Robur-le-Conquerant
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Une pareille proposition ne pouvait être qu'ironiquement faite par l'ingénieur.
« Mais, reprit-il, ce serait dangereux pour des étrangers, au milieu des Nègres, des Berbères, des Foullanes et des Arabes qui l'occupent - surtout si j'ajoute que notre arrivée en aéronef pourrait bien leur déplaire.
- Monsieur, répondit Phil Evans sur le même ton, pour avoir le plaisir de vous quitter, nous risquerions volontiers d'être mal reçus de ces indigènes. Prison pour prison, mieux vaut Tombouctou que l' Albatros!
- Cela dépend des goûts, répliqua l'ingénieur. En tout cas, je ne tenterai pas l'aventure, car je réponds de la sécurité des hôtes qui me font l'honneur de voyager avec moi...
- Ainsi donc, ingénieur Robur, dit Uncle Prudent, dont l'indignation éclatait, vous ne vous contentez pas d'être notre geôlier? A l'attentat vous joignez l'insulte?
- Oh! l'ironie tout au plus!
- N'y a-t-il donc pas d'armes à bord?
- Si, tout un arsenal!
- Deux revolvers suffiraient si j'en tenais un, monsieur, et si vous teniez l'autre!
- Un duel! s'écria Robur, un duel, qui pourrait amener la mort de l'un de nous!
- Qui l'amènerait certainement!
- Eh bien, non, président du Weldon-Institute! Je préfère de beaucoup vous garder vivant!
- Pour être plus sûr de vivre vous-même! Cela est sage!
- Sage ou non, c'est ce qui me convient. Libre à vous de penser autrement et de vous plaindre à qui de droit, si vous le pouvez.
- C'est fait, ingénieur Robur!
- Vraiment?
- Etait-il donc si difficile, lorsque nous traversions les parties habitées de l'Europe, de laisser tomber un document...
- Vous auriez fait cela? dit Robur, emporté par un irrésistible mouvement de colère.
- Et si nous l'avions fait?
- Si vous l'aviez fait... vous mériteriez...
- Quoi donc, monsieur l'ingénieur?
- D'aller rejoindre votre document par-dessus le bord!
- Jetez-nous donc! s'écria Uncle Prudent. Nous l'avons fait! »
Robur s'avança sur les deux collègues. A un geste de lui, Tom Turner et quelques-uns de ses camarades étaient accourus. Oui! l'ingénieur eut une furieuse envie de mettre sa menace à exécution, et, sans doute, de peur d'y succomber, il rentra précipitamment dans sa cabine.
« Bien! dit Phil Evans.
- Et ce qu'il n'a pas osé faire, répondit Uncle Prudent, je l'oserai, moi! Oui! je le ferai! »
En ce moment, la population de Tombouctou s'amassait au milieu des places, à travers les rues, sur les terrasses des maisons bâties en amphithéâtre. Dans les riches quartiers de Sankore et de Sarahama, comme dans les misérables huttes coniques du Raguidi, les prêtres lançaient du haut des minarets leurs plus violentes malédictions contre le monstre aérien. C'était plus inoffensif que des balles de fusils.
Il n'était pas jusqu'au port de Kabara, situé dans le coude du Niger, où le personnel des flottilles ne fût en mouvement. Certes, si l'Albatros eût pris terre, il aurait été mis en pièces.
Pendant quelques kilomètres, des bandes criardes de cigognes, de francolins et d'ibis l'escortèrent en luttant de vitesse avec lui; mais son vol rapide les eut bientôt distancés.
Le soir venu, l'air fut troublé par le mugissement de nombreux troupeaux d'éléphants et de buffles, qui parcouraient ce territoire, dont la fécondité est vraiment merveilleuse.
Durant vingt-quatre heures, toute la région, renfermée entre le méridien zéro et le deuxième degré dans le crochet du Niger, se déroula sous l'Albatros.
En vérité, si quelque géographe avait eu à sa disposition un semblable appareil, avec quelle facilité il aurait pu faire le levé topographique de ce pays, obtenir des cotes d'altitude, fixer le cours des fleuves et de leurs affluents, déterminer la position des villes et des villages! Alors, plus de ces grands vides sur les cartes de l'Afrique centrale, plus de blancs à teintes pâles, à lignes de pointillé, plus de ces désignations vagues, qui font le désespoir des cartographes!
Le ii, dans la matinée, l'Albatros dépassa les montagnes de la Guinée septentrionale, resserrée entre le Soudan et le golfe qui porte son nom. A l'horizon se profilaient confusément les monts Kong du royaume de Dahomey.
Depuis le départ de Tombouctou, Uncle Prudent et Phil Evans avaient pu constater que la direction avait toujours été du nord au sud. De là, cette conclusion que, si elle ne se modifiait pas, ils rencontreraient, six degrés au-delà, la ligne équinoxiale. L' Albatros allait-il donc encore abandonner les continents et se lancer, non plus sur une mer de Behring, une mer Caspienne, une mer du Nord ou une Méditerranée, mais au-dessus de l'océan Atlantique?
Cette perspective n'était pas pour apaiser les deux collègues, dont les chances de fuite deviendraient nulles alors.
Cependant l'Albatros faisait petite route, comme s'il hésitait au moment de quitter la terre africaine. Est-ce que l'ingénieur songeait à revenir en arrière? Non! Mais son attention était particulièrement attirée sur ce pays qu'il traversait alors.
On sait - et il le savait aussi -ce qu'est le royaume du Dahomey, l'un des plus puissants du littoral ouest de l'Afrique. Assez fort pour avoir pu lutter avec son voisin, le royaume des Aschantis, ses limites sont restreintes cependant, puisqu'il ne compte que cent vingt lieues du sud au nord et soixante de l'est à l'ouest; mais sa population comprend de sept à huit cent mille habitants, depuis qu'il s'est adjoint les territoires indépendants d'Ardrah et de Wydah.
S'il n'est pas grand, ce royaume de Dahomey, il a souvent fait parler de lui. Il est célèbre par les cruautés effroyables qui marquent ses fêtes annuelles, par ses sacrifices humains, épouvantables hécatombes, destinées à honorer le souverain qui s'en va et le souverain qui le remplace. Il est même de bonne politesse, lorsque le roi de Dahomey reçoit la visite de quelque haut personnage ou d'un ambassadeur étranger, qu'il lui fasse la surprise d'une douzaine de têtes coupées en son honneur, - et coupées par le ministre de la Justice, le « minghan », qui s'acquitte à merveille de ces fonctions de bourreau.
Or, à l'époque où l'Albatros passait la frontière du Dahomey, le souverain Bâhadou venait de mourir, et toute la population allait procéder à l'intronisation de son successeur. De là, un grand mouvement dans tout le pays, mouvement qui n'avait pas échappé à Robur.
En effet, de longues files de Dahomiens des campagnes se dirigeaient alors vers Abomey, la capitale du royaume. Routes bien entretenues, qui rayonnent entre de vastes plaines couvertes d'herbes géantes, immenses champs de manioc, forêts magnifiques de palmiers, de cocotiers, de mimosas, d'orangers, de manguiers, tel était le pays, dont les parfums montaient jusqu'à l'Albatros, tandis que, par milliers, perruches et cardinaux s'envolaient de toute cette verdure.
L'ingénieur, penché au-dessus de la rambarde, absorbé dans ses réflexions, n'échangeait que peu de mots avec Tom Turner.
Il ne semblait pas, d'ailleurs, que l'Albatros eût le privilège d'attirer l'attention de ces masses mouvantes, le plus souvent invisibles sous le dôme impénétrable des arbres. Cela venait, sans doute, de ce qu'il se tenait à une assez grande altitude au milieu de légers nuages.
Vers onze heures du matin, la capitale apparut dans sa ceinture de murailles, défendue par un fossé mesurant douze milles de tour, rues larges et régulièrement tracées sur un sol plat, grande place dont le côté nord est occupé par le palais du roi. Ce vaste ensemble de constructions est dominé par une terrasse, non loin de la case des sacrifices. Pendant les jours de fête, c'est du haut de cette terrasse qu'on jette au peuple des prisonniers attachés dans des corbeilles d'osier, et on s'imaginerait malaisément avec quelle furie ces malheureux sont mis en pièces.
Dans une partie des cours qui divisent le palais du souverain, sont logées quatre mille guerrières, un des contingents de l'armée royale, -non le moins courageux.
S'il est contestable qu'il y ait des Amazones sur le fleuve de ce nom, ce n'est plus douteux au D
ahomey. Les unes portent la chemise bleue, l'écharpe bleue ou rouge, le caleçon blanc rayé de bleu, la calotte blanche, la cartouchière attachée à la ceinture; les autres, chasseresses d'éléphants, sont armées de la lourde carabine, du poignard à lame courte, et de deux cornes d'antilope fixées à leur tête par un cercle de fer; celles-ci, les artilleuses, ont la tunique mi-partie bleue et rouge, et pour arme le tromblon, avec de vieux canons de fonte; celles-là, enfin, bataillon de jeunes filles, à tuniques bleues, à culottes blanches, sont de véritables vestales, pures comme Diane, et, comme elle, armées d'arcs et de flèches.
Qu'on ajoute à ces Amazones cinq à six mille hommes en caleçons, en chemises de cotonnade, avec une étoffe nouée à la taille, et on aura passé en revue l'armée dahomienne.
Abomey était, ce jour-là, absolument déserte. Le souverain, le personnel royal, l'armée masculine et féminine, la population, avaient quitté la capitale pour envahir, à quelques milles de là, une vaste plaine entourée de bois magnifiques.
C'est sur cette plaine que devait s'accomplir la reconnaissance du nouveau roi. C'est là que des milliers de prisonniers, faits dans les dernières razzias, allaient être immolés en son honneur.
Il était deux heures environ, lorsque l'Albatros, arrivé au-dessus de la plaine commença à descendre au milieu de quelques vapeurs qui le dérobaient encore aux yeux des Dahomiens.
Ils étaient là soixante mille, au moins, venus de tous les points du royaume, de Widah, de Kerapay, d'Ardrah, de Tombory, des villages les plus éloignés.
Le nouveau roi - un vigoureux gaillard, nommé Bou-Nadi -, âgé de vingt-cinq ans, occupait un tertre ombragé d'un groupe d'arbres à large ramure. Devant lui se pressait sa nouvelle cour, son armée mâle, ses amazones, tout son peuple.
Au pied du tertre, une cinquantaine de musiciens jouaient de leurs instruments barbares, défenses d'éléphants qui rendent un son rauque, tambours tendus d'une peau de biche, calebasses, guitares, clochettes frappées d'une languette de fer, flûtes de bambou dont l'aigre sifflet dominait tout l'ensemble. Puis, à chaque instant, décharges de fusils et de tromblons, décharges des canons dont les affûts tressautaient au risque d'écraser les artilleuses, enfin brouhaha général et clameurs si intenses qu'elles auraient dominé les éclats de la foudre.
Dans un coin de la plaine, sous la garde des soldats, étaient entassés les captifs chargés d'accompagner dans l'autre monde le roi défunt, auquel la mort ne doit rien faire perdre des privilèges de la souveraineté. Aux obsèques de Ghozo, père de Bâhadou, son fils lui en avait envoyé trois mille. Bou-Nadi rie pouvait faire moins pour son prédécesseur. Ne faut-il pas de nombreux messagers pour rassembler non seulement les Esprits, mais tous les hôtes du ciel, conviés à faire cortège au monarque divinisé?
Pendant une heure, il n'y eut que discours, harangues, palabres, coupés de danses exécutées, non seulement par les bayadères attitrées, mais aussi par les amazones qui y déployèrent une grâce toute belliqueuse.
Mais le moment de l'hécatombe approchait. Robur, qui connaissait les sanglantes coutumes du Dahomey, ne perdait pas de vue les captifs, hommes, femmes, enfants, réservés à cette boucherie.
Le minghan se tenait au pied du tertre. Il brandissait son sabre d'exécuteur à lame courbe, surmonté d'un oiseau de métal, dont le poids rend la volte plus assurée.
Cette fois, il n'était pas seul. Il n'aurait pu suffire à la besogne. Auprès de lui étaient groupés une centaine de bourreaux, habiles à trancher les têtes d'un seul coup. Cependant l'Albatros se rapprochait peu à peu, obliquement, en modérant ses hélices suspensives et propulsives. Bientôt il sortit de la couche des nuages qui le cachaient à moins de cent mètres de terre, et, pour la première fois, il apparut.
Contrairement à ce qui se passait d'habitude, ces féroces indigènes ne virent en lui qu'un être céleste descendu tout exprès pour rendre hommage au roi Bâhadou.
Alors enthousiasme indescriptible, appels interminables, supplications bruyantes, prières générales, adressées à ce surnaturel hippogriffe qui venait sans doute prendre le corps du roi défunt afin de le transporter dans les hauteurs du ciel dahomien.
En ce moment, la première tête vola sous le sabre du mînghan. Puis, d'autres prisonniers furent amenés par centaines devant leurs horribles bourreaux.
Soudain, un coup de fusil partit de l'Albatros. Le ministre de la Justice tomba, la face contre terre.
« Bien visé, Tom! dit Robur.
- Bah!... Dans le tas! » répondit le contremaître.
Ses camarades, armés comme lui, étaient prêts à tirer au premier signal de l'ingénieur.
Mais un revirement s'était fait dans la foule. Elle avait compris. Ce monstre ailé, ce n'était point un Esprit favorable, c'était un Esprit hostile à ce bon peuple du Dahomey. Aussi, après la chute du minghan, des cris de représailles s'élevèrent-ils de toutes parts. Presque aussitôt, une fusillade éclata au-dessus de la plaine.
Ces menaces n'empêchèrent pas l'Albatros de descendre audacieusement à moins de cent cinquante pieds du sol. Uncle Prudent et Phil Evans, quels que fussent leurs sentiments envers Robur, ne pouvaient que s'associer à une pareille uvre d'humanité.
« Oui! délivrons les prisonniers! s'écrièrent-ils.
- C'est mon intention! » répondit l'ingénieur. Et les fusils à répétition de l'Albatros, entre les mains des deux collègues comme entre les mains de l'équipage, commencèrent un feu de mousqueterie, dont pas une balle n'était perdue au milieu de cette masse humaine. Et même la petite pièce d'artillerie du bord, braquée sous son angle le plus fermé, envoya à propos quelques boîtes à mitraille qui firent merveille.
Aussitôt les prisonniers, sans rien comprendre à ce secours venu d'en haut, rompirent leurs liens, pendant que les soldats ripostaient aux feux de l'aéronef. L'hélice antérieure fut traversée d'une balle, tandis que quelques autres, projectiles l'atteignaient en pleine coque. Frycollin, caché au fond de sa cabine, faillit même être touché à travers la paroi du roufle.
« Ah! ils veulent en goûter! » s'écria Tom Turner.
Et, s'affalant dans la soute aux munitions, il revint avec une douzaine de cartouches de dynamite qu'il distribua à ses camarades. A un signe de Robur, ces cartouches furent lancées au-dessus du tertre, et, en heurtant le sol, elles éclatèrent comme de petits obus.
Quelle déroute du roi, de la cour, de l'armée, du peuple, en proie à une épouvante que ne justifiait que trop une pareille intervention! Tous avaient cherché refuge sous les arbres, pendant que les prisonniers s'enfuyaient, sans que personne songeât à les poursuivre.
Ainsi furent troublées les fêtes en l'honneur du nouveau roi de Dahomey. Ainsi Uncle Prudent et Phil Evans durent reconnaître de quelle puissance disposait un tel appareil, et quels services il pouvait rendre à l'humanité.
Ensuite, l'Albatros remonta tranquillement dans la zone moyenne; il passa au-dessus de Wydah, et il eut bientôt perdu de vue cette côte sauvage que les vents de sud-ouest entourent d'un inabordable ressac.
Il planait sur l'Atlantique.
XIII. Dans lequel Uncle Prudent et Phil Evans traversent tout un océan, sans avoir le mal de mer.
Oui, l'Atlantique! Les craintes des deux collègues s'étaient réalisées. Il ne semblait pas, d'ailleurs, que Robur éprouvât la moindre inquiétude à s'aventurer au-dessus de ce vaste Océan. Cela n'était pas pour le préoccuper, ni ses hommes, qui devaient avoir l'habitude de pareilles traversées. Déjà ils étaient tranquillement rentrés dans le poste. Aucun cauchemar ne dut troubler leur sommeil.
Où allait l'Albatros? Ainsi que l'avait dit l'ingénieur, devait-il donc faire plus que le tour du monde? En tout cas, il faudrait bien que ce voyage se terminât quelque part. Que Robur passât sa vie dans les airs, à bord de l'aéronef et n'atterrît jamais, cela n'était pas admissible. Comment eût-il pu renouveler ses approvisionnements en vivres et munitions, sans parler des substances nécessaires au fonctionnement des machines? Il fallait, de toute nécessité, qu'il eût une retraite, un port
de relâche, si l'on veut, en quelque endroit ignoré et inaccessible du globe, où l'Albatros pouvait se réapprovisionner. Qu'il eût rompu toute relation avec les habitants de la terre, soit! mais avec tout point de la surface terrestre, non!
S'il en était ainsi, où gisait ce point? Comment l'ingénieur avait-il été amené à le choisir? Y était-il attendu par une petite colonie dont il était le chef? Pouvait-il y recruter un nouveau personnel? Et d'abord, pourquoi ces gens, d'origines diverses, s'étaient-ils attachés à sa fortune? Puis, de quelles ressources disposait-il pour avoir pu fabriquer un aussi coûteux appareil, dont la construction avait été tenue si secrète? Il est vrai, son entretien ne semblait pas être dispendieux. A bord, on vivait d'une existence commune, d'une vie de famille, en gens heureux qui ne se cachaient pas de l'être. Mais enfin, quel était ce Robur? D'où venait-il? Quel avait été son passé? Autant d'énigmes impossibles à résoudre, et celui qui en était l'objet ne consentirait jamais, sans doute, à en donner le mot.
Qu'on ne s'étonne donc pas si cette situation, toute faite de problèmes insolubles, devait surexciter les deux collègues. Se sentir ainsi emportés dans l'inconnu, ne pas entrevoir l'issue d'une pareille aventure, douter même si jamais elle aurait une fin, être condamnés à l'aviation perpétuelle, n'y avait-il pas de quoi pousser à quelque extrémité terrible le président et le secrétaire du Weldon-Institute?
En attendant, depuis cette soirée du ii juillet, l'Albatros filait au-dessus de l'Atlantique. Le lendemain, lorsque le soleil apparut, il se leva sur cette ligne circulaire où viennent se confondre le ciel et l'eau. Pas une seule terre en vue, si vaste que fût le champ de vision. L'Afrique avait' disparu sous l'horizon du nord.
Lorsque Frycollin se fut hasardé hors de sa cabine, lorsqu'il vit toute cette mer au-dessous de lui, la peur le reprit au galop. Au-dessous n'est pas le mot juste, mieux vaudrait dire autour de lui, car, pour un observateur placé dans ces zones élevées, l'abîme semble l'entourer de toutes parts, et l'horizon, relevé à son niveau, semble reculer, sans qu'on puisse jamais en atteindre les bords.