The Complete Poetry of Aimé Césaire

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The Complete Poetry of Aimé Césaire Page 21

by Césaire, Aimé; Eshleman, Clayton; Arnold, A. James


  . . .with each step of my voice, with each drop of my name

  LE REBELLE

  …à chaque pas de ma voix, à chaque goutte de mon nom

  CHORUS (still farther away)

  Arise o king

  LE CHŒUR (plus lointain encore)

  Ô roi debout

  THE REBEL

  . . .arucaria cones, bunches of cherries

  LE REBELLE

  … des pommes d’araucaria, des bouquets de cerises

  CHORUS (nearly lost in the distance)

  Arise o king

  LE CHŒUR (presque perdu dans la distance)

  Ô roi debout

  THE REBEL (in a thundering voice)

  . . .bows, signs prints fires

  LE REBELLE (d’une voix tonnante)

  … des arcs, des signes des empreintes des feux

  CHORUS (moaning)

  Arise o king

  LE CHŒUR (gémissant)

  Ô roi debout

  THE REBEL

  I had brought this country to a knowledge of itself,

  acquainted this land with its secret demons

  lit up in the craters of heloderms and cymbals

  the symphonies of an unknown hell, splendidly parasitized with haughty nostalgias

  LE REBELLE

  j’avais amené ce pays à la connaissance de lui-même,

  familiarisé cette terre avec ses démons secrets

  allumé aux cratères d’hélodermes et de cymbales

  les symphonies d’un enfer inconnu, splendide parasité de nostalgies hautaines

  CHORUS

  Arise o king

  LE CHŒUR

  Ô roi debout

  THE REBEL

  And now

  alone

  everything is alone

  however much I sharpen my voice

  all deserts all

  my voice labors

  my voice pitches in the foghorn of mists without crossroad

  and I have no mother

  and I have no sons.

  LE REBELLE

  Et maintenant

  seul

  tout est seul

  j’ai beau aiguiser ma voix

  tout déserte tout

  ma voix peine

  ma voix tangue dans le cornet des brumes sans carrefour

  et je n’ai pas de mère

  et je n’ai pas de fils.

  CHORUS

  Arise o king

  LE CHŒUR

  Ô roi debout

  THE REBEL

  I understand. Hold on convict back off, your part is finished.

  Beautiful as when memory relinquishes recent oblivion, vengeance has arisen with the ear of the day and all the dust that weaves the flesh of night, all the wasps that salivate the cassava of night all the barracudas that scrawl graffiti on the back of night have pressed on until glimpsing their eye of youth.

  And behold I hail now the last night of my sex

  hearth

  coal

  sun rooted in the mines of my strength

  You will not frighten me phantoms I am strong.

  I have muzzled the sea while listening to the gardeners struggling toward the fabulous rump of morning in a softness of scandal and spume.

  (The light is extinguished).

  LE REBELLE

  je comprends. Holà chiourme retirez-vous, votre office est fini.

  Belle comme la mémoire dessaisie d’oubli frais, la vengeance s’est dressée avec l’oreille du jour et toutes les poussières qui tissent la chair des nuits, toutes les guêpes qui salivent la cassave des nuits toutes les sphyrènes qui signent le dos des nuits ont forcé jusqu’à voir leur œil de jouvence.

  Et voici je salue maintenant la dernière nuit de mon sexe

  foyer

  charbon

  soleil enraciné dans les mines de ma force

  Vous ne m’effraierez pas fantômes je suis fort.

  j’ai muselé la mer en écoutant peiner les maraîchers vers la croupe fabuleuse des matins dans une douceur de scandale et d’écume.

  (La lumière s’éteint).

  THE REBEL

  I have made a pact with the night, for twenty years past I have felt it softly hailing me. . .

  (A flickering of candlelight).

  LE REBELLE

  j’ai pacte avec cette nuit, depuis vingt ans je la sens qui vers moi doucement hèle…

  (Des lumignons s’allument).

  THE REBEL

  I have hailed my gods by dint of renunciations.

  (Sneers).

  LE REBELLE

  j’ai hélé mes dieux à force de reniements

  (Ricanements).

  but they are watching me, spying on me and I am afraid

  of the evil and jealous gods.

  and their arms are long, immense, and their hand is webbed.

  no way to escape

  I say I’ve had it

  mais ils me regardent ils m’épient, et j’ai peur

  des dieux méchants et jaloux.

  et leur bras est long immense, et leur main est palmée.

  pas moyen d’échapper

  je dis que je suis fichu

  I say I can no more

  how to make them understand that I do not want. That I cannot

  not a clump of sleep, not a clump of silence that does not hide a god

  and the voices say that I am a traitor, I am not an ingrate

  I prostrate myself I lower my head

  and the young goat bleats in my heart

  je dis que je ne peux pas

  comment leur faire comprendre que je ne veux pas. Que je ne peux pas

  pas une touffe de sommeil, pas une touffe de silence qui ne cache un dieu

  et les voix disent que je suis un traître, je ne suis pas un ingrat

  je me prosterne je baisse la tête

  et le chevreau bêle en mon cœur

  (He stops. Grimacing frozen faces appear: they are fetishes: fantastic beasts with deformed faces and enormous white pupils.)

  (Il s’arrête. Apparaissent des figures grimaçantes immobiles : ce sont les fétiches : animaux fantastiques faces difformes énormes prunelles blanches).

  THE REBEL (flat on his belly)

  Here I am. . .

  (Pause).

  LE REBELLE (à plat ventre)

  Me voici…

  (Pause).

  however much one paints the foot of the tree white the strength of the bark screams from below. . .

  (Pause).

  on a beau peindre blanc le pied de l’arbre la force de l’écorce en dessous crie…

  (Pause).

  why would I fear the judgment of my gods?

  who said that I was a traitor?

  (Pause).

  pourquoi aurais-je peur du jugement de mes dieux ?

  qui a dit que j’ai trahi ?

  (Pause).

  the strange beggars with vintage faces who sometimes threaten

  sometimes hail the dawn

  they are myself

  a hunger every night awakens them amidst the madrepores

  a hunger for a greater sun and very ancient coins

  I turn anew toward the unknown wind humped by pursuits

  les étranges mendiants aux faces de millésime qui tantôt menacent

  tantôt saluent les aubes

  c’est moi

  une faim chaque nuit les réveille parmi le madrépore

  une faim de soleil plus large et de pièces de monnaies très anciennes.

  je me tourne à nouveau vers le vent inconnu sailli de poursuites.

  I’m going away

  do not speak, do not laugh

  Africa sleeps, do not speak, do not laugh. Africa bleeds, my mother

  Africa shattered opens herself to a ditch of vermin,

  to the sterile invasion of the spermatozoa of rape.

  je m’en vais

  ne parlez pas, ne riez pas

  L’Afrique dort, ne parlez pas, ne riez pas. L’Afri
que saigne, ma mère

  L’Afrique s’ouvre fracassée à une rigole de vermines,

  à l’envahissement stérile des spermatozoïdes du viol.

  FIRST TEMPTER’S VOICE

  what thread stretched above the forests rivers swamps languages and wild beasts?

  I have no mother I have no past

  I have filled in to the point of forgetting the dust and insults the stepmother well of my navel.

  PREMIÈRE VOIX TENTATRICE

  quel fil tendu par-dessus les forêts les fleuves les marais les langues et les fauves ?

  je n’ai pas de mère je n’ai pas de passé

  j’ai comblé jusqu’à l’oubli de poussières et d’insulte le puits marâtre de mon nombril.

  THE REBEL

  get back torturers

  ah you wink at me

  you ask for my complicity?

  help help murder

  they have killed the sun there is no more sun there remain only the bulls* of Bashan

  a torch is attached to their furious tails

  assassins assassins

  it’s all over. . . they have sniffed out the black man’s flesh

  they stop

  they laugh.

  LE REBELLE

  arrière bourreaux

  ah vous me clignez de l’œil

  vous me demandez ma complicité ?

  au secours au secours au meurtre

  ils ont tué le soleil il n’y a plus de soleil il ne reste plus que les taureaux de Basan

  une torche est attachée à leur queue furibonde

  assassins assassins

  ça y est… ils ont reniflé la viande du nègre

  ils s’arrêtent

  ils rient.

  SECOND TEMPTER’S VOICE

  It’s over, it’s all over, useless to complain, judicial function is finished.

  See, they have torn him to shreds, to shreds like a wild pig

  DEUXIÈME VOIX TENTATRICE

  C’est fini, tout est fini, inutile de réclamer, l’action de la justice est éteinte.

  Voyez, ils l’ont déchiré en lambeaux, en lambeaux comme un cochon sauvage

  THE REBEL

  like an agouti? like a mongoose?

  who has done that? you ask me who has done that?

  no it is not I

  I am innocent

  LE REBELLE

  comme un agouti ? comme une mangouste ?

  qui a fait cela ? vous me demandez qui a fait cela ?

  non ce n’est pas moi

  je suis innocent

  Who?

  Them

  they the dogs

  they the men with bloody lips, with steely eyes

  but you know I tell you that the judicial function is finished.

  finished, but the light in their eyes is never extinguished.

  Assassins, Assassins, Assassins.

  (Stepping into the barathrum and going from corpse to corpse).

  Qui ?

  Eux

  eux les chiens

  eux les hommes aux babines saignantes, aux yeux d’acier

  mais vous savez je vous dis que l’action de la justice est éteinte.

  éteinte, mais la lueur de leurs yeux ne s’éteint jamais.

  Assassins, Assassins, Assassins.

  (S’avançant dans la barathre et circulant de cadavre en cadavre).

  Ashes, the dream . . . famished, famished . . . two hands burning on the plate of the sun. . . o you dead . . . and the sadism of the master and the death rattle of the slave forced to eat excrement put the finishing touches in lines of vomit on the shark’s snapping and the scolopendra’s slithering.

  O you who have died in a free land.

  the beautiful blind eyes of the earth spontaneously sing

  cutting school, the joined eyebrows of plowed highlands

  the wily strategems of colloquia without rhyme or reason in the quicksand.

  the shipwreckers’ cow, the rain of calvaries and waves bewitch with snakes with palavers with kelp the disjointed lighthouse of blood and shadow

  La cendre, le songe… affamé, affamé… deux mains brûlantes dans l’assiette du soleil… ô morts… et le sadisme du maître et le râlement de l’esclave par force coprophage parachèvent en traits de vomi le happement du squale et le rampement du scolopendre.

  Ô morts en terre franche.

  les beaux yeux aveugles de la terre chantent d’eux-mêmes

  l’école buissonnière, les sourcils joints des hauts labours

  les ruses savantes des colloques sans rime ni raison aux sables mouvants.

  la vache des naufrageurs, la pluie des calvaires et des vagues ensorcellent de serpents de palabres de varechs le phare disjoint de sang et d’ombre

  o you who have died without a cavesson

  I shall build out of sky, birds and parrots, bells, scarves, drums, airy smoke, furious caresses, copper tones, mother-of-pearl, sundays, junk, childish words, words of love

  of love of children’s mittens

  a world our world

  my round-shouldered world

  of wind of sun of moon of rain of full moon

  a world of teaspoons

  ô morts sans caveçon

  je bâtirai de ciel, d’oiseaux de perroquets, de cloches, de foulards, de tambours, de fumées légères, de tendresses furieuses, de tons de cuivre, de nacre, de dimanches, de bastringues, de mots d’enfants, de mots d’amour

  d’amour de mitaines d’enfants

  un monde notre monde

  mon monde aux épaules rondes

  de vent de soleil de lune de pluie de pleine lune

  un monde de petites cuillers

  of velvet

  of gold brocade

  of pitons of valleys of petals of frightened fawn cries

  a day

  long ago

  equal sisters will take one another by the hand in the torture chambers

  the world will bend very gently its crooked head in order to die

  de velours

  d’étoffes d’or

  de pitons de vallées de pétales de cris de faon effarouché

  un jour

  autrefois

  les sœurs égales se donneront la main dans les chambres de tortures

  le monde penchera tout doucement pour mourir sa tête biscornue

  the days neatly lined up like an orphanage going to mass

  the days with their polite assassin faces

  will rob themselves of milk of grass of hours

  with their wild cherry faces

  with their polite expressions of galleys on the route of swans

  with their famous castle looks

  but in the unknown halls as beautiful as the lie that is nothing other than the love of travel a day long ago truce of god without god of unknown ports always of unknown suns always

  les jours bien rangés comme un orphelinat allant à la messe

  les jours avec leurs mines d’assassins polis

  se détrousseront de lait d’herbe d’heures

  avec leurs mines de cerisiers sauvages

  avec leurs politesses de galères sur la route des cygnes

  avec leurs airs de château connu

  mais aux salles inconnues aussi belles que le mensonge qui n’est pas autre chose que l’amour du voyage un jour autrefois trêve de dieu sans dieu des ports inconnus toujours des soleils inconnus toujours

  SEMI-CHORUS

  Man, beware, fire is a language that asks to spread

  (The mother steps forward).

  LE DEMI-CHŒUR

  Homme, prends garde, le feu est un langage qui demande à courir.

  (S’avance la mère).

  THE REBEL

  Woman beware, there is a beautiful country licentious out of season that they have fattened on larvae

  a world of shards of flowers dirtied by old posters

  a house of broken tiles of leaves ripped out without tempest

  not yet

  not yet


  I shall return only serious

  love will shine in our burned-barn eyes

  like a drunken bird

  a firing squad

  LE REBELLE

  Femme prends garde, il y a un beau pays qu’ils ont gâté de larves dévergondé hors saison

  un monde d’éclats de fleurs salis de vieilles affiches

  une maison de tuiles cassées de feuilles arrachées sans tempête

  pas encore

  pas encore

  je ne reviendrai que grave

  l’amour luira dans nos yeux de grange incendiée

  comme un oiseau ivre

  un peloton d’exécution

  not yet

  not yet

  I shall return only with my good portion of contraband

  living love grassy with wheat with locusts with wave with deluge with whistlings with braziers with signs with forest of water with meadow of water with herds of water

  spacious love of flames of instants of hives of peonies of poinsettias prophetic of codes, prophetic of climates

  pas encore

  pas encore

  je ne reviendrai qu’avec ma bonne prise de contrebande

  l’amour vivant herbeux de blé de sauterelles de vague de déluge de sifflements de brasiers de signes de forêt d’eau de gazon d’eau de troupeaux d’eau

  l’amour spacieux de flammes d’instants de ruches de pivoines de poinsettias prophétique de chiffres, prophétique de climats

  CHORUS

  chopping knives my sweet canticles

  spilled blood my warm fur

  massacres, my massacres, smokes, my smokes create a road barely limpid with water jets propelled by the vent holes of the conflagration

  LE CHŒUR

  hachoirs mes doux cantiques

  sang répandu ma tiède fourrure

  les massacres, mes massacres, les fumées, mes fumées font une route peu limpide de jets d’eau lancés par les évents de l’incendie

 

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