  — En dehors des tours de magie, vous savez faire quoi ? Si je n’ai pas le temps à la fois d’étudier les bouquins de la cave et de vaquer aux travaux ménagers, êtes-vous capable de m’aider à faire le ménage?

  Le ménage… On croirait entendre Mamie ! J’enfile mes cerceaux par la tête et je les mets bien en place autour de mes hanches.

  Neko s’informe.

  — A quoi pensez-vous, exactement ?

  J’enfile le jupon matelassé sur les cerceaux avec des gestes brusques, puis je saute sur ma veste. Je tique un peu car j’ai l’impression qu’elle me serre plus qu’avant, qu’elle est moins évasée au niveau des hanches. Le chintz de coton est doux au toucher, mais je n’ai pas le temps d’admirer le dessin des fleurs.

  Je crie à Neko, en attrapant mon foulard :

  — A la lessive !

  — La lessive ?

  A son air sceptique, on dirait qu’il prononce un mot étranger.

  — Vous savez bien… la machine à laver, le séchoir à linge, les petites feuilles d’assouplissant aux senteurs d’alpage…

  Je repars au pas de course vers mon bureau. La robe est peut-être de style colonial, mais je continue à porter des chaussures et des collants d’aujourd’hui. Avant même de sortir la première paire de collants de mon tiroir, je vois qu’ils sont filés. Pas question d’être négligée, de prendre le risque que Jason trouve matière à critique ! Ne pas oublier qu’il peut passer à la bibliothèque à n’importe quel moment.

  Neko semble scandalisé.

  — Vous voulez que je m’occupe de la lessive?

  Je décide d’en appeler à sa raison.

  — Je veux que vous m’aidiez pour que j’aie le temps d’étudier les livres de la cave et devenir la meilleure sorcière possible.

 

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