for three days it watched Delgrès with his hand speller of seeds and roots
hold in the precise juncture of their impotent rage
Gobert and Pélage those colonialist dogs
l’incendie effarer ses molosses
trois jours il vit Delgrès de sa main épeleuse de graines ou de racines
maintenir dans l’exacte commissure de leur rage impuissante
Gobert et Pélage les chiens colonialistes
All around the wind is slapped with thistles
from high above the sky is a drizzle of ingenuous blood
Fort Saint Charles I sing above the viscous embrace
the supple leap of Ignace winnowing
along the cane fields and the clerodendrons the breathless colonalist pack
Alentour le vent se gifle de chardons
d’en haut le ciel est bruine de sang ingénu
Fort Saint-Charles je chante par-dessus la visqueuse étreinte
le souple bond d’Ignace égrenant essoufflée
par cannaies et clérodendres la meute colonialiste
and I sing Delgrès who on the ramparts persists
for three days Surveying the blue height of the dream
catapulted out of the people’s sleep
for three days Supporting supporting in the frail contexture of his arms
our sky of crushed pollen. . .
et je chante Delgrès qui aux remparts s’entête
trois jours Arpentant la bleue hauteur du rêve
projeté hors du sommeil du peuple
trois jours Soutenant soutenant de la grêle contexture de ses bras
notre ciel de pollen écrasé…
And what oh what do we hear
the blue seaweed herd seeks in the labyrinth of islands
shadowy arching of the listening post
the only one that might be sniffing out a new birth
Haiti ease of mystery
the narrow path of a swell in the scrambling of legends. . .
Et qu’est-ce qu’est-ce donc qu’on entend
le troupeau d’algues bleues cherche au labyrinthe des îles
voussure ombreuse de l’écoute
la seule qui fût flaireuse d’une nouvelle naissance
Haïti aisance du mystère
l’étroit sentier de houle dans la brouillure des fables…
But when at Bainbridge Ignace was killed
when the carrion bird of the colonialist hurrah
had hovered its triumph over the shudder of the isles
Mais quand à Bainbridge Ignace fut tué
que l’oiseau charognard du hurrah colonialiste
eut plané son triomphe sur le frisson des îles
then History hoisted on its highest pyre
the drop of blood of which I speak
where came to be reflected as in a deep parage
the strange rupture of destiny. . .
alors l’Histoire hissa sur son plus haut bûcher
la goutte de sang que je dis
où vint se refléter comme en profond parage
l’insolite brisure du destin…
Morne* Matouba
Steep place. Steep name and murky Below
in the Constantine passage where the two rivers
peel their hiccups of snakes
Richepanse is there watchful
(Richepanse the purple-gummed colonialist bear
craving the solar honey gathered from the logwood)
Morne Matouba
Lieu abrupt. Nom abrupt et de ténèbres En bas
au passage Constantin là où les deux rivières
écorcent leurs hoquets de couleuvres
Richepanse est là qui guette
(Richepanse l’ours colonialiste aux violettes gencives
friand du miel solaire butiné aux campêches)
and at the borders it was the exodus of the dialogue
Everything trembled except Delgrès. . .
O Death, toward itself the notable leap
everything blew up on black Matouba
et ce fut aux confins l’exode du dialogue
Tout trembla sauf Delgrès…
Ô Mort, vers soi-même le bond considérable
tout sauta sur le noir Matouba
the thick stream of air toward the summits hauled
first the great horses of noise rearing against the sky
then sluggishly the great octopus limp with smoke
a derisory spitter injecting the night with
the insolent perfume of a tuft of citronella
and a wind swept down on the islands
to be riddled by the suspect violence of the locusts. . .
l’épais filet de l’air vers les sommets hala
d’abord les grands chevaux du bruit cabrés contre le ciel
puis mollement le grand poulpe avachi de fumée
dérisoire cracheur dans la nuit qu’il injecte
de l’insolent parfum d’une touffe de citronnelle
et un vent sur les îles s’abattit
que cribla la suspecte violence des criquets…
Delgrès before you neither did
the triumphant
flutes sing nor did the dried-up cisterns frown your
shadow nor did the voracious insect graze your site
O Breaker Violent Confounder
Delgrès point n’ont devant toi chanté
les triomphales
flûtes ni rechigné ton ombre les citernes
séchées ni l’insecte vorace n’a pâturé ton site
Ô Briseur Déconcerteur Violent
I sing the hand that disdained to skim
with the long spoon of days
the boiling cane juice of the great vat of time
and I sing
Je chante la main qui dédaigna d’écumer
de la longue cuillère des jours
le bouillonnement de vesou de la grande cuve du temps
et je chante
but with the full trumpet of the plenary and merciless sky
roared the tenacious tardy brand
distantly activated by the bold rigor of the dawn!
mais de toute la trompette du ciel plénier et sans merci
rugi le tenace tison tardif
lointainement agi par la rigueur téméraire de l’aurore !
I call for a song in which the rainbow can break
in which the curlew may land on forgotten strands
I call for the liana that grows on the palm tree
(on the trunk of the present it is our obstinate future)
Je veux entendre un chant où l’arc-en-ciel se brise
où se pose le courlis aux plages oubliées
je veux la liane qui croît sur le palmier
(c’est sur le tronc du présent notre avenir têtu)
I call for the conquistador in unsealed armor
lying in flower-perfumed death
for the foam to cense a rusting sword
in the pure bluish flight of slow haggard cacti
je veux le conquistador à l’armure descellée
se couchant dans une mort de fleurs parfumées
et l’écume encense une épée qui se rouille
dans le pur vol bleuté de lents cactus hagards
I call on the crest of waves bribing the noon thunder
for the picanniny head freeing from foam
the supple multitude of the unperishable body
je veux au haut des vagues soudoyant le tonnerre de midi
la négrillonne tête désenlisant d’écumes
la souple multitude du corps impérissable
that in the rotted truth of our summers
may rise and revive a shred of crushed cane
a blood of light fallen into the pollen run-off of the fields
que dans la vérité pourrie de nos étés
monte et ravive une fripure de bagasses
un sang de lumière chue aux coulures des cannaies
&nb
sp; and behold in this sap and this blood within this evidence
at the four corners of the isles Delgrès meandering us
having a devolved Icarus hollowed out of the ash’s marrow
the phosphorescent wound of an unfathomable source
So
et voici dans cette sève et ce sang dedans cette évidence
aux quatre coins des îles Delgrès qui nous méandre
ayant Icare dévolu creusé au moelleux de la cendre
la plaie phosphorescente d’une insondable source
Or
constructor of the heart in the soft flesh of the mangrove
today Delgrès
in the hollow of intersecting paths
taking up this name beyond the maremmas
I proclaim you and in all future wind
you the buccinator of a distant vintage.
constructeur du cœur dans la chair molle des mangliers
aujourd’hui Delgrès
au creux de chemins qui se croisent
ramassant ce nom hors maremmes
je te clame et à tout vent futur
toi buccinateur d’une lointaine vendange.
In Memory of a Black Union Leader
À la mémoire d’un syndicaliste noir
Let no tempest subside let no rock stagger
for him whose chest was sure
whose bugle of fire neither in the dark
nor in rustic fate subsided
Qu’une tempête ne décline que le roc ne titube
pour celui portail qui fut sûr
dont le clairon de feu dans l’ombre et le hasard
rustique ne décrut
O people watched from the highest mirador
and defying with the cane of the blind
the native name of enormous injustice
Ô peuple guetté du plus haut mirador
et défiant du bâton des aveugles
le nom natal de l’injustice énorme
I once placed you
in the center of a landscape against a background of cane fields
upright in the midst of the sod of our enlarged
eyes and somehow resembling
the black gold Haitian face
of a god
Je t’ai inscrit une fois
au centre du paysage sur un fond de cannaie
debout au milieu de la glèbe de nos yeux
agrandis et d’une sorte semblable
à la face d’or noire et haïtienne
d’un dieu
See in the sleepless forest
friends have sprung up patient
you used to wrinkle your brow you wrinkle it still
you used to hardly speak you hardly speak more now
you used to smile the same as you still smile
quite tenderly
with a smile born strong from the intermingled sheaves of the kindred earth and sea
Vois dans la forêt sans sommeil
les amis ont poussé patients
tu plissais les paupières tu les plisses aujourd’hui
tu ne parlais guère tu ne parles guère moins maintenant
tu te contentais de sourire de même tu souris encore
très doux
d’un sourire né fort des confuses javelles de la terre et de la mer parentes
what wages have you just again discussed
on your black and serene breast
have you again just revived supreme
as a sacred knot of benumbed grass snakes
the rainy-season angers and the cutlass of strikes
de quels salaires viens-tu encore de discuter
sur ton sein noir et calme
viens-tu encore de réchauffer suprêmes
comme un nœud sacré de couleuvres engourdies
les colères d’hivernage et le coutelas des grèves
and into what coolness did you again dare to dip
your dew-like smile
how in the great debacle did you shelter shrewdly
your great secret strength
your hard peasant face
the calm waters imprisoned by the half-laughter of your eyes
et dans quelle fraîcheur osas-tu retremper
ton sourire de rosée
comment dans la grande débâcle as-tu mis à l’abri rusé
ta grande force secrète
ton dur front paysan
les eaux calmes prisonnières du mi-rire de tes yeux
a doubt within me trembles
upon hearing in the flowered jungle
a dream making its way
Master marooner of clarity
will we have the strength this spring to hoist
our pure limbs up to the womb
where dormant the fecund climates await
un doute est mien qui tremble
d’entendre dans la jungle des fleurs
un rêve se frayer
Maître marronneur des clartés
aurons-nous la force de hisser ce printemps
jusqu’au sein où attendent dormants les climats
féconds nos membres purs
our impatient skies
tradewinds or southwinds
are you awakening our dead races
nos ciels impatients
alizés ou autans
réveillez-vous nos races mortes
briefly a seducer of stars
a foul wind blows from the rotten bagasse
your people are hungry are thirsty stumble your people
are a hand truck that constantly tears itself out of the mud
full of curses and lashed to the deaf thread of the black night of the cane
by a saber sensation
un instant charmeur d’astres
un vent mauvais souffle des bagasses pourries
ton peuple a faim a soif trébuche ton peuple
est un cabrouet qui s’arrache de la boue toujours
plein de jurons et cinglé au fil sourd de la nuit noire des cannes
d’un sentiment de sabres
you the rejection of somber defeat
tough leader protector of the huts
god of the planted slopes breadfruit of the errand girls
toi le refus de la sombre défaite
chef dur soutien des cases
dieu des dégras arbre à pain des coursières
in imputrescible fern I have carved you
to be revered sylvan
when May gilds chabin-like the large kinky heads
of its rarest mango trees
en fougère imputrescible je t’ai taillé
à révérer sylvestre
quand mai dore en chabin la grosse tête crépue
de ses manguiers les plus rares
the dream arose you are walking you the fervor of a name
under the tenacious science of a land of silence
every dog sniffs at you not one dares bar your way
your walls have collapsed the roads are muddy
in the balisiers* great red hearts are committing suicide
you are walking pilgrim you are walking and smiling
at the blackbirds of the last ray that peck at the ticks on the zebus’s backs
le songe s’est levé tu marches toi l’ardeur d’un nom
sous la tenace science d’un pays de silence
tous te flairent aucun chien n’ose te barrer la route
tes murs se sont effondrés les chemins sont boueux
de grands cœurs se suicident rouges aux balisiers
tu marches pèlerin tu marches et tu souris
aux merles du dernier rayon qui picorent les tiques sur le dos des zébus
Exhibitor
the whole sky has long since been extinguished
the sea down there in the cove slopes and returns to lost birds
the swaying of a roof and the light
the light you redistribute all of it
to the orphan reefs to the leaves filtering it
to the ill-cooled stones of the volcano reborn as gems
to the vaguely bloodshot glazed eyes of the comrades
Montreur
tout le ciel depuis longtemps s’est éteint
la mer au bas dans l’anse incline et ramène à des oiseaux perdus
le balancement d’un toit et la lumière
la lumière tu la redistribues toute
aux écueils orphelins aux feuilles en la filtrant
aux pierres du volcan mal refroidies qui renaissent précieuses
aux yeux des camarades vernissée vaguement sanguinolente
. . . on the state of the Union
… sur l’état de l’Union
I imagine this message in Congress on the state of the Union:
situation tragic
remaining underground only 75 years’ worth of iron
50 of cobalt
but 55 years’ worth of sulfur and 20 of bauxite
remaining in our hearts what?
J’imagine au Congrès ce message sur l’état de l’Union :
situation tragique,
plus ne nous reste au sous-sol que 75 ans de fer
50 ans de cobalt
mais pour 55 ans de soufre et 20 ans de bauxite
au cœur quoi ?
Nothing, zero,
a mine without ore,
a cavern where nothing prowls
of blood not a drop.
The Complete Poetry of Aimé Césaire Page 50