Bohemian Flats

Home > Other > Bohemian Flats > Page 21
Bohemian Flats Page 21

by Mary Relindes Ellis


  Il y avait aussi l’activité débordante mais respectable d’Augsbourg et la luxueuse demeure de ses grands-parents Richter. Les sorties dans différents parcs, où sa grand-mère et ses tantes l’avaient tout d’abord promené dans son landau ; plus tard, il les devançait en courant rejoindre le marchand de glaces, celui qui avait un singe en laisse. Il se rappelle encore l’odeur du doux tabac à pipe qui parfumait l’haleine de son grand-père Richter, mais aussi les merveilles qui décoraient son bureau, et particulièrement la grosse mappemonde au sommet d’un présentoir en bois sculpté. Un jour, son grand-père lui avait pris la main et, guidant son doigt tendu, il avait fait tourner le globe lentement pour révéler une planète toute ronde, couverte d’océans et de continents.

  — Il existe d’autres gens et d’autres pays, avait dit son grand-père. Et peut-être qu’un jour, tu auras l’occasion de tous les visiter.

  Il se rappelle l’excitation qu’il avait éprouvée en traversant l’un de ces océans, la sensation des embruns sur sa peau. Il se rappelle l’homme au teint foncé, Tempy – jamais il n’oubliera son nom –, à qui manquaient trois doigts. Il leur avait montré les machines grâce auxquelles le navire progressait sur une étendue d’eau si vaste ; il leur avait donné un bonbon, à Frank et à lui ; il les avait mis en garde contre le dieu du Fleuve. Il se souvient du long trajet en train, durant lequel Frank et lui étaient restés rivés le nez contre la fenêtre du compartiment jusqu’à ce qu’ils s’endorment, seulement pour se réveiller quelques heures plus tard, puis se rendormir.

  Et ensuite, ils s’étaient retrouvés sur les Flats avec leurs parents et l’oncle Ray. Avec Frank, il avait regardé le fleuve immense et ils avaient pensé à Tempy, qui leur avait dit de ne pas nager dans ces eaux. Mais le fleuve apportait des merveilles : des poissons, du bois et même des fruits. L’hiver, malgré leur peur, ils patinaient à sa surface et baissaient parfois les yeux pour voir si, sous la glace, le dieu du Fleuve les surveillait. S’ils avaient soif, ils n’étaient pas obligés de rentrer chez eux : ils pouvaient passer chez un voisin et demander un verre d’eau ou de lait ; ou bien un bol de soupe avec un morceau de pain s’ils avaient faim. Quand ils suivaient le chariot du charbonnier, ils ramassaient tout ce qu’ils pouvaient, le mettaient dans leur sac de jute et apportaient à leurs voisins ce dont on n’avait pas besoin chez eux. Il se rappelle son délire, provoqué par la maladie, par la pensée qu’il allait mourir. Ses rêves à propos de sa sœur. Voilà qui l’effraie encore. Elle est née et ensuite, brusquement, elle est morte. Sa mère et son père ne parlent pas du bébé qui est mort. Mais lui, il parle en secret à sa sœur qui aurait presque cinq ans aujourd’hui, et à Beta ; voilà comment ils appelaient la vieille femme qu’ils n’ont connue que sept mois.

  Et maintenant, ils doivent partir d’ici aussi. Ce n’est pas une surprise. Depuis leur arrivée, il sait que ses parents faisaient des économies pour s’acheter une ferme. À l’âge de six ans, il avait déclaré à Kyle Takelo que, quand le moment viendrait, il ne partirait pas. Le Finlandais, surpris, avait cessé de travailler la planche qu’il courbait peu à peu en arc de cercle.

  — Ne dis pas cela, Eberhard, lui avait-il répondu. Ton père et ta mère veulent t’offrir un avenir que tu n’aurais jamais eu s’ils étaient restés en Allemagne ou s’ils n’avaient pas décidé de partir d’ici. Tu dois être maître de ton propre destin. Ton père t’apprendra ce que c’est que de construire une ferme, plutôt que de se contenter d’en hériter. Tu auras des voisins exactement comme tu en as ici. En plus, ton oncle Ray ne part pas, ce qui signifie que tu pourras revenir ici pour lui rendre visite.

  Ensuite, Kyle lui avait raconté des légendes sur les pins gigantesques qu’il verrait dans le nord du Wisconsin, mais aussi tout ce qu’il savait des Indiens qui vivaient là-bas.

  Il se lève et essuie la poussière de calcaire à l’arrière de son pantalon. Il offrira à sa nouvelle maison cinq autres années de sa vie. Puis, à quinze ans, si le nord du Wisconsin ne lui plaît pas, il reviendra ici vivre chez son oncle Ray. Il retournera à ce massif de bouleaux noirs et au fleuve immense.

  * * *

  1. Lors de la visite médicale à laquelle étaient soumis les nouveaux arrivants, les services d’immigration refoulaient tout voyageur atteint de trachome, infection bactérienne contagieuse évoluant vers la cécité.

  Chippewa Crossing

  * * *

  1906-1912

  UN SOLIDE GAILLARD COIFFÉ D’UN BONNET DE LAINE TOUT SALE, aux dents jaunies par le tabac et à la barbe constellée de miettes, les accueille à la gare de Park Falls lorsqu’ils descendent du train.

  — Ne seriez-vous pas Roman Zelinski ? demande Albert.

  — Si ! Et vous, vous êtes les Kaufmann ! lance-t-il d’une voix tonitruante.

  Tandis qu’il s’avance pour serrer la main d’Albert, ils sont envahis par une odeur nauséabonde. Magdalena donne des petits coups de coude aux garçons. Frank et Eberhard retiennent leur respiration et échangent une poignée de main avec lui. Puis ils reculent et scrutent l’homme, fascinés par la paupière balafrée qui recouvre son œil gauche : la peau, épaisse et couverte de cloques, leur rappelle du blanc d’œuf frit.

  — C’est très aimable à vous d’être venu nous chercher. Vous devez arriver directement du travail ? demande Magdalena.

  Elle espère qu’il comprendra à quoi elle fait allusion par cette question.

  — Ouais. J’avais peur d’rater vot’train.

  Il recule d’un pas, ôte son bonnet et le tord dans ses mains.

  — Désolé pour l’odeur. Mon métier, c’est de tanner des cuirs. Moi-même, au bout d’un moment, j’la sens plus. Si ça vous ennuie pas, vous pouvez prendre du thé ou du café là-bas, dit-il en désignant la gare, et moi, j’file au bout de la rue m’laver comme y faut, à l’hôtel de Zoesch.

  Quand Roman revient au bout d’une heure, il conduit un chariot si neuf que de la sève suinte encore de ses planches en pin. Ses cheveux noirs sont lissés en arrière et il s’est rasé la barbe ; mais il sent encore le cuir et l’écorce de tsuga dont il fait son tanin.

  — J’ai amené vot’chariot. J’ai deux hommes qui sont prêts à vous bâtir une maison. Des gens bien, qui travaillent dur. Y en a un, c’est un Indien. Ça vous dérange pas trop, qu’il soit indien ?

  Albert observe un silence.

  — Indien, chuchote Eberhard à son père.

  Il se doute que son père, comme eux tous d’ailleurs, a entendu « entier ».

  — Non, répond Albert. Puisque vous dites qu’il travaille dur.

  Roman les aide à charger leurs bagages sur le chariot, puis Magdalena s’assied avec les garçons à l’arrière, sur une malle où l’on a étalé une couverture. Roman monte et prend alors les rênes des mains d’Albert, installé à côté de lui.

  — Le trajet est long jusqu’à Chippewa Crossing. Ce soir, vous allez loger en ville, à l’hôtel, et demain, on ira chercher vot’matériel à l’épicerie de Fishbach avant de s’mettre en route pour chez vous. Faudra qu’on trouve des arceaux et d’la toile pour monter une tente à l’arrière du chariot ; comme ça, vous pourrez dormir dessous pendant qu’on construira le chalet.

  Leur terrain de quarante acres comprend une clairière naturelle au sommet d’une pente qui descend jusqu’à la rive de la Chippewa. Les garçons sont fascinés par l’Indien dont le nom, chose surprenante, est européen : Jacob Bleu. En revanche, ils sont déçus de constater que Jacob ne porte pas la tenue d’Indien qu’ils avaient imaginée : coiffe en plumes, vêtements ornés de perles et mocassins. L’autre homme s’appelle Eddie Charbonneau. Frank et Eberhard regardent les ouvriers arpenter la clairière pour décider à quel endroit creuser le puits et où précisément construire ensuite le chalet, à proximité.

  — Va falloir que vous trouviez du matériel de forage en ville, dit Jacob, à cause de la roche.

  Après cela, il ne dit presque plus rien. Les hommes travaillent dans un silence quasi total. Ils commencent par abattre des pins rouges et des pins blancs, q
u’ils ont entaillés à l’avance, puis ils les débitent en tronçons.

  Il faut un mois pour construire la maison et la cabane des toilettes. Albert paie les hommes afin qu’ils restent bâtir une écurie provisoire pour les chevaux et la vache, en attendant de pouvoir édifier une vraie grange l’été suivant. Ils construisent aussi un poulailler et une glacière.

  Un jour qu’elle cuisine dehors, sur un four à bois, Magdalena s’inquiète ; elle jette de temps à autre un coup d’œil aux arbres qui bordent le fleuve.

  — On nous surveille, dit-elle en tendant à Roman une tasse d’eau prise au nouveau puits.

  La joue gonflée par une chique, Roman boit, puis il s’essuie la bouche :

  — Possible, répond-il. Pas de quoi s’inquiéter. Ça doit être des enfants de Fox Lake – la réserve qui se trouve à environ deux milles, p’êt’ bien trois.

  Il crache alors un long filet de salive foncée dans l’herbe.

  — Jacob vit à Fox Lake ? demande Magdalena.

  — Non. Il habite dans les terres basses. Il parle un peu français, faut dire qu’il connaît bien les Blancs. On l’a envoyé à l’école, si ma mémoire est bonne. Sa femme aussi est métisse. C’est une Cadotte de La Pointe, la principale ville de Madeline Island. Dieu merci, au boulot, il connaît pas l’heure indienne. L’heure indienne, elle vous rendra dingue si vous vous y faites pas.

  — Il ne parle pas beaucoup.

  — Exact. Mais fichtre, c’est un des meilleurs charpentiers que j’connaisse.

  Les hommes ont travaillé dur et, le dernier jour, Albert les paie grassement. Quant à Magdalena, elle leur dit de passer les voir quand ils pourront. Leur compagnie leur manquera, aussi rude soit-elle. Après leur départ, elle va au poulailler pour vérifier les installations qu’ils ont achetées en ville quelques jours plus tôt. Lorsqu’elle en sort, elle découvre Jacob devant la porte.

  — Votre mari m’a dit que vous parliez français, lui demande-t-il.

  — Oui. Et vous* ?

  — Seulement un peu. Mais ma femme, oui. Elle est originaire de Madeline Island et la langue de son enfance lui manque. Est-ce que vous voudriez bien aller lui rendre visite, pour parler français ? Moi, je suis toujours au loin, je travaille comme bûcheron. Ça, c’est le premier travail que j’ai près de chez moi depuis bien longtemps.

  Sa requête n’est pas celle d’un humble ni d’un arrogant. Magdalena voit qu’il est fier, en plus d’être réservé. Cette réserve, à ce qu’elle ressent, n’est pas naturelle mais entretenue : un moyen pour lui de garder les gens à distance.

  — Je serais heureuse d’aller rendre visite à votre femme.

  — Si vous avez un bout de papier, je vais vous dessiner un plan pour venir chez nous. Ce n’est pas si loin que ça, une fois que vous connaissez le trajet. Vous pensez passer dans combien de temps ?

  — Dans quelques jours, vendredi.

  Une semaine s’est à peine écoulée qu’ils reçoivent une lettre d’Aino et de Kyle. En septembre, la famille commence à assister à la messe du dimanche. Albert et Magdalena pourraient tolérer les diatribes moralisatrices et peu savantes du père Fitzgerald, vieux prêtre revêche, puisqu’ils ne les entendent qu’une fois par semaine. Mais ce qu’ils ne sauraient supporter, en revanche, ce sont les coups de baguette que reçoivent leurs deux fils à l’école dès qu’ils sont surpris à parler allemand. Un dimanche après la messe, ils décident d’aller voir le prêtre.

  — Ils ne parlent pas allemand en classe, dit Albert. Seulement entre eux à la récréation. Comme le font certains parmi les autres enfants allemands.

  — C’est ce que vous racontent vos fils ?

  Cette réponse met Albert en rage :

  — Vous voulez dire que nos enfants sont des menteurs ?

  — Les parents ne connaissent pas leurs enfants aussi bien qu’ils le croient. Certains enfants, dit-il en regardant Magdalena, ne peuvent pas s’empêcher de mentir. Les juifs, par exemple. Ça leur vient naturellement et on doit leur en faire perdre l’habitude.

  Il se dresse de toute sa hauteur et adresse à Magdalena un de ces regards par lesquels il a coutume de réduire ses paroissiennes au silence.

  — C’est du blasphème, répond-elle. Le Christ était juif, de même que sa mère. Je crois que vous faites exprès de confondre liberté d’expression et fourberie.

  Le prêtre devient cramoisi. Sur son visage, des petits vaisseaux sanguins dilatés ressemblent à un défilé de fourmis parcourant son nez et ses joues.

  — Ce n’est pas vous qui allez me dire ce qui relève du blasphème !

  — Cette conversation n’est à l’évidence d’aucune utilité, intervient Albert. Nous retirons nos enfants de cette école. Mon épouse et moi-même les instruirons chez nous. Au revoir.

  — Ils seront alors précipités dans l’ignorance ! crie le prêtre alors qu’ils s’éloignent.

  Magdalena se retourne.

  — J’en doute fort. C’est vous qui êtes ignorant. Damnant quod non intelligent1.

  Le vieux prêtre la regarde fixement. Elle suit exactement ce qu’il se dit comme si elle lisait dans ses pensées. « La juive parle latin. » Il se signe d’une main tremblante.

  Ils sont soulagés à présent de disposer de leurs dimanches, car durant la semaine, chaque instant de veille est consacré à déboiser le reste de leur terrain et à se préparer en vue de l’hiver qui approche. Sauf l’unique jour de la semaine où Magdalena va voir Marie Bleu. Marie est moins taciturne que Jacob ; en revanche, elle parle un mauvais français.

  — Vous français aussi* ? lui a demandé Marie lors de la première visite.

  Ce n’était pas une question trahissant des soupçons, un jugement ni des intentions cachées. Il s’agissait seulement de se reconnaître, d’établir un lien. Les origines de Marie Bleu se lisent en filigrane sur ses traits : l’héritage de sang indien est plus prononcé dans la couleur de sa peau, alors que le français est plus visible dans ses os délicats. Oui, Magdalena aurait-elle voulu répondre, je suis française*. Ce serait si simple d’avoir une seule origine.

  — Eh non. Ma mère était roumaine et mon père, allemand*.

  Elle était contente de pouvoir dire la vérité sans crainte des préjugés. Mais parfois, le français du Nouveau Monde que parle Marie Bleu est difficile à saisir. Il faut bien trois visites à Magdalena pour se familiariser avec les expressions qu’utilise sa nouvelle amie dans son jargon.

  Lorsqu’ils vont en ville récupérer leur courrier et leurs provisions à l’épicerie de Fishbach, ils achètent le Milwaukee Journal, quotidien de l’État du Wisconsin, mais ils ont rarement le temps de le lire. Qu’elles concernent la vie publique ou leur sphère privée, les nouvelles dont ils ont connaissance leur parviennent par l’intermédiaire des lettres de Raymond ou des parents de Magdalena. Ainsi, Frau Richter leur apprend que deux des sœurs cadettes de Magdalena ont été admises à l’université de Tübingen et qu’elles vont commencer leurs études à l’automne. Parallèlement, Herr Richter évoque la démission à laquelle le Kaiser a contraint Delcassé, le ministre français des Affaires étrangères. Ils apprennent par Raymond l’existence du traité de Portsmouth, qui met un terme à la guerre russo-japonaise. Ils connaissaient déjà le Dimanche rouge – la révolte des ouvriers russes en janvier 1905 et ses conséquences fatales. Et, au début du mois de novembre, Herr Richter leur écrit qu’une nouvelle insurrection ouvrière a éclaté dans la ville de Saint-Pétersbourg.

  « Marx avait prédit cette révolution et il avait ajouté qu’elle viendrait de l’intérieur de la Russie. Ce n’est que le début. »

  Deux jours plus tard, Magdalena reçoit une lettre de sa mère, qui lui est destinée personnellement.

  « Au dire d’Ernst, Otto sait que Raimund – ainsi qu’Albert et toi, d’après lui – vit à Minneapolis. Je doute qu’il puisse faire grand-chose de ces renseignements, mais cela nous a néanmoins troublés. Ce sont sa nature obsessionnelle et sa haine qui nous dérangent. J’en ai parlé à sœur Hildegarde. S’agissant d’Otto, elle ne pe
ut rien faire, mais elle se tient au courant de ses faits et gestes à Augsbourg. Ce qu’elle entend dire et ce qu’elle sait est étonnant. Le cloître n’est pas si fermé, après tout. Nous sommes vraiment soulagés que vous soyez dans le nord du Wisconsin, mais il n’empêche que je m’inquiète pour Raimund. »

  Tout en repliant la lettre et en la glissant dans la poche de sa jupe, Magdalena se demande pourquoi Otto croit si important de recueillir des informations à leur sujet. Il ne peut rien faire, hormis quitter l’Allemagne pour venir les retrouver, et c’est une chose qu’il n’entreprendra jamais. Sœur Hildegarde doit certainement le savoir et elle s’inquiète néanmoins pour Raymond, elle aussi. Magdalena doute qu’Otto ait des amis aux États-Unis, étant donné ce qu’il pense des Allemands qui abandonnent leur patrie. D’ailleurs, même s’il en avait, aucun d’eux ne prendrait le temps de partir à la recherche de Raymond. Et en supposant qu’ils le fassent, une chose est sûre : ils ne passeraient pas inaperçus sur les Flats.

  Au début du mois de décembre lui parvient une lettre de Rose, sa sœur. Rose est éprise d’un étudiant du nom de David Katz et, à moins de complications dues à leurs religions respectives, elle espère l’épouser au printemps 1907.

  Puis, un matin de la mi-décembre, Magdalena se réveille avec une drôle de sensation : elle ne supporte même pas le contact d’une chemise toute légère contre ses seins. Au bout de quelques instants, elle prend conscience qu’elle n’a pas eu ses règles depuis trois mois. Elle fait le calcul : le bébé va naître fin mai ou début juin. À l’annonce de cette nouvelle, Albert est transporté de joie.

 

‹ Prev