Ex in the City

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Ex in the City Page 8

by Wendy Markham


  — Si tu savais comme il me tarde de faire la connaissance de Jack ! dit Raphaël en plongeant d’un air gourmand une chips dans la sauce piquante.

  Je salive en le voyant croquer. Il mâche en reniflant. Il est très enrhumé depuis quelques jours. Il a toussé toute la nuit, mais quand je lui ai suggéré de remettre son rendez-vous de ce soir, il a pris un air horrifié comme si je lui avais suggéré d’entrer dans les ordres !

  — Oh, quel délice ! Tu devrais te laisser tenter, Tracey ! C'est frais, c’est exquis, miam !

  — Il est hors de question que tu fasses la connaissance de Jack, dis-je en attrapant le bol et en le déplaçant à l’autre bout de la table.

  — Comment ça ? Et pourquoi ?

  Je le regarde en silence. Aujourd’hui, il porte un chouchou léopard en guise de bracelet, une jupe-culotte en jean et des boots en cuir verni rouge à bout pointu.

  — Je ne sais pas pourquoi, mais je sens que tu pourrais l’effrayer, lui dis-je sans rire.

  — Peu importe, de toute façon, Carl ne va plus tarder à venir me chercher.

  — Carl vient ici ?

  — Je ne te l’avais pas dit ?

  — Non, je croyais que vous deviez vous retrouver au Boys Club.

  — Non, finalement, on a changé nos plans, dit-il en se mouchant pour la énième fois.

  Il remet son mouchoir dans sa manche en s’écriant :

  — Tiens, justement, le voilà !

  Je tourne la tête. Un grand type très baraqué, brun, supersapé en costume sombre attend dans la rue. Dites-moi que je rêve ! On dirait Batman !

  — Il est viril, hein, Tracey ? demande Raphaël d’une voix énamourée.

  — Il ne nous manquait plus que ça, dis-je à voix basse alors que Geri-Jerry dépose les verres sur notre table.

  Carl nous rejoint. J’avale une longue gorgée glacée sans tenir compte de mon estomac vide depuis ce matin.

  Le temps passe, nous papotons, nous buvons, ils mangent des chips. J’ai à peine fini mon verre que le second, offert par la maison celui-là, apparaît sur la table. Raphaël et Carl en sont à leur deuxième tournée — en une heure, ils ont bu quatre golden cadillac. Est-ce l’effet de l’alcool ? Je trouve que ce Carl est un mec plutôt sympa. La conversation roule sur un sujet inusable à New York, les histoires d’appartement.

  — Alors, il arrive quand, ton marin ? demande Carl en regardant sa montre.

  Qu’est-ce que c’est encore que ce plan ?

  — Et qui est ce marin que l’on attend ? je demande à Raphaël, m’attendant à voir débarquer un drag-queen déguisé en sirène.

  Il plonge son nez tout rouge dans une serviette en papier avant de la replier et de la glisser dans sa manche.

  — Je suppose qu’il veut parler de Jack.

  — Mon Jack ? Mais il n’est pas marin !

  — Ah, bon ? demande Carl, gêné.

  — Pas du tout ! Qui t’a raconté ça ?

  — Toi-même, répond Carl.

  — Jamais de la vie, j’ai dit qu’il était responsable du plan medias.

  — Faux. Tu as dit qu’il était marin dans la marine marchande, s’obstine Carl.

  Je me tourne vers Raphaël en quête d’un appui. Il acquiesce.

  — Désolé, tu l’as dit, Tracey.

  — Tu as bu quatre golden cadillac et avalé des tonnes de cachets contre le rhume, je doute que ton cerveau ait pu enregistrer la moindre information cohérente ! dis-je en protestant à Raphaël.

  Il rigole.

  — T’as pas tort.

  — Moi, je sais, dit Carl qui n’en démord pas. Tu as dit marin !

  Après tout, marin ou responsable de plan média, c’est un peu pareil, non ? Carl reprend :

  — Je n’ai jamais rencontré de marin.

  — On est deux, alors, lui dis-je, la voix un peu pâteuse.

  — Et il arrive à quelle heure ?

  Je me tourne vers Raphaël en faisant les gros yeux. Je tapote ma montre, l’air de rien.

  — Vous ne devez pas y aller, maintenant, les mecs ?

  — Ah, non, on attend le marin, insiste Raphaël.

  — Oui, c’est ça, on veut voir le marin, rugit le malabar abruti assis à côté de lui tout en reposant violemment son verre vide sur la table. Je veux le voir ! Il vient en uniforme ?

  Effondrée, je me tourne vers Raphaël. Il est hilare. Je sors fumer une cigarette dans la rue glaciale. A deux reprises, je crois reconnaître Will avec à son bras la ravissante Esme. Mais ce n’est pas eux. Je tente de sortir Will de ma tête et de me concentrer sur la soirée de ce soir. Mais où est Jack ? Il est en retard maintenant. Ça commence à m’énerver jusqu’à ce que j’aperçoive le large visage de Carl écrasé contre la vitre. Je suis heureuse que Jack ne soit pas encore arrivé, j’écrase ma cigarette et je rentre dans le bar, bien décidée à leur dire de s’en aller. Mais au moment où j’ouvre la bouche, Raphaël se met à éternuer. Dehors, derrière la vitre, une femme promène un caniche en laisse. Elle porte un de ces chapeaux en fourrure que l’on trouve en Russie.

  — Waouh ! je veux le même, se met à crier Carl en tapant sur la vitre pour attirer l’attention de la passante. Je suis sûr que ça m’irait très bien.

  — Mais bien sûr que ça t’irait bien, très bien même, répond Raphaël en toussant, quelqu’un a-t-il un mouchoir ?

  — Non, ça ne lui irait pas du tout, dis-je, il ressemblerait à l’Empire State Building avec un grand singe enroulé autour de sa flèche.

  — Vous ne seriez pas en train de vous foutre de moi par hasard ? demande Carl.

  — Moi ? Non.

  Je jette un regard assassin à Raphaël qui ne m’a même pas entendue, tant il est occupé à fouiller son sac pour trouver un mouchoir. Devant le raffut, le patron du bar arrive et nous demande de quitter les lieux. Carl refuse. Il veut parler. Il a des choses à dire. Notamment sur les marins et sur les chapeaux en fourrure. Il parle fort. Il dit qu’il a encore soif. Qu’on lui apporte un autre cocktail. Le patron du bar ne veut plus lui servir d’alcool. Carl proteste. Le patron lui demande de sortir. Mais Carl ne veut pas. Je regarde ma montre, puis Raphaël qui a une quinte de toux.

  — Fais quelque chose avant que cela ne dégénère, lui dis-je. Le patron va nous jeter dehors au moment où Jack va arriver. Tu imagines la honte !

  — Mais non, pas toi, répond-il. Il veut seulement que Carl sorte.

  Celui-ci vocifère contre le patron, l’accusant maintenant d’être homophobe et le menaçant de poursuites.

  — Raphaël, tu l’attrapes par la peau du dos et tu le sors d’ici immédiatement, dis-je entre mes dents.

  — Et comment ? Tu as une grue ?

  — Tu te débrouilles.

  Raphaël s’approche de Carl, lui dit quelque chose à l’oreille. L'autre s’arrête de crier, prend l’air intéressé et demande :

  — Quand ?

  — Tout de suite, répond Raphaël avec un clin d’œil.

  Il laisse deux billets de vingt dollars sur la table et passe son bras sous celui de King Kong. Ils partent tous les deux dans la nuit vers de nouvelles aventures dont je ne veux même pas imaginer le scénario. Sans m’en rendre compte, je vide la moitié de mon second verre de margarita, puis je le finis en m’apercevant que Jack a maintenant quarante-cinq minutes de retard. Ne serait-il pas par hasard en train de me poser un lapin ? Ce serait la première fois de ma vie. Même Will ne m’a jamais fait ce coup-là.

  — Tu en veux un autre ? me demande Jerry.

  Ce n’est pas raisonnable, mais que faire ? Partir ? Mais si Jack arrive cinq minutes après ? Je reste.

  Quinze minutes et la moitié de mon troisième margarita plus tard, il arrive enfin. Il est en jean avec des boots noirs, un pull noir à col roulé sous un caban bleu marine. Ses joues sont rouges à cause du froid et le vent l’a décoiffé.

  — Tracey ! Je suis supercontent que tu sois encore là. Excuse-moi, tu ne croiras jamais ce qui vient de m’arriver.

  Il se laisse tomber dans le fauteuil occupé quelques minutes
plus tôt par Carl, l’ouvrier du bâtiment homo et amateur de marins. Comme je ne suis pas du genre à faire la gueule, je lui souris et lui dis :

  — Raconte.

  Je le regarde alors qu’il se passe une main dans les cheveux pour tenter de se recoiffer. Il est supermignon. Je voudrais qu’il ne partage pas son appartement avec Mike, car malgré toutes mes bonnes résolutions, j’ai envie de passer la nuit avec lui. Une nuit. Rien qu’une. Cette nuit.

  Evidemment, on a la possibilité d’aller chez moi. Mais s’il vient chez moi, Mike saura que je couche avec un homme dès la première rencontre et je n’aurai pas ma promotion.

  Oui, enfin, peut-être que je mélange tout. Peut-on refuser une promotion à un de ses employés à cause du sexe ?

  Qui sait ? Et après tout ? Ce n’est pas si mal d’être assistante, me dis-je en le dévorant des yeux.

  — Je suis rentré chez moi à Brooklyn pour prendre une douche avant de venir.

  Je l’imagine tout nu sous la douche. Je vois ses muscles rouler sous sa peau, son corps plein de savon, la vapeur, et moi contre lui… Ignorant le film que je suis en train de me faire, Jack poursuit son explication.

  — J’allais chez moi lorsqu’une vieille dame m’a demandé son chemin pour aller à Grand Central. Comme c’était ma destination, je lui ai proposé de l’y accompagner.

  — C'est sympa de ta part.

  Il sourit et je revois ces deux adorables fossettes dont j’avais noté l’existence samedi soir.

  — Je suis sympa et de toute façon, c’est là que j’allais.

  — Ah, vous voilà enfin ! Elle commençait à s'inquiéter ! dit Jerry qui surgit soudain.

  — C'est vrai ? Tu croyais que je t’avais posé un lapin ?

  — Euh, non, pas vraiment… En fait, j’espérais que tu ne ferais pas cela.

  Il prend ma main dans la sienne.

  — Je ne le ferai pas.

  Nous nous sourions. Le temps s’arrête jusqu’à ce que Jerry intervienne de nouveau.

  — C'est pas plus mal que vous soyez arrivé en retard, parce que vous auriez vu ses copains ! Un poème !

  — Dis-moi, Jerry, tu ne devais pas m’apporter un autre margarita ? dis-je pour éviter qu’il/elle ne se lance dans une version trop colorée des aventures de Carl, l’insortable bûcheron gay égaré dans la jungle new-yorkaise.

  D’autant que je devine, juste au-dessus du rouge à lèvres rose fluo que porte Jerry, une ombre de moustache qui commence à devenir un peu trop visible. Je n’ai aucune envie de boire quoi que ce soit, mais puisque Jerry s’est donné la peine de me l’apporter et que le verre est sur la table, je le bois pendant que Jack boit une Dos Equis en finissant son histoire.

  — Alors, me voilà en train d’escorter cette vieille dame qui me dit s’appeler Henrietta jusqu’à Grand Central. Mais elle marchait à deux à l’heure et il y avait un monde fou.

  Il se lève pour mimer la vieille dame. Je craque complètement.

  — Ne ris pas, je suis sérieux. C'est alors que trois autres vieilles dames nous abordent et nous demandent si nous savons où est Grand Central. Elle répond : « Mais c’est là que nous allons, venez donc avec nous ! Je m’appelle Henrietta, mais vous pouvez m’appeler Henny, et voici Jack… »

  Il l’imite à la perfection, je ne peux plus m’arrêter de rire.

  — Me voilà avec quatre petites vieilles qui ne me lâchent pas d’une semelle. Je marche devant, elles me suivent à la queue leu leu, tu vois le tableau, dit-il en croquant dans une chips.

  — Je te pardonne. Tu t’es conduit en bon citoyen, dis-je en essuyant mes larmes de rire.

  — Ce n’est pas terminé ! Arrivées à Grand Central, elles étaient tellement déboussolées, que je leur ai proposé de les conduire à leur train. Nous nous apprêtons donc à descendre les marches vers les quais lorsque derrière nous, une voix nous appelle.

  Je suis suspendue à ses lèvres, mais je commence à me demander si c’est du lard ou du cochon. Nous sommes à New York, une ville où tout est possible. Jack poursuit :

  — Je me retourne, et je vois un type en fauteuil roulant en haut des marches. Il n’a ni bras ni jambes. Je remonte pour le chercher, je le dépose en bas des marches, puis je remonte chercher son fauteuil roulant. Enfin, j’installe les petites mamies dans leur train, puis je me rends compte que je n’ai plus qu’à foncer chez moi pour prendre une bonne douche, car le type était vraiment crade.

  — Tu es sérieux ?

  — Je t’assure que c’est vrai ! Une horreur !

  — Non, je ne parle pas du type, je parle des vieilles dames, et du fauteuil roulant. Tu as tout inventé ou c’est vrai ?

  — C'est du vécu ! Comment inventer un truc pareil ?

  Je sens une soudaine et terrible envie de faire pipi. Je lui demande de m’excuser un moment, il lève sa bière à ma santé alors que je me lève et que je me dirige vers les toilettes. A peine debout, je réalise le danger que représente toute cette tequila sur un estomac vide. Je ne suis pas bourrée. Je suis malade ! A peine enfermée dans les toilettes, les margaritas reprennent le chemin inverse de celui qu’ils ont pris quelques dizaines de minutes plus tôt. Bon, je sais, ce n’est pas très ragoûtant, mais j’avoue que je me sens mieux. Je me rafraîchis au lavabo, je prends une pastille dans mon sac et je me regarde dans la glace. Je suis pâle à faire peur, je n’ai plus de rouge à lèvres, mais à part ça, je suis canon. Et le contact passe plutôt bien avec Jack. Pourtant, le déroulement de la soirée est un peu bizarre. Carl, d’abord, et ce scandale, puis Jack qui arrive en retard, enfin, moi qui me retrouve malade dans les toilettes. Je devrais peut-être le lui dire et rentrer chez moi. De toute façon, je sais bien que rien de sérieux ne sortira de cette aventure, on ne tombe pas amoureux juste après une rupture douloureuse. Je reconnais que je suis mordue, il me plaît terriblement, mais ce n’est qu’un petit copain de passage. C'est un mirage. Ce n’est pas parce que je suis attirée par le premier mec venu et qu’il semble me correspondre complètement que cela signifie quelque chose. Buckley, lui aussi, semblait être fait pour moi. Mais quand je l’ai rencontré, j’étais encore avec Will et quand j’ai été libre, c’est lui qui ne l’était plus.

  Et s’il rompait avec elle ? Et si nous tombions amoureux l’un de l’autre ?

  Je souris à mon reflet dans la glace.

  Stop, Tracey, pourquoi vois-tu toujours un mari potentiel dans chacun des hommes qui croisent ta route ?

  Parce que quand on a été en couple durant trois ans, la solitude est insupportable. Pourtant, je sais que ce n’est pas une raison pour me lancer dans la première aventure venue, ce serait aussi nul que d’être restée avec Will durant trois ans. Je me suis accrochée à lui parce que j’avais peur de la solitude, et me voilà prête à recommencer ! Kate a raison. Je ne suis pas encore guérie. Je ne suis pas prête pour démarrer une nouvelle relation avec quelqu’un. Je dois d’abord vivre pour moi-même.

  Forte de cette résolution, je sors mon tube de rouge à lèvres, puis je tamponne mes lèvres avec un mouchoir en papier. J’avale une pastille de Halls, espérant que la menthe finira de me rafraîchir et je vaporise un peu de déodorant Ralph Lauren derrière chaque oreille. Je suis tellement jolie et je sens tellement bon que je me demande si Jack va me croire quand je vais lui dire que je suis malade et que je veux rentrer chez moi. Mais, alors que je sors des toilettes, je sais que c’est la meilleure chose à faire. Après tout, il est arrivé en retard, j’ai bien le droit de partir plus tôt. Il sera peut-être soulagé. Si ça se trouve, il s’est senti obligé de me voir ce soir à cause de Mike. Mon patron et Dianne lui ont sans doute dit à quel point j’étais dépressive après ma rupture avec Will.

  C'est certainement ça.

  J’arrive à la table.

  — Enfin, te voilà, tu me manquais déjà, dit Jack avec un sourire attendrissant qui fait aussitôt apparaître ses fossettes.

  Je devrais y aller.

  Mais je reste.

  7

  C'est la première fois depuis des semaines que je
ne suis pas gelée en me réveillant.

  Sans doute parce que je suis pelotonnée contre une chaudière humaine, j’ai nommé, Jack.

  Ah, oui, au fait, son nom de famille est Candell.

  Je le précise parce que je ne voudrais pas que vous croyiez que j’ai pu passer la nuit avec quelqu’un dont j’ignore le nom de famille. Je tiens également à préciser que son nom se dit bien Candell, et pas Candle, comme une bougie. Je n’accepterai aucun jeu de mots de mauvais goût… Je sais d’autres petites choses à son sujet. Par exemple, quand il avait sept ans, sa famille a déménagé du Bronx pour la banlieue. Un coin tellement calme qu’il en est devenu insomniaque. Quand il a eu dix ans, ses parents l’ont envoyé en colonie dans le Massachusetts, il a cru qu’ils l’avaient abandonné, mais il a au moins appris à nager. A douze ans, il a perdu son chien, écrasé par la camionnette du livreur de glaces. Non, je ne connais pas le nom du chien. Aurais-je dû le lui demander avant de passer la nuit avec lui ? Sans doute. J’aurais certainement dû attendre davantage et respecter la promesse que je m’étais faite et que j’avais faite à Kate de ne pas coucher avec lui. Mais, voyez-vous, dans ce petit matin gris d’hiver, chaudement blottie contre lui, son bras autour de moi, ma tête sur sa poitrine, son souffle contre ma joue, je n’en ai rien à faire de tous ces « j’aurais dû » ou « je n’aurais pas dû ».

  Il faut que je vous raconte la suite de la soirée. Ça s’est fait tout seul. Après le bar et mon début de malaise, nous sommes allés dîner, puis nous avons pris un café et un gâteau dans une superpetite pâtisserie au coin de Mulberry & Broome et de Little Italy. Et nous avons fait l’amour. C'était sublime et tout naturel.

  Ça peut vous paraître bizarre mais c’est exactement ce qui s’est passé. Je n’ai pas eu de crise d’angoisse ni d’envie de fuir. Tant mieux, du reste, parce que comme nous sommes chez moi… Oui, je sais. Il m’a bien proposé d’aller chez lui mais comme mon appartement était plus près de l’endroit où nous nous trouvions et que nous ne pouvions déjà pas nous séparer, c’était aussi bien. D’autant que chez moi, mon boss ne dort pas de l’autre côté de la cloison. Voilà pourquoi nous sommes lovés dans les bras l’un de l’autre au creux de mon grand lit en chêne acheté il y a quelques mois. Jack est mon premier invité. Raphaël ne compte pas puisqu’il a dormi par terre jeudi dernier. Il était du reste assez en pétard mais je ne voulais pas risquer d’attraper son rhume. Il n’était absolument pas question de faire coucher Jack sur un matelas par terre.

 

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