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Complete Works of Gustave Flaubert

Page 346

by Gustave Flaubert


  Quelquefois les vieillards me regardaient avec envie, ils me disaient que j’étais heureux d’être jeune, que c’était là le bel âge, leurs yeux caves admiraient mon front blanc, ils se rappelaient leurs amours et me les contaient ; mais je me suis souvent demandé si, dans leur temps, la vie était plus belle, et comme je ne voyais rien en moi que l’on pût envier, j’étais jaloux de leurs regrets, parce qu’ils cachaient des bonheurs que je n’avais pas eus. Et puis c’étaient des faiblesses d’hommes en enfance à faire pitié ! je riais doucement et pour presque rien comme les convalescents. Quelquefois je me sentais pris de tendresse pour mon chien, et je l’embrassais avec ardeur ; ou bien j’allais dans une armoire revoir quelque vieil habit de collège, et je songeais à la journée où je l’avais étrenné, aux lieux où il avait été avec moi, et je me perdais en souvenirs sur tous mes jours vécus. Car les souvenirs sont doux, tristes ou gais, n’importe ! et les plus tristes sont encore les plus délectables pour nous, ne résument-ils pas l’infini ? l’on épuise quelquefois des siècles à songer à une certaine heure qui ne reviendra plus, qui a passé, qui est au néant pour toujours, et que l’on rachèterait par tout l’avenir.

  Mais ces souvenirs-là sont des flambeaux clairsemés dans une grande salle obscure, ils brillent au milieu des ténèbres ; il n’y a que dans leur rayonnement que l’on y voit, ce qui est plus près d’eux resplendit, tandis que tout le reste est plus noir, plus couvert d’ombres et d’ennui.

  Avant d’aller plus loin, il faut que je vous raconte ceci :

  Je ne me rappelle plus bien l’année, c’était pendant une vacance, je me suis réveillé de bonne humeur et j’ai regardé par la fenêtre. Le jour venait, la lune toute blanche remontait dans le ciel ; entre les gorges des collines, des vapeurs grises et rosées fumaient doucement et se perdaient dans l’air ; les poules de la basse-cour chantaient. J’ai entendu derrière la maison, dans le chemin qui conduit aux champs, une charrette passer, dont les roues claquaient dans les ornières, les faneurs allaient à l’ouvrage ; il y avait de la rosée sur la haie, le soleil brillait dessus, on sentait l’eau et l’herbe.

  Je suis sorti et je m’en suis allé à X… ; j’avais trois lieues à faire, je me suis mis en route, seul, sans bâton, sans chien. J’ai d’abord marché dans les sentiers qui serpentent entre les blés, j’ai passé sous des pommiers, au bord des haies ; je ne songeais plus à rien, j’écoutais le bruit de mes pas, la cadence de mes mouvements me berçait la pensée. J’étais libre, silencieux et calme, il faisait chaud ; de temps à autre je m’arrêtais, mes tempes battaient, le cri-cri chantait dans les chaumes, et je me remettais à marcher. J’ai passé dans un hameau où il n’y avait personne, les cours étaient silencieuses, c’était, je crois, un dimanche ; les vaches, assises dans l’herbe, à l’ombre des arbres, ruminaient tranquillement, remuant leurs oreilles pour chasser les moucherons. Je me souviens que j’ai marché dans un chemin où un ruisseau coulait sur les cailloux, des lézards verts et des insectes aux ailes d’or montaient lentement le long des rebords de la route, qui était enfoncée et toute couverte par le feuillage.

  Puis je me suis trouvé sur un plateau, dans un champ fauché ; j’avais la mer devant moi, elle était toute bleue, le soleil répandait dessus une profusion de perles lumineuses, des sillons de feu s’étendaient sur les flots ; entre le ciel azuré et la mer plus foncée, l’horizon rayonnait, flamboyait ; la voûte commençait sur ma tête et s’abaissait derrière les flots, qui remontaient vers elle, faisant comme le cercle d’un infini invisible. Je me suis couché dans un sillon et j’ai regardé le ciel, perdu dans la contemplation de sa beauté.

  Le champ où j’étais était un champ de blé, j’entendais les cailles, qui voltigeaient autour de moi et venaient s’abattre sur des mottes de terre ; la mer était douce, et murmurait plutôt comme un soupir que comme une voix ; le soleil lui-même semblait avoir son bruit, il inondait tout, ses rayons me brûlaient les membres, la terre me renvoyait sa chaleur, j’étais noyé dans sa lumière, je fermais les yeux et je la voyais encore. L’odeur des vagues montait jusqu’à moi, avec la senteur du varech et des plantes marines ; quelquefois elles paraissaient s’arrêter ou venaient mourir sans bruit sur le rivage festonné d’écume, comme une lèvre dont le baiser ne sonne point. Alors, dans le silence de deux vagues, pendant que l’Océan gonflé se taisait, j’écoutais le chant des cailles, et après, celui des oiseaux.

  Je suis descendu en courant au bord de la mer, à travers les terrains éboulés que je sautais d’un pied sûr, je levais la tête avec orgueil, je respirais fièrement la brise fraîche, qui séchait mes cheveux en sueur ; l’esprit de Dieu me remplissait, je me sentais le cœur grand, j’adorais quelque chose d’un étrange mouvement, j’aurais voulu m’absorber dans la lumière du soleil et me perdre dans cette immensité d’azur, avec l’odeur qui s’élevait de la surface des flots ; et je fus pris alors d’une joie insensée, et je me mis à marcher comme si tout le bonheur des cieux m’était entré dans l’âme. Comme la falaise s’avançait en cet endroit là, toute la côte disparut et je ne vis plus rien que la mer : les lames montaient sur le galet jusqu’à mes pieds, elles écumaient sur les rochers à fleur d’eau, les battaient en cadence, les enlaçaient comme des bras liquides et des nappes limpides, en retombant illuminées d’une couleur bleue ; le vent soulevait les mousses autour de moi et ridait les flaques d’eau restées dans le creux des pierres, les varechs pleuraient et se berçaient, encore agités du mouvement de la vague qui les avait quittés ; de temps à autre une mouette passait avec de grands battements d’ailes, et montait jusqu’au haut de la falaise. À mesure que la mer se retirait, et que son bruit s’éloignait ainsi qu’un refrain qui expire, le rivage s’avançait vers moi, laissant à découvert sur le sable les sillons que la vague avait tracés. Et je compris alors tout le bonheur de la création et toute la joie que Dieu y a placée pour l’homme ; la nature m’apparut belle comme une harmonie complète, que l’extase seule doit entendre ; quelque chose de tendre comme un amour et de pur comme la prière s’éleva pour moi du fond de l’horizon, s’abattit de la cime des rocs déchirés, du haut des cieux ; il se forma, du bruit de l’Océan, de la lumière du jour, quelque chose d’exquis que je m’appropriai comme d’un domaine céleste, je m’y sentis vivre heureux et grand, comme l’aigle qui regarde le soleil et monte dans ses rayons.

  Alors tout me sembla beau sur la terre, je n’y vis plus de disparate ni de mauvais ; j’aimai tout, jusqu’aux pierres qui me fatiguaient les pieds, jusqu’aux rochers durs où j’appuyais les mains, jusqu’à cette nature insensible que je supposais m’entendre et m’aimer, et je songeai alors combien il était doux de chanter, le soir, à genoux, des cantiques au pied d’une madone qui brille aux candélabres, et d’aimer la Vierge Marie, qui apparaît aux marins, dans un coin du ciel, tenant le doux Enfant Jésus dans ses bras.

  Puis ce fut tout ; bien vite je me rappelai que je vivais, je revins à moi, je me mis en marche, sentant que la malédiction me reprenait, que je rentrais dans l’humanité ; la vie m’était revenue, comme aux membres gelés, par le sentiment de la souffrance, et de même que j’avais un inconcevable bonheur, je tombai dans un découragement sans nom, et j’allai à X…

  Je revins le soir chez nous, je repassai par les mêmes chemins, je revis sur le sable la trace de mes pieds et dans l’herbe la place où je m’étais couché, il me sembla que j’avais rêvé. Il y a des jours où l’on a vécu deux existences, la seconde n’est déjà plus que le souvenir de la première, et je m’arrêtais souvent dans mon chemin devant un buisson, devant un arbre, au coin d’une route, comme si là, le matin, il s’était passé quelque événement de ma vie.

  Quand j’arrivais à la maison, il faisait presque nuit, on avait fermé les portes, et les chiens se mirent à aboyer.

  Les idées de volupté et d’amour qui m’avaient assailli à 15 ans vinrent me retrouver à 18. Si vous avez compris quelque chose à ce qui précède, vous devez vous rappeler qu’à cet âge-là j’étais encore vierge et n’avais point ai
mé : pour ce qui était de la beauté des passions et de leurs bruits sonores, les poètes me fournissaient des thèmes à ma rêverie ; quant au plaisir des sens, à ces joies du corps que les adolescents convoitent, j’en entretenais dans mon cœur le désir incessant, par toutes les excitations volontaires de l’esprit ; de même que les amoureux envient de venir au bout de leur amour en s’y livrant sans cesse, et de s’en débarrasser à force d’y songer, il me semblait que ma pensée seule finirait par tarir ce sujet-là, d’elle-même, et par vider la tentation à force d’y boire. Mais, revenant toujours au point d’où j’étais parti, je tournais dans un cercle infranchissable, je m’y heurtais en vain la tête, désireux d’être plus au large ; la nuit, sans doute, je rêvais des plus belles choses qu’on rêve, car, le matin, j’avais le cœur plein de sourires et de serrements délicieux, le réveil me chagrinait et j’attendais avec impatience le retour du sommeil pour qu’il me donnât de nouveau ces frémissements auxquels je pensais toute la journée, qu’il n’eût tenu qu’à moi d’avoir à l’instant, et dont j’éprouvais comme une épouvante religieuse.

  C’est alors que je sentis bien le démon de la chair vivre dans tous les muscles de mon corps, courir dans tout mon sang ; je pris en pitié l’époque ingénue où je tremblais sous le regard des femmes, où je me pâmais devant des tableaux ou des statues ; je voulais vivre, jouir, aimer, je sentais vaguement ma saison chaude arriver, de même qu’aux premiers jours de soleil une ardeur d’été vous est apportée par les vents tièdes, quoiqu’il n’y ait encore ni herbes, ni feuilles, ni roses. Comment faire ? qui aimer ? qui vous aimera ? quelle sera la grande dame qui voudra de vous ? la beauté surhumaine qui vous tendra les bras ? Qui dira toutes les promenades tristes que l’on fait seul au bord des ruisseaux, tous les soupirs des cœurs gonflés partis vers les étoiles, pendant les chaudes nuits où la poitrine étouffe !

  Rêver l’amour, c’est tout rêver, c’est l’infini dans le bonheur, c’est le mystère dans la joie. Avec quelle ardeur le regard vous dévore, avec quelle intensité il se darde sur vos têtes, ô belles femmes triomphantes ! La grâce et la corruption respirent dans chacun de vos mouvements, les plis de vos robes ont des bruits qui nous remuent jusqu’au fond de nous, et il émane de la surface de tout votre corps quelque chose qui nous tue et qui nous enchante.

  Il y eut dès lors pour moi un mot qui sembla beau entre les mots humains : adultère, une douceur exquise plane vaguement sur lui, une magie singulière l’embaume ; toutes les histoires qu’on raconte, tous les livres qu’on lit, tous les gestes qu’on fait nous le disent et le commentent éternellement pour le cœur du jeune homme, il s’en abreuve à plaisir, il y trouve une poésie suprême, mêlée de malédiction et de volupté.

  C’était surtout aux approches du printemps, quand les lilas commencent à fleurir et les oiseaux à chanter sous les premières feuilles, que je me sentais pris du besoin d’aimer, de se fondre tout entier dans l’amour, de s’absorber dans quelque doux et grand sentiment, et comme de se recréer même dans la lumière et les parfums. Chaque année encore, pendant quelques heures, je me retrouve ainsi dans une virginité qui me pousse avec les bourgeons ; mais les joies ne refleurissent pas avec les roses, et il n’y a pas maintenant plus de verdure dans mon cœur que sur la grande route, où le hâle fatigue les yeux, où la poussière s’élève en tourbillons.

  Cependant, prêt à vous raconter ce qui va suivre, au moment de descendre dans ce souvenir, je tremble et j’hésite ; c’est comme si j’allais revoir une maîtresse d’autrefois : le cœur oppressé, on s’arrête à chaque marche de son escalier, on craint de la retrouver, et on a peur qu’elle soit absente. Il en est de même de certaines idées avec lesquelles on a trop vécu ; on voudrait s’en débarrasser pour toujours, et pourtant elles coulent dans vous comme la vie même, le cœur y respire dans son atmosphère naturelle.

  Je vous ai dit que j’aimais le soleil ; dans les jours où il brille, mon âme naguère avait quelque chose de la sérénité des horizons rayonnants et de la hauteur du ciel. C’était donc l’été… ah ! la plume ne devrait pas écrire tout cela… il faisait chaud, je sortis, personne chez moi ne s’aperçut que je sortais ; il y avait peu de monde dans les rues, le pavé était sec, de temps à autre des bouffées chaudes s’exhalaient de dessous terre et vous montaient à la tête, les murs des maisons envoyaient des réflexions embrasées, l’ombre elle-même semblait plus brûlante que la lumière. Au coin des rues, près des tas d’ordures, des essaims de mouche bourdonnaient dans les rayons du soleil, en tournoyant comme une grande roue d’or ; l’angle des toits se détachait vivement en ligne droite sur le bleu du ciel, les pierres étaient noires, il n’y avait pas d’oiseaux autour des clochers.

  Je marchais, cherchant du repos, désirant une brise, quelque chose qui pût m’enlever de dessus terre, m’emporter dans un tourbillon. Je sortis des faubourgs, je me trouvais derrière des jardins, dans des chemins moitié rue moitié sentier ; des jours vifs sortaient çà et là à travers les feuilles des arbres, dans les masses d’ombre les brins d’herbe se tenaient droits, la pointe des cailloux envoyait des rayons, la poussière craquait sous les pieds, toute la nature mordait et enfin le soleil se cacha ; il parut un gros nuage, comme si orage allait venir ; la tourmente, que j’avais sentie jusque-là, changea de nature, je n’étais plus si irrité, mais enlacé ; ce n’était plus une déchirure, mais un étouffement.

  Je me couchai à terre, sur le ventre, à l’endroit où il me semblait qu’il devait y avoir le plus d’ombre, de silence et de nuit, à l’endroit qui devait me cacher le mieux, et, haletant, je m’y abîmais le cœur dans un désir effréné. Les nuées étaient chargées de mollesse, elles pesaient sur moi et m’écrasaient comme une poitrine sur une autre poitrine ; je sentais un besoin de volupté, plus chargé d’odeurs que le parfum des clématites et plus cuisant que le soleil sur le mur des jardins. Oh ! que ne pouvais-je presser quelque chose dans mes bras, l’y étouffer sous ma chaleur, ou bien me dédoubler moi-même, aimer cet autre être et nous fondre ensemble. Ce n’était plus le désir d’un vague idéal ni la convoitise d’un beau rêve évanoui, mais, comme aux fleuves sans lit, ma passion débordait de tous côtés en ravins furieux, elle m’inondait le cœur et le faisait retentir partout de plus de tumultes et de vertiges que les torrents dans les montagnes.

  J’allai au bord de la rivière, j’ai toujours aimé l’eau et le doux mouvement des vagues qui se poussent ; elle était paisible, les nénuphars blancs tremblaient au bruit du courant, les flots se déroulaient lentement, se déployant les uns sur les autres ; au milieu, les îles laissaient retomber dans l’eau leurs touffes de verdure, la rive semblait sourire, on n’entendait rien que la voix des ondes. En cet endroit-là il y avait quelques grands arbres, la fraîcheur du voisinage de l’eau et celle de l’ombre me délecta, je me sentis sourire. De même que la Muse qui est en nous, quand elle écoute l’harmonie, ouvre les narines et aspire les beaux sons, je ne sais quoi se dilata en moi-même pour aspirer une joie universelle ; regardant les nuages qui roulaient au ciel, la pelouse de la rive veloutée et jaunie par les rayons du soleil, écoutant le bruit de l’eau et le frémissement de la cime des arbres, qui remuait quoiqu’il n’y eût pas de vent, seul, agité et calme à la fois, je me sentis défaillir de volupté sous le poids de cette nature aimante, et j’appelai l’amour ! mes lèvres tremblaient, s’avançaient comme si j’eusse senti l’haleine d’une autre bouche, mes mains cherchaient quelque chose à palper, mes regards tâchaient de découvrir, dans le pli de chaque vague, dans le contour des nuages enflés, une forme quelconque, une jouissance, une révélation ; le désir sortait de tous mes pores, mon cœur était tendre et rempli d’une harmonie contenue, et je remuais les cheveux autour de ma tête, je m’en caressais le visage, j’avais du plaisir à en respirer l’odeur, je m’étalais sur la mousse, au pied des arbres, je souhaitais des langueurs plus grandes ; j’aurais voulu être brisé sous les baisers, être la fleur que le vent secoue, la rive que le fleuve humecte, la terre que le soleil féconde.

 
; L’herbe était douce à marcher, je marchai ; chaque pas me procurait un plaisir nouveau, et je jouissais par la plante des pieds de la douceur du gazon. Les prairies, au loin, étaient couvertes d’animaux, de chevaux, de poulains ; l’horizon retentissait du bruit des hennissements et de galops, les terrains s’abaissaient et s’élevaient doucement en de larges ondulations qui dérivaient des collines, le fleuve serpentait, disparaissait derrière les îles, apparaissait ensuite entre les herbes et les roseaux. Tout cela était beau, semblait heureux, suivait sa loi, son cours ; moi seul j’étais malade et j’agonisais, plein de désir.

  Tout à coup je me mis à fuir, je rentrai dans la ville, je traversai les ponts ; j’allais dans les rues, sur les places ; les femmes passaient près de moi, il y en avait beaucoup, elles marchaient vite, elles étaient toutes merveilleusement belles ; jamais je n’avais tant regardé en face leurs yeux qui brillent, ni leur démarche légère comme celle des chèvres ; les duchesses, penchées sur les portières blasonnées, semblaient me sourire, m’inviter à des amours sur la soie ; du haut de leur balcons, les dames en écharpe s’avançaient pour me voir et me regardaient en disant : aime-nous ! aime-nous ! Toutes m’aimaient dans leur pose, dans leurs yeux, dans leur immobilité même, je le voyais bien. Et puis la femme était partout, je la coudoyais, je l’effleurais, je la respirais, l’air était plein de son odeur ; je voyais son cou en sueur entre le châle qui les entourait, et les plumes du chapeau ondulant à son pas ; son talon relevait sa robe en marchant devant moi. Quand je passais près d’elle, sa main gantée remuait. Ni celle-ci, ni celle-là, pas plus l’une que l’autre, mais toutes, mais chacune, dans la variété infinie de leurs formes et du désir qui y correspondait, elles avaient beau être vêtues, je les décorais sur-le-champ d’une nudité magnifique, que je m’étalais sous les yeux, et, bien vite, en passant aussi près d’elles, j’emportais le plus que je pouvais d’idées voluptueuses, d’odeurs qui font tout aimer, de frôlements qui irritent, de formes qui attirent.

 

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