The Idea of Perfection

Home > Other > The Idea of Perfection > Page 4
The Idea of Perfection Page 4

by Paul Valéry


  Learning a foreign language is like striking out in a snowstorm; translation is a matter of making your way back. Therefore I would like to dedicate these efforts, with deepest gratitude, to Karim Benslama and Sara Albert, chers lecteurs. To borrow the words of another of Valéry’s translators:

  How I got home again,

  Frozen half dead, perhaps you know …

  A NOTE ON THE TEXT

  For the poems in verse, I follow the Pléiade edition of Valéry’s complete works (ed. Jean Hytier, Gallimard, 1957), which generally respects the standard edition from Valéry’s time (Poésies, 1931).

  For the notebooks, I have based my selection on Michel Jarrety’s Poésie perdue: Les poèmes en prose des Cahiers (Gallimard, 2000), with a few additions from the Pléiade edition of Les Cahiers (ed. Judith Robinson-Valéry, Gallimard, 1973–74).

  Following Jarrety’s edition, virgules are used for the occasional passages in the notebooks where Valéry hesitates over a choice of words, with the alternative placed between them, as in:

  Night. A vast dark and silent Thing/object/.

  References in square brackets are to the standard 1957–1961 C.N.R.S. diplomatic edition of the Cahiers.

  Album de vers anciens, 1890–1900

  Album of Early Verse, 1890–1900

  (1920)

  LA FILEUSE

  LILIA …, NEQUE NENT.

  Assise, la fileuse au bleu de la croisée

  Où le jardin mélodieux se dodeline ;

  Le rouet ancien qui ronfle l’a grisée.

  Lasse, ayant bu l’azur, de filer la câline

  Chevelure, à ses doigts si faibles évasive,

  Elle songe, et sa tête petite s’incline.

  Un arbuste et l’air pur font une source vive

  Qui, suspendue au jour, délicieuse arrose

  De ses pertes de fleurs le jardin de l’oisive.

  Une tige, où le vent vagabond se repose,

  Courbe le salut vain de sa grâce étoilée,

  Dédiant magnifique, au vieux rouet, sa rose.

  Mais la dormeuse file une laine isolée ;

  Mystérieusement l’ombre frêle se tresse

  Au fil de ses doigts longs et qui dorment, filée.

  Le songe se dévide avec une paresse

  Angélique, et sans cesse, au doux fuseau crédule,

  La chevelure ondule au gré de la caresse …

  Derrière tant de fleurs, l’azur se dissimule,

  Fileuse de feuillage et de lumière ceinte :

  Tout le ciel vert se meurt. Le dernier arbre brûle.

  Ta sœur, la grande rose où sourit une sainte,

  Parfume ton front vague au vent de son haleine

  Innocente, et tu crois languir … Tu es éteinte

  Au bleu de la croisée où tu filais la laine.

  THE SPINNER

  LILIA … NEQUE NENT.

  The spinner sits beside the window’s blue

  That looks across the nodding singsong garden,

  Lost in the whirring of her ancient wheel.

  She tires, from drinking deeply of the sky,

  Of spinning the lissome locks that slip her grasp,

  And lets her little head relax, and dreams.

  Pure air and shrubbery meet to make a spring

  Of falling petals, suspended in the light,

  Which waters with its loss the garden’s calm.

  A stem that gathers in the roving wind,

  Bending beneath its vain and spangled grace,

  Sends up one splendid rose to the old wheel.

  This sleeper, though, still spins a single thread;

  Her long and drowsing fingers play upon

  The frail shadow, twining mysteriously.

  The dream spins out, angelic, indolent,

  And as the spindle leads them gently on,

  The tresses rise and fall at her caress …

  Behind so many flowers, the azure hides,

  Itself a spinner wreathed in light and leaves:

  All the green sky dies. The last tree burns.

  And when the rose, your sister, smiling saint,

  Perfumes your distant forehead with its breath,

  Its innocence, you swoon … You flicker out

  Where you were spinning by the window’s blue.

  _____________

  Lilia … neque nent: “Consider the lilies of the field, how they grow; they toil not, neither do they spin.” (Luke 12:27)

  HÉLÈNE

  Azur! c’est moi … Je viens des grottes de la mort

  Entendre l’onde se rompre aux degrés sonores,

  Et je revois les galères dans les aurores

  Ressusciter de l’ombre au fil des rames d’or.

  Mes solitaires mains appellent les monarques

  Dont la barbe de sel amusait mes doigts purs ;

  Je pleurais. Ils chantaient leurs triomphes obscurs

  Et les golfes enfuis aux poupes de leurs barques.

  J’entends les conques profondes et les clairons

  Militaires rythmer le vol des avirons ;

  Le chant clair des rameurs enchaîne le tumulte,

  Et les Dieux, à la proue héroïque exaltés

  Dans leur sourire antique et que l’écume insulte,

  Tendent vers moi leurs bras indulgents et sculptés.

  HELEN

  Azure! It’s I … returned from caves of shades

  To hear the waves ride up the ringing shore,

  And I see those galleys in the glow of dawn

  Rising from shadow, sped by golden oars.

  My hands, alone now, call the salty beards

  Of sovereigns where my fingers used to play;

  I cried. They sang forgotten victories

  And bays that dwindled in their vessels’ wake.

  I hear the deep-voiced conch shells and the blare

  Of trumpets calling time to beating oars;

  The rowers’ lusty song rides out the crash,

  And the Gods, hoisted on heroic prows,

  Archaic smiles buffeted by the spray,

  Reach out to me their loving, sculpted arms.

  ORPHÉE

  … Je compose en esprit, sous les myrtes, Orphée

  L’Admirable! … le feu, des cirques purs descend ;

  Il change le mont chauve en auguste trophée

  D’où s’exhale d’un dieu l’acte retentissant.

  Si le dieu chante, il rompt le site tout-puissant ;

  Le soleil voit l’horreur du mouvement des pierres ;

  Une plainte inouïe appelle éblouissants

  Les hauts murs d’or harmonieux d’un sanctuaire.

  Il chante, assis au bord du ciel splendide, Orphée!

  Le roc marche, et trébuche ; et chaque pierre fée

  Se sent un poids nouveau qui vers l’azur délire!

  D’un Temple à demi nu le soir baigne l’essor,

  Et soi-même il s’assemble et s’ordonne dans l’or

  À l’âme immense du grand hymne sur la lyre!

  ORPHEUS

  … Within me I compose, under the myrtles,

  The Worthy Orpheus! … Pure calderas

  Send down their fire; he makes the smoking peak

  A trophy to a god’s resounding act.

  When the god sings, he breaks the almighty grounds.

  The sun is witness to the awful march

  Of stones. An unheard cry invokes the blinding

  Walls of a shrine in high, harmonious gold.

  Orpheus sings beside the brilliant sky!

  The rock sets out, but stumbles: enchanted stones

  Are drawn by their new weight to azure heights.

  Half bare and bathed in evening, a Temple rises

  And in the gold takes form, in harmony

  With the hymn’s tremendous soul upon the lyre!

  NAISSANCE DE VÉNUS

  De sa profonde mère, encor froide et fumante,

  Voici qu’au seuil battu de tempêtes, la chair
/>   Amèrement vomie au soleil par la mer,

  Se délivre des diamants de la tourmente.

  Son sourire se forme, et suit sur ses bras blancs

  Qu’éplore l’orient d’une épaule meurtrie,

  De l’humide Thétis la pure pierrerie,

  Et sa tresse se fraye un frisson sur ses flancs.

  Le frais gravier, qu’arrose et fuit sa course agile,

  Croule, creuse rumeur de soif, et le facile

  Sable a bu les baisers de ses bonds puérils ;

  Mais de mille regards ou perfides ou vagues,

  Son œil mobile mêle aux éclairs de périls

  L’eau riante, et la danse infidèle des vagues.

  BIRTH OF VENUS

  Out of her mother’s cold and smoking depths,

  Thrown up with bitter heavings into the sun

  Upon this tempest-battered shore, her flesh

  Casts off the diamond raiment of the storm.

  Her smile forms, and along her pale white arms,

  Bewept by the orient on a blood-red shoulder,

  She trails the purest gems of watery Thetis,

  And her hair sends quivering runnels down her side.

  Her fleeing steps refresh the loose gravel,

  Empty rumor of thirst; the yielding sand

  Drinks up her childlike skips and leaps like kisses;

  But with a thousand false or shifting glances

  Her quick eyes mingle with the flash of danger

  The water’s laugh, the wavelets’ faithless dance.

  FÉERIE

  La lune mince verse une lueur sacrée,

  Toute une jupe d’un tissu d’argent léger,

  Sur les bases de marbre où vient l’Ombre songer

  Que suit d’un char de perle une gaze nacrée.

  Pour les cygnes soyeux qui frôlent les roseaux

  De carènes de plume à demi lumineuse,

  Elle effeuille infinie une rose neigeuse

  Dont les pétales font des cercles sur les eaux …

  Est-ce vivre? … Ô désert de volupté pâmée

  Où meurt le battement faible de l’eau lamée,

  Usant le seuil secret des échos de cristal …

  La chair confuse des molles roses commence

  À frémir, si d’un cri le diamant fatal

  Fêle d’un fil de jour toute la fable immense.

  FANTASY

  The slender moon decants a sacred gleam,

  An airy skirt of silver on the floor

  Of marble where the Shadow comes to dream,

  Trailed by a pearly gauze in a carriage of pearls.

  Before the silky swans that graze their hulls

  Of half-illumined plumes along the reeds,

  She endlessly plucks a rose whose petals fall

  Like snow, and turn in circles on the water …

  Is this a life? … O desert, languid spell

  Where lappings of the silvered water die

  Away, and wear away the crystal echoes …

  The roses’ soft, uncertain flesh begins

  To quiver, when a fatal diamond cry

  Dispels the vision with a crack of day.

  MÊME FÉERIE

  La lune mince verse une lueur sacrée,

  Comme une jupe d’un tissu d’argent léger,

  Sur les masses de marbre où marche et croit songer

  Quelque vierge de perle et de gaze nacrée.

  Pour les cygnes soyeux qui frôlent les roseaux

  De carènes de plume à demi lumineuse,

  Sa main cueille et dispense une rose neigeuse

  Dont les pétales font des cercles sur les eaux.

  Délicieux désert, solitude pâmée,

  Quand le remous de l’eau par la lune lamée

  Compte éternellement ses échos de cristal,

  Quel cœur pourrait souffrir l’inexorable charme

  De la nuit éclatante au firmament fatal,

  Sans tirer de soi-même un cri pur comme une arme?

  SAME FANTASY

  The slender moon decants a sacred gleam,

  An airy skirt of silver on the shapes

  Of marble where a virgin made of pearls

  And pearly gauze is walking and would dream.

  Before the silky swans that graze their hulls

  Of half-illumined plumes along the reeds,

  She gathers and strews a rose whose petals fall

  Like snow, and turn in circles on the water.

  Sweet solitude, deserted languor, when

  The water’s eddies, silvered by the moon,

  Count up their crystal echoes endlessly,

  What heart could bear the irresistible charm

  Of the night’s splendor in the fateful sky,

  And not release a pure, explosive cry?

  BAIGNÉE

  Un fruit de chair se baigne en quelque jeune vasque,

  (Azur dans les jardins tremblants) mais hors de l’eau,

  Isolant la torsade aux puissances de casque,

  Luit le chef d’or que tranche à la nuque un tombeau.

  Éclose la beauté par la rose et l’épingle!

  Du miroir même issue où trempent ses bijoux,

  Bizarres feux brisés dont le bouquet dur cingle

  L’oreille abandonnée aux mots nus des flots doux.

  Un bras vague inondé dans le néant limpide

  Pour une ombre de fleur à cueillir vainement

  S’effile, ondule, dort par le délice vide,

  Si l’autre, courbé pur sous le beau firmament,

  Parmi la chevelure immense qu’il humecte,

  Capture dans l’or simple un vol ivre d’insecte.

  BATHING

  A fruit of flesh is bathing in some fresh basin

  (Azure amid the garden’s stir) but shining

  Above the water, braided with armored force,

  The golden head is severed by a tomb.

  Beauty unfurls with rose and hairpin from

  The very mirror where she steeps her jewels,

  Bouquet of hard, cracked fires lashing her ear

  Lost in the rippling water’s naked words.

  One hazy arm adrift in nothingness,

  To vainly pluck the shadow of a flower,

  Unravels, wavers, rests in empty joy,

  When the other, bent beneath the splendid skies,

  Ensnares, amid the ample hair it dampens

  In the calm gold, an insect’s drunken flight.

  AU BOIS DORMANT

  La princesse, dans un palais de rose pure,

  Sous les murmures, sous la mobile ombre dort,

  Et de corail ébauche une parole obscure

  Quand les oiseaux perdus mordent ses bagues d’or.

  Elle n’écoute ni les gouttes, dans leurs chutes,

  Tinter d’un siècle vide au lointain le trésor,

  Ni, sur la forêt vague, un vent fondu de flûtes

  Déchirer la rumeur d’une phrase de cor.

  Laisse, longue, l’écho rendormir la diane,

  Ô toujours plus égale à la molle liane

  Qui se balance et bat tes yeux ensevelis.

  Si proche de ta joue et si lente la rose

  Ne va pas dissiper ce délice de plis

  Secrètement sensible au rayon qui s’y pose.

  THE SLEEPING WOOD

  The princess sleeps in a palace of pure rose,

  Under the murmurs, in the shifting shade,

  And starts an incoherent coral word

  When waylaid sparrows peck her golden rings.

  She does not listen as the falling drops

  Recall the treasure of an empty world,

  Nor as a wind of flutes in distant woods

  Buffets faint rumors of a hunting horn.

  O let the morning drumroll echo back

  To sleep, as you resemble more and more

  The vines that sway and brush your buried eyes.

  Falling so near your cheek, so slow, the rose

&nb
sp; Will not dispel this ecstasy of folds

  That stir discreetly at the sunbeam’s touch.

  CÉSAR

  César, calme César, le pied sur toute chose,

  Les poings durs dans la barbe, et l’œil sombre peuplé

  D’aigles et des combats du couchant contemplé,

  Ton cœur s’enfle, et se sent toute-puissante Cause.

  Le lac en vain palpite et lèche son lit rose ;

  En vain d’or précieux brille le jeune blé ;

  Tu durcis dans les nœuds de ton corps rassemblé

  L’ordre, qui doit enfin fendre ta bouche close.

  L’ample monde, au delà de l’immense horizon,

  L’Empire attend l’éclair, le décret, le tison

  Qui changeront le soir en furieuse aurore.

  Heureux là-bas sur l’onde, et bercé du hasard,

  Un pêcheur indolent qui flotte et chante, ignore

  Quelle foudre s’amasse au centre de César.

  CAESAR

  Caesar, calm Caesar, bestriding everything,

  Fists in your beard and stony eyes imbued

  With eagles and the clashes of the sunset,

  Your swelling heart usurps almighty Cause.

  The lake laps vainly at its rosy bed;

  In vain the wheat shimmers like priceless gold;

  You harden in your body’s gathered knots

  The order, which must break open your closed mouth.

  Beyond the vast horizon, the wide world,

  The empire waits: one flaring, one decree,

  One spark will change the dusk to raging dawn.

  Rocked by fortune on the peaceful swell,

  A fisher floats and sings, and does not feel

  The storm clouds brewing here at Caesar’s heart.

  LE BOIS AMICAL

  Nous avons pensé des choses pures

 

‹ Prev