by Jules Verne
—Je n'en sais rien; mais que nous importe?
—Tu as raison, Samuel; fions-nous a la Providence du soin de nous diriger et de nous maintenir en bonne sante, comme nous voila! On n'a pas l'air d'avoir traverse les pays les plus pestilentiels du monde!
—Nous etions a meme de nous elever, et c'est ce que nous avons fait.
—Vivent les voyages aeriens! s'ecria Joe. Nous voici, apres vingt-cinq Jours, bien portants, bien nourris, bien reposes, trop reposes peut-etre, car mes jambes commencent a se rouiller, et je ne serais pas fache de les degourdir pendant une trentaine de milles
—Tu te donneras. ce plaisir-la dans les rues de Londres, Joe; mais, pour conclure, nous sommes partis trois comme Denham, Clapperton, Overweg, comme Barth, Richardson et Vogel, et, plus heureux que nos devanciers, tous trois nous nous retrouvons encore! Mais il est bien important de ne pas nous separer. Si pendant que l'un de nous est a terre, le Victoria devait s'enlever pour eviter un danger subit, imprevu, qui sait si nous le reverrions jamais! Aussi, je le dis franchement a Kennedy, je n'aime pas qu'il s'eloigne sous pretexte de chasse.
—Tu me permettras pourtant bien, ami Samuel, de me passer encore cette fantaisie; il n'y a pas de mal a renouveler nos provisions; d'ailleurs, avant notre depart, tu m'as fait entrevoir toute une serie de chasses superbes, et jusqu'ici j'ai peu fait dans la voie des Anderson et des Cumming.
—Mais, mon cher Dick, la memoire te fait defaut, ou ta modestie t'engage a oublier tes prouesses; il me semble que, sans parler du menu gibier, tu as deja une antilope, un elephant et deux lions sur la conscience.
—Bon! qu'est-ce que cela pour un chasseur africain qui voit passer tous les animaux de la creation au bout de son fusil? Tiens! tiens! regarde cette troupe de girafes!
—Ca, des girafes! fit Joe. elles sont grosses comme le poing!
—Parce que nous sommes a mille pieds au-dessus d'elles; mais, de pres, tu verrais qu'elles ont trois fois ta hauteur.
—Et que dis-tu de ce troupeau de gazelles? reprit Kennedy, et ces autruches qui fuient avec la rapidite du vent?
—Ca! des autruches! fit Joe, ce sont des poules, tout ce qu'il y a de plus poules!
—Voyons, Samuel, ne peut-on s'approcher?
—On peut s'approcher, Dick, mais non prendre terre A quoi bon, des lors, frapper ces animaux qui ne te seront d'aucune utilite? S'il s'agissait de detruire un lion, un chat-tigre, une hyene, je le comprendrais; ce serait toujours une bete dangereuse de moins; mais une antilope, une gazelle, sans autre profit que la vaine satisfaction de tes instincts de chasseur, cela n'en vaut vraiment pas la peine. Apres tout, mon ami, nous allons nous maintenir a cent pieds du sol, et si tu distingues quelque animal feroce, tu nous feras plaisir en lui envoyant une balle dans le ceur. "
Le Victoria descendit peu a peu, et se maintint neanmoins a une hauteur rassurante. Dans cette contree sauvage et tres peuplee, il fallait se defier de perils inattendus.
Les voyageurs suivaient directement alors le cours du Shari; les bords charmants de ce fleuve disparaissaient sous les ombrages d'arbres aux nuances variees; des lianes et des plantes grimpantes serpentaient de toutes parts et produisaient de curieux enchevetrements de couleurs. Les crocodiles s'ebattaient en plein soleil ou plongeaient sous les eaux avec une vivacite de lezard; en se jouant, ils accostaient les nombreuses eles vertes qui rompaient le courant du fleuve.
Ce fut ainsi, au milieu d'une nature riche et verdoyante, que passa le district de Maffatay. Vers neuf heures du matin, le docteur Fergusson et ses amis atteignaient enfin la rive meridionale du lac Tchad.
C'etait donc la cette Caspienne de l'Afrique, dont l'existence fut si longtemps releguee au rang des fables, cette mer interieure a laquelle parvinrent seulement les expeditions de Denham et de Barth.
Le docteur essaya d'en fixer la configuration actuelle, bien differente deja de celle de 1847; en effet, la carte de ce lac est impossible a tracer; il est entoure de marais fangeux et presque infranchissables, dans lesquels Barth pensa perir; d'une annee a l'autre, ces marais, couverts de roseaux et de papyrus de quinze pieds, deviennent le lac lui-meme; souvent aussi, les villes etalees sur ses bords sont a demi submergees, comme il arriva a Ngornou en 1856, et maintenant les hippopotames et les alligators plongent aux lieux memes ou s'elevaient les habitations du Bornou.
Le soleil versait ses rayons eblouissants sur cette eau tranquille, et au nord les deux elements se confondaient dans un meme horizon.
Le docteur voulut constater la nature de l'eau, que longtemps on crut salee; il n'y avait aucun danger a s'approcher de la surface du lac, et la nacelle vint le raser comme un oiseau a cinq pieds de distance.
Joe plongea une bouteille, et la ramena a demi pleine; cette eau fut goutee et trouvee peu potable, avec un certain gout de natron.
Tandis que le docteur inscrivait le resultat de son experience, un coup de fusil eclata a ses cotes Kennedy n'avait pu resister au desir d'envoyer une balle a un monstrueux hippopotame; celui-ci, qui respirait tranquillement, disparut au bruit de la detonation, et la balle conique du chasseur ne parut pas le troubler autrement.
" Il aurait mieux valu le harponner, dit Joe.
—Et comment!
—Avec une de nos ancres. C'eut ete un hamecon convenable pour un pareil animal.
—Mais, dit Kennedy, Joe a vraiment une idee..
—Que je vous prie de ne pas mettre a execution! repliqua le docteur. L'animal nous aurait vite entraenes ou nous n'avons que faire.
—Surtout maintenant que nous sommes fixes sur la qualite de l'eau du Tchad. Est-ce que cela se mange, ce poisson-la, Monsieur Fergusson?
—Ton poisson, Joe, est tout bonnement un mammifere du genre des pachydermes; sa chair est excellente, dit-on, et fait l'objet d'un grand commerce entre les tribus riveraines du lac.
—Alors je regrette que le coup de fusil de M. Dick n'ait pas mieux reussi.
—Cet animal n'est vulnerable qu'au ventre et entre les cuisses; la balle de Dick ne l'aura pas meme entame. Mais, si le terrain me parait propice, nous nous arreterons a l'extremite septentrionale du lac; la, Kennedy se trouvera en pleine menagerie, et il pourra se dedommager a son aise.
—Eh bien! dit Joe, que Monsieur Dick chasse un peu a l'hippopotame! Je voudrais gouter la chair de cet amphibie. Il n'est vraiment pas naturel de penetrer jusqu'au centre de l'Afrique pour y vivre de becassines et de perdrix comme en Angleterre! "
CHAPITRE XXXII
La capitale du Bornou.—Les eles des Biddiomahs.—Les gypaetes.—Les inquietudes du docteur.—Ses precautions.—Une attaque au milieu des airs.—L'enveloppe dechiree.—La chute.—Devouement sublime.—La cote septentrionale du lac.
Depuis son arrivee au lac Tchad, le Victoria avait rencontre un courant qui s'inclinait plus a l'ouest; quelques nuages temperaient alors la chaleur du jour; on sentait d'ailleurs un peu d'air sur cette vaste etendue d'eau; mais, vers une heure, le ballon, ayant coupe de biais cette partie du lac, s'avanca de nouveau dans les terres pendant l'espace de sept ou huit milles.
Le docteur, un peu fache d'abord de cette direction, ne pensa plus a s'en plaindre quand il apercut la ville de Kouka, la celebre capitale du Bornou; il put l'entrevoir un instant, ceinte de ses murailles d'argile blanche; quelques mosquees assez grossieres s'elevaient lourdement au-dessus de cette multitude de des a jouer qui forment les maisons arabes. Dans les cours des maisons et sur les places publiques poussaient des palmiers et des arbres a caoutchouc, couronnes par un dome de feuillage large de plus de cent pieds. Joe fit observer que ces immenses parasols etaient en rapport avec l'ardeur des rayons solaires, et il en tira des conclusions fort aimables pour la Providence.
Kouka se compose reellement de deux villes distinctes, separees par le " dendal, " large boulevard de trois cents toises, alors encombre de pietons et de cavaliers. D'un cote se carre la ville riche avec ses cases hautes et aerees; de l'autre se presse la ville pauvre, triste assemblage de huttes basses et coniques, ou vegete une indigente population, car Kouka n'est ni commercante ni industrielle.
Kennedy lui trouva quelque
ressemblance avec un Edimbourg qui s'etalerait dans une plaine, avec ses deux villes parfaitement determinees.
Mais a peine les voyageurs purent-ils saisir ce coup d'eil, car, avec la mobilite qui caracterise les courants de cette contree, un vent contraire les saisit brusquement et les ramena pendant une quarantaine de milles sur le Tchad.
Ce fut alors un nouveau spectacle; ils pouvaient compter les eles nombreuses du lac, habitees par les Biddiomahs, pirates sanguinaires tres redoutes, et dont le voisinage est aussi craint que celui des Touareg du Sahara. Ces sauvages se preparaient a recevoir courageusement le Victoria a coups de fleches et de pierres, mais celui-ci eut bientot fait de depasser ces eles, sur lesquelles il semblait papillonner comme un scarabee gigantesque.
En ce moment, Joe regardait l'horizon, et, s'adressant a Kennedy, il lui dit:
" A la foi, Monsieur Dick, vous qui etes toujours a rever chasse, voila justement votre affaire.
—Qu'est-ce donc, Joe?
—Et, cette fois, mon maetre ne s'opposera pas a vos coups de fusil.
—Mais qu'y a-t-il?
—Voyez-vous la-bas cette troupe de gros oiseaux qui se dirigent sur nous?
—Des oiseaux! fit le docteur en saisissant sa lunette.
—Je les vois, repliqua Kennedy; ils sont au moins une douzaine
—Quatorze, si vous voulez bien, repondit Joe.
—Fasse le ciel qu'ils soient d'une espece assez malfaisante pour que le tendre Samuel n'ait rien a m'objecter!
—Je n'aurai rien a dire, repondit Fergusson, mais j'aimerais mieux voir ces oiseaux-la loin de nous!
Vous avez peur de ces volatiles! fit Joe.
—Ce sont des gypaetes, Joe, et de la plus grande taille; et s'ils nous attaquent...
—Eh bien! nous nous defendrons, Samuel! Nous avons un arsenal pour les recevoir! je ne pense pas que ces animaux-la soient bien redoutables!
—Qui sait? " repondit le docteur.
Dix minutes apres, la troupe s'etait approchee a portee de fusil; ces quatorze oiseaux faisaient retentir l'air de leurs cris rauques; ils s'avancaient vers le Victoria, plus irrites qu'effrayes de sa presence.
" Comme ils crient! fit Joe; quel tapage! Cela ne leur convient probablement pas qu'on empiete sur leurs domaines, et `que l'on se permette de voler comme eux?
—A la verite, dit le chasseur, ils ont un air assez terrible, et je les croirais assez redoutables s'ils etaient armes d'une carabine de Purdey Moore!
—Ils n'en ont pas besoin, " repondit Fergusson qui devenait tres serieux.
Les gypaetes volaient en tracant d'immenses cercles, et leurs orbes se retrecissaient peu a peu autour du Victoria; ils rayaient le ciel dans une fantastique rapidite, se precipitant parfois avec la vitesse d'un boulet, et brisant leur ligne de projection par un angle brusque et hardi. Le docteur, inquiet, resolut de s'elever dans l'atmosphere pour echapper a ce dangereux voisinage; il dilata l'hydrogene du ballon, qui ne tarda pas a monter.
Mais les gypaetes monterent avec lui, peu disposes a l'abandonner.
" Ils ont l'air de nous en vouloir, " dit le chasseur en armant sa carabine.
En effet, ces oiseaux s'approchaient, et plus d'un, arrivant a cinquante pieds a peine, semblait braver les armes de Kennedy.
" J'ai une furieuse envie de tirer dessus, dit celui-ci.
—Non, Dick, non pas! Ne les rendons point furieux sans raison! Ce serait les exciter a nous attaquer.
—Mais j'en viendrai facilement a bout.
—Tu te trompes, Dick.
—Nous avons une balle pour chacun d'eux.
—Et s'ils s'elancent vers la partie superieure du ballon, comment les atteindras-tu? Figure-toi donc que tu te trouves en presence d'une troupe de lions sur terre, ou de requins en plein Ocean! Pour des aeronautes, la situation est aussi dangereuse.
—Parles-tu serieusement, Samuel?
—Tres serieusement, Dick.
—Attendons alors.
—Attends. Tiens-toi pret en cas d'attaque, mais ne fais pas feu sans mon ordre.
Les oiseaux se massaient alors a une faible distance; on distinguait parfaitement leur gorge pelee tendue sous l'effort de leurs cris, leur crete cartilagineuse, garnie de papilles violettes, qui se dressait avec fureur. Ils etaient de la plus forte taille; leur corps depassait trois pieds en longueur, et le dessous de leurs ailes blanches resplendissait au soleil; on eut dit des requins ailes, avec lesquels ils avaient une formidable ressemblance.
" Ils nous suivent, dit le docteur en les voyant s'elever avec lui, et nous aurions beau monter, leur vol les porterait plus haut que nous encore!
—Eh bien, que faire? " demanda Kennedy.
Le docteur ne repondit pas.
" Ecoute, Samuel, reprit le chasseur: ces oiseaux sont quatorze; nous avons dix-sept coups a notre disposition, en faisant feu de toutes nos armes. N'y a-t-il pas moyen de les detruire ou de les disperser? Je me charge d'un certain nombre d'entre eux.
—Je ne doute pas de ton adresse, Dick; je regarde volontiers comme morts ceux qui passeront devant ta carabine; mais, je te le repete, pour peu qu'ils s'attaquent a l'hemisphere superieur du ballon, tu ne pourras plus les voir; ils creveront cette enveloppe qui nous soutient, et nous sommes a trois mille pieds de hauteur! "
En cet instant, l'un des plus farouches oiseaux piqua droit sur le Victoria, le bec et les serres ouvertes, pret a mordre, pret a dechirer.
" Feu! feu! " s'ecria le docteur.
Il avait a peine acheve, que l'oiseau, frappe a mort, tombait en tournoyant dans l'espace.
Kennedy avait saisi l'un des fusils a deux coups. Joe epaulait l'autre.
Effrayes de la detonation, les gypaetes s'ecarterent un instant; mais ils revinrent presque aussitot a la charge avec une rage extreme. Kennedy d'une premiere balle coupa net le cou du plus rapproche. Joe fracassa l'aile de l'autre.
" Plus que onze, " dit-il.
Mais alors les oiseaux changerent de tactique, et d'un commun accord ils s'eleverent au-dessus du Victoria, Kennedy regarda Fergusson.
Malgre son energie et son impassibilite, celui-ci devint pale. Il y eut un moment de silence effrayant. Puis un dechirement strident se fit entendre comme celui de la soie qu'on arrache, et la nacelle manqua sous les pieds des trois voyageurs.
" Nous sommes perdus, s'ecria Fergusson en portant les yeux sur le barometre qui montait avec rapidite. "
Puis il ajouta: " Dehors le lest, dehors! "
En quelques secondes tous les fragments de quartz avaient disparu.
" Nous tombons toujours!.. Videz les caisses a eau!.. Joe entends-tu?.. Nous sommes precipites dans le lac! "
Joe obeit. Le docteur se pencha. Le lac semblait venir a lui comme une maree montante; les objets grossissaient a vue d'eil; la nacelle n'etait pas a deux cents pieds de la surface du Tchad.
" Les provisions! les provisions! " s'ecria le docteur.
Et la caisse qui les renfermait fut jetee dans l'espace.
La chute devint moins rapide, mais les malheureux tombaient toujours!
" Jetez! jetez encore! s'ecria une derniere fois le docteur.
—Il n'y a plus rien, dit Kennedy.
—Si! " repondit laconiquement Joe en se signant d'une main rapide.
Et il disparut par-dessus le bord de la nacelle
" Joe! Joe! " fit le docteur terrifie.
Mais Joe ne pouvait plus l'entendre. Le Victoria deleste reprenait sa marche ascensionnelle, remontait a mille pieds dans les airs, et le vent s'engouffrant dans l'enveloppe degonflee l'entraenait vers les cotes septentrionales du lac.
" Perdu! dit le chasseur avec un geste de desespoir.
—Perdu pour nous sauver! " repondit Fergusson.
Et ces hommes si intrepides sentirent deux grosses larmes couler de leurs yeux. Ils se pencherent, en cherchant a distinguer quelque trace du malheureux Joe, mais ils etaient deja loin.
" Quel parti prendre! demanda Kennedy.
—Descendre a terre, des que cela sera possible, Dick, et puis attendre. "
Apres une marche de s
oixante milles, le Victoria s'abattit sur une cote deserte, au nord du lac. Les ancres s'accrocherent dans un arbre peu eleve, et le chasseur les assujettit fortement.
La nuit vint, mais ni Fergusson ni Kennedy ne purent trouver un instant de sommeil.
CHAPITRE XXXIII
Conjectures.—Retablissement de l'equilibre du Victoria.—Nouveaux calculs du docteur Fergusson.—Chasse de Kennedy.—Exploration complete du lac Tchad.—Tangalia.—Retour.—Lari.
Le lendemain, 13 mai, les voyageurs reconnurent tout d'abord la partie de la cote qu'ils occupaient. C'etait une sorte d'ele de terre ferme au milieu d'un immense marais Autour de ce morceau de terrain solide s'elevaient des roseaux grands comme des arbres d'Europe et qui s'etendaient a perte de vue.
Ces marecages infranchissables rendaient sure la position du Victoria; il fallait seulement surveiller le cote du lac; la vaste nappe d'eau allait s'elargissant, surtout dans l'est, et rien ne paraissait a l'horizon, ni continent ni eles.
Les deux amis n'avaient pas encore ose parler de leur infortune compagnon. Kennedy fut le premier a faire part de ses conjectures au docteur.
" Joe n'est peut-etre pas perdu, dit-il. C'est un garcon adroit, un nageur comme il en existe peu. Il n'etait pas embarrasse de traverser le Frith of Forth a Edimbourg. Nous le reverrons, quand et comment, je l'ignore; mais, de notre cote, ne negligeons rien pour lui donner l'occasion de nous rejoindre.
—Dieu t'entende, Dick, repondit le docteur d'une voix emue. Nous ferons tout au monde pour retrouver notre ami! Orientons-nous d'abord. Mais, avant tout, debarrassons le Victoria de cette enveloppe exterieure, qui n'est plus utile; ce sera nous delivrer d'un poids considerable, six cent cinquante livres, ce qui en vaut la peine. "
Le docteur et Kennedy se mirent a l'ouvrage; ils eprouverent de grandes difficultes; il fallut arracher morceau par morceau ce taffetas tres resistant, et le decouper en minces bandes pour le degager des mailles du filet. La dechirure produite par le bec des oiseaux de proie s'etendait sur une longueur de plusieurs pieds.
Cette operation prit quatre heures au moins; mais enfin le ballon interieur, entierement degage, parut n'avoir aucunement souffert. Le Victoria etait alors diminue d'un cinquieme. Cette difference fut assez sensible pour etonner Kennedy.