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La Vallée des chevaux

Page 15

by Jean M. Auel


  Les hyènes étaient en train d’encercler la jeune pouliche. Celle-ci leur lançait des regards apeurés et essayait de leur échapper. S’il n’y a plus personne pour s’occuper d’elle, autant qu’elle meure tout de suite, se dit Ayla. Mais, quand une hyène s’élança vers la pouliche et lui entailla le flan, elle ne put s’empêcher d’intervenir. La fronde à la main, elle s’avança dans la trouée et bombarda de pierres les assaillants. Une des hyènes s’effondra sur le sol, les autres s’éloignèrent. Ayla n’avait pas l’intention de les poursuivre : leur peau tachetée ne l’intéressait pas. Elle voulait seulement qu’elles laissent la jeune pouliche tranquille. Celle-ci s’était reculée en la voyant, mais elle n’était pas allée loin. Elle avait encore plus peur des hyènes que d’Ayla.

  La jeune femme s’approcha peu à peu de la pouliche, la main tendue en avant et en chantonnant d’une voix douce, comme elle l’avait déjà fait avec d’autres animaux apeurés. D’instinct, elle savait s’y prendre avec les animaux. La pitié qu’elle éprouvait pour les créatures sans défense s’étendait à tous les êtres vivants et son activité de guérisseuse n’avait fait que la renforcer. Iza était comme elle : elle aussi, elle n’avait pas hésité à recueillir une petite fille blessée et affamée, malgré la désapprobation du clan.

  Quand la jeune pouliche avança la tête pour renifler les doigts d’Ayla, celle-ci en profita pour s’approcher un peu plus et lui caresser l’encolure. Le jeune animal s’enhardit et se mit à sucer bruyamment le bout de ses doigts.

  Pauvre bébé ! songea-t-elle en faisant un effort pour ne pas pleurer. Tu as faim et ta mère n’est plus là pour te nourrir. Ce n’est pas moi qui vais te donner du lait, je n’en avais déjà pas assez pour nourrir Durc. Cela n’a pas empêché mon fils de grandir. Je trouverai bien quelque chose pour te nourrir. Toi aussi, il va falloir te sevrer. Viens avec moi, bébé, ajouta-t-elle en entraînant la jeune pouliche vers la plage.

  En arrivant près du feu, Ayla aperçut un lynx qui était en train de lui voler un morceau de cette viande si difficilement gagnée. Lâchant la pouliche, elle saisit sa fronde et, quand le lynx releva la tête, lança deux pierres coup sur coup.

  Avec une fronde, tu peux tuer un lynx, lui avait dit Zoug un jour. Mais ne t’attaque jamais à un animal plus gros que le lynx. Et Ayla avait eu maintes fois l’occasion de vérifier que Zoug avait raison.

  Elle replaça la viande près du feu et y traîna le corps sans vie du félin. En voyant son tableau de chasse – l’imposant tas de viande, la peau couverte de boue de la jument, la fourrure du glouton et celle du lynx – elle éclata soudain de rire. J’avais besoin de viande, se dit-elle. J’avais besoin de fourrure. Et maintenant, je n’aurai pas assez de mes deux mains pour m’occuper de tout ça.

  Effrayée par le feu, la jeune pouliche s’était légèrement éloignée. Ayla alla chercher une longue lanière et, s’approchant avec précaution de l’animal, elle la lui passa autour du cou et la ramena vers la plage où elle l’attacha au tronc d’un arbuste. Elle retourna prendre ses épieux qu’elle avait laissés près de la fosse et, à son retour, comme la jeune pouliche recommençait à lui sucer les doigts, elle se demanda ce qu’elle pourrait lui donner à manger.

  Elle lui proposa une brassée d’herbes, mais le petit cheval ne semblait pas savoir ce que c’était. Elle songea alors aux céréales qu’elle avait fait cuire la veille au soir et auxquelles elle avait à peine touché. Si les petits des chevaux étaient comme les bébés du Clan, ils devaient pouvoir manger la même nourriture que leur mère à condition que celle-ci soit liquide. Ayla ajouta de l’eau dans le récipient qui contenait les céréales et les écrasa pour obtenir une bouillie qu’elle proposa à la jeune pouliche. Celle-ci renifla la bouillie, puis recula quand Ayla lui enfonça le museau dans le récipient.

  Comme elle recommençait à sucer les doigts d’Ayla, la jeune femme plongea ses deux mains dans le récipient. La jeune pouliche accepta alors d’y goûter. La bouillie dut lui plaire car, sans qu’Ayla ait besoin d’insister, elle nettoya le contenu du récipient.

  J’ai l’impression qu’il va falloir que je ramasse plus de grains que prévu, songea Ayla. Dire qu’elle avait tué la mère de ce poulain pour pouvoir se nourrir et que maintenant, elle serait obligée de faire provision de grains pour nourrir le bébé ! Si les membres du Clan étaient là, ils ne manqueraient pas de dire qu’elle se conduisait d’une manière bien étrange. Maintenant que je suis seule, je fais ce que je veux, se dit-elle en enfonçant l’extrémité d’une petite branche dans un morceau de viande qu’elle plaça au-dessus des braises. Dès qu’elle eut fini de manger, elle se mit au travail.

  Quand la lune apparut à nouveau dans le ciel, elle était toujours en train de découper la viande en fines tranches. Autour de la plage brûlaient de nombreux feux qu’elle avait disposés en cercle et qu’elle alimentait régulièrement avec des bois flottés. A l’intérieur de ce cercle, la viande, placée sur des cordes, était en train de sécher. Roulées un peu à l’écart se trouvaient la fourrure fauve du lynx et celle, marron, du glouton, dont elle ne pourrait s’occuper que plus tard. Elle avait lavé la peau de la jument et l’avait mise à sécher sur des pierres. Après avoir nettoyé l’estomac de l’animal, elle l’avait rempli d’eau pour qu’il reste souple et posé à côté de la peau. Elle avait aussi mis à sécher les tendons, nettoyé les intestins, rangé en tas les os et les sabots et mis de côté la graisse qu’elle ferait fondre plus tard et verserait à l’intérieur des intestins pour la conserver. En dépiautant les deux carnassiers, elle avait réussi à récupérer un peu de graisse qu’elle utiliserait pour des lampes ou pour imperméabiliser des peaux. Elle s’était débarrassée de leur chair, dont le goût lui déplaisait.

  Elle allait retourner à la rivière pour y laver un dernier quartier de viande quand soudain elle changea d’avis. Ce travail pouvait attendre. Jamais elle ne s’était sentie aussi fatiguée. Elle alimenta à nouveau les feux pour qu’ils continuent à brûler pendant son sommeil et se roula dans sa couverture en fourrure.

  La petite pouliche, qui avait réussi à se détacher, s’approcha pour la renifler et vint s’étendre à côté d’elle. A moitié endormie, Ayla posa son bras sur l’encolure du cheval et, bercée par sa respiration et les battements de son cœur, sombra aussitôt dans un sommeil sans rêve.

  6

  Jondalar frotta son menton rugueux et allongea le bras pour prendre son sac posé contre le tronc d’un pin rabougri. Après avoir fouillé à l’intérieur, il en sortit une pochette en cuir souple, défit le lacet qui la tenait fermée, la déplia devant lui, choisit une fine lame de silex, au bord plat et tranchant.

  Un coup de vent agita soudain les branches du vieux pin couvert de lichen. La rafale souleva le rabat en peau à l’entrée de la tente, s’engouffra à l’intérieur, tira sur les cordes et ébranla les piquets, puis, changeant d’avis, plaqua à nouveau le rabat contre l’ouverture. Haussant les épaules d’un air fataliste, Jondalar rangea la lame dans la pochette et referma celle-ci.

  — Le moment est venu de laisser pousser sa barbe ? demanda Thonolan.

  Jondalar, qui ne l’avait pas entendu arriver, le regarda d’un air surpris.

  — En été, je n’aime pas porter la barbe, dit-il. Dès qu’on transpire, ça vous démange. Par contre, l’hiver, la barbe tient chaud. Et j’ai bien l’impression que l’hiver arrive.

  Thonolan s’approcha du feu qu’ils avaient allumé tout près de la tente, s’assit en tailleur à côté du foyer et approcha ses mains des flammes pour les réchauffer.

  — A part un buisson ici ou là dont les feuilles sont encore rouges, tout le reste tourne au jaune et au brun, annonça-t-il en montrant à son frère les immenses prairies qui se trouvaient derrière eux. Même les pins ont légèrement jauni. Il y a de la glace sur les flaques et les cours d’eau gèlent en surface. Les feuilles ne vont pas tarder à tomber.

  — Il n’y en a plus pour longtemps en effet, reconnut Jondalar en s’installant en face de son frère. Au lever du jour, j’ai vu p
asser un rhinocéros qui se dirigeait vers le nord.

  — La neige ne devrait pas tarder.

  — Tant que les mammouths et les rhinocéros ne seront pas partis, nous ne risquons pas d’être surpris par une tempête de neige. De petites chutes de neige ne les gênent pas mais dès qu’ils sentent venir une tempête, ils filent en direction du glacier. « Quand le mammouth va vers le nord, ne te mets pas en route. » C’est vrai aussi pour les rhinocéros. Mais celui que j’ai aperçu ce matin ne semblait nullement pressé.

  — Je me souviens d’une chasse qui a tourné court sans que nous ayons tué quoi que ce soit, simplement parce que les rhinocéros se ruaient vers le nord, fit remarquer Thonolan. Je me demande s’il neige beaucoup ici...

  — L’été a été sec. Si l’hiver est pareil, il ne devrait pas tomber beaucoup de neige. Les mammouths et les rhinocéros resteront sur place. Mais, pour l’instant, on ne peut rien dire. Nous sommes descendus très bas et l’hiver risque d’être plus humide que dans le nord. S’il y a des gens dans les montagnes qui se trouvent à l’est, ils doivent savoir. Peut-être aurions-nous dû rester chez ceux qui nous ont fait traverser le fleuve en radeau. Nous avons absolument besoin de trouver un endroit où passer l’hiver. Et vite !

  — Tu sais ce qui me ferait plaisir ? dit Thonolan en souriant. Une Caverne agréable où nous serions reçus à bras ouverts et qui serait remplie de belles femmes.

  — Qu’une Caverne nous reçoive à bras ouverts et je m’estimerai déjà heureux.

  — Tu n’as pas plus envie que moi de passer l’hiver sans la réconfortante présence d’une femme, non ?

  — L’hiver sera moins froid avec une femme, reconnut Jondalar. Mais ce n’est pas en restant ici que nous en trouverons. Il est temps de se mettre en route, dit-il en se levant.

  — Tout à fait d’accord, répondit Thonolan.

  Tournant le dos au feu, il s’apprêtait lui aussi à se lever quand soudain il se figea.

  — Jondalar ! chuchota-t-il. Ne bouge pas et regarde de l’autre côté de la tente. Tu verras ton ami de ce matin, ou un autre qui lui ressemble comme un frère.

  Jondalar risqua un coup d’œil prudent de l’autre côté de la tente. Il aperçut alors un énorme rhinocéros laineux à deux cornes qui se balançait d’un pied sur l’autre, comme s’il avait du mal à équilibrer sa masse imposante. La tête de côté, il regardait Thonolan. S’il avait conservé la tête droite, il n’aurait pas pu le voir car ses yeux étaient situés tellement en arrière de son crâne que, dans cette position, il était quasiment aveugle. Son ouïe et son odorat très développés compensaient largement sa vision déficiente.

  C’était un animal parfaitement adapté aux grands froids. Il possédait deux fourrures : un fin duvet bien fourni, caché sous de longs poils brun-roux. Et, en dessous de son pelage, une couche de graisse épaisse de huit centimètres. Il avançait toujours la tête basse, une de ses cornes pratiquement au ras du sol, pour déblayer le terrain. Quand la neige qui recouvrait les pâturages n’était pas trop épaisse, cette corne lui servait à se frayer un passage. A cause de sa fourrure, il ne pouvait pas supporter la chaleur qui régnait dans le sud durant l’été ni affronter un froid humide car, alors, ses longs poils auraient gelé. Il arrivait donc à l’automne pour paître dans les immenses prairies et emmagasiner de la graisse en prévision de la saison froide. Il ne s’attardait pas et repartait en direction du nord, au début de l’hiver, avant les grosses chutes de neige, et rejoignait les steppes froides et sèches au pied du glacier.

  Sa longue corne antérieure ne lui servait évidemment pas qu’à déblayer la neige et pour l’instant, son extrémité effilée se trouvait à courte distance de Thonolan.

  — Ne bouge pas ! dit Jondalar entre ses dents.

  D’un geste vif, il se baissa pour attraper les sagaies qui se trouvaient près de son sac.

  — Nos sagaies sont trop légères, fit remarquer Thonolan sans se retourner. (Il n’avait pas besoin de regarder Jondalar pour savoir ce qu’il était en train de faire.) Tu sais bien que pour tuer un rhinocéros, il faut l’atteindre à l’œil. Tu auras beau lancer ton arme, tu ne toucheras jamais une cible aussi petite. Il faudrait une sagaie plus robuste, capable de lui porter un coup mortel. Malheureusement, nous n’en avons pas...

  — Tais-toi, conseilla Jondalar. Tu vas finir par attirer son attention. Peut-être que je n’ai pas l’arme qui faut, mais toi, tu n’as rien du tout. Je vais faire le tour de la tente et tenter le coup.

  — Attends, Jondalar ! Avec ta sagaie, tu vas le rendre furieux, c’est tout ! Je te parie que tu n’arriveras même pas à le blesser. J’ai une idée... continua Thonolan. Est-ce que tu te souviens comment nous harcelions les rhinocéros quand nous étions enfants ? L’un de nous se mettait à courir devant l’animal, puis faisait brusquement un mouvement de côté tandis que quelqu’un d’autre attirait l’attention du rhino. Nous l’obligions à courir jusqu’à ce qu’il n’en peuve plus. C’est ce que nous allons faire. Je vais partir en courant pour qu’il me charge et toi, tu prendras le relais.

  — Non ! hurla Jondalar.

  Mais il était trop tard, son frère courait déjà à toute vitesse. Impossible de prévoir les réactions d’un rhinocéros ! Au lieu de se lancer à la poursuite de Thonolan, celui-ci se rua vers la tente dont les peaux remuaient sous le vent. Il donna un coup de corne dedans, fendit les peaux, rompit les cordes et finit par s’y empêtrer. Quand il réussit enfin à se libérer, il dut se dire que l’endroit n’était guère hospitalier, car il repartit au petit trot sans faire de mal à qui que ce soit.

  Jetant un coup d’œil derrière son épaule, Thonolan s’aperçut que le rhinocéros n’était plus là et il se dépêcha de rejoindre son frère.

  — Imbécile ! s’écria celui-ci en jetant sa sagaie sur le sol avec une telle force que la hampe en bois se brisa net au-dessus de la pointe en os. Tu avais envie de te faire tuer ? Grande Doni, Thonolan ! Il faut être nombreux pour harceler un rhinocéros ! A deux, jamais nous n’y serions arrivés ! Que se serait-il passé s’il s’était élancé à ta poursuite ? Qu’aurais-je fait, hein, s’il t’avait donné un coup de corne ?

  Surpris par cette sortie, Thonolan faillit se mettre en colère. Mais finalement, il sourit à son frère.

  — Alors, comme ça, tu t’es fait du souci pour moi... Peut-être ai-je eu tort de tenter une sortie mais il était hors de question que je te laisse attaquer le rhinocéros avec une sagaie aussi légère. Qu’aurais-je fait, hein, s’il t’avait donné un coup de corne ? demanda-t-il avec un grand sourire. (Il ajouta, les yeux pétillant de malice, comme un enfant tout fier de vous avoir joué un bon tour :) De toute façon, il ne m’a même pas couru après.

  Jondalar n’en voulait pas vraiment à son frère. Il était surtout soulagé de voir qu’il s’en était sorti sans mal.

  — Tu as eu de la chance, dit-il en soupirant. Nous en avons eu tous les deux. Mais nous aurions intérêt à fabriquer deux sagaies mieux adaptées à ce genre de gibier.

  — Il n’y a pas d’ifs par ici, fit remarquer Thonolan en commençant à ranger la tente. Mais nous trouverons facilement des frênes ou des aulnes sur notre route.

  — Même un saule ferait l’affaire. Et mieux vaudrait s’occuper de ces sagaies avant de partir.

  — Ne restons pas ici, Jondalar. Nous avions décidé d’atteindre les montagnes avant la nuit.

  — L’idée de voyager sans une arme capable d’arrêter les rhinocéros qui se baladent par ici ne me plaît pas tellement.

  — Nous pourrons nous arrêter plus tôt que d’habitude. De toute façon, il faudra réparer la tente. Nous en profiterons pour chercher les arbres dont nous avons besoin. Inutile d’attendre sur place que ce rhinocéros revienne.

  — Tu oublies qu’il peut aussi nous suivre... rappela Jondalar qui savait très bien que chaque matin son frère était impatient de se remettre en route. D’accord ! convint-il finalement. Nous allons essayer d’atteindre les montagnes. Mais nous nous arrêterons bien avant la nuit.

  — D’accord,
Grand Frère.

  Les deux frères s’étaient remis en route et suivaient la rive du fleuve. Tout naturellement, ils avaient adopté la même allure et savouraient cette marche silencieuse. Ce Voyage en commun les avait beaucoup rapprochés. Chacun connaissait maintenant la force et les faiblesses de l’autre. Ils se partageaient tout naturellement les tâches quand venait le moment d’établir leur camp et dépendaient étroitement l’un de l’autre en cas de danger. Ils étaient jeunes, forts, en parfaite santé et si sûrs d’eux qu’ils étaient persuadés de pouvoir faire face à n’importe quelle situation.

  Vivant en parfaite harmonie avec la nature, ils réagissaient instinctivement à n’importe quel changement dans leur environnement. Et à la moindre menace, ils se tenaient sur leurs gardes. En revanche, ils prêtaient peu d’attention au vent froid qui, ce jour-là, remuait les branches, aux nuages qui s’amoncelaient sur les premiers contreforts enneigés de la montagne située en face d’eux ou même aux eaux profondes qui coulaient le long de la berge.

  Le parcours de la Grande Rivière Mère était canalisé par les hautes chaînes montagneuses du continent. Après être sortie des montagnes septentrionales aux sommets couverts de glace, elle coulait d’abord en direction de l’est. De l’autre côté se trouvait un haut plateau et, plus à l’est, une seconde chaîne en arc de cercle. A l’endroit où les confins montagneux rencontraient les premiers contreforts de ce second massif, le fleuve se frayait un passage à travers la barrière rocheuse et obliquait brusquement vers le sud.

  Après s’être glissé entre les plateaux karstiques, le fleuve dessinait des méandres dans les steppes verdoyantes et se divisait alors en plusieurs bras, qui finissaient par se rejoindre en un seul coulant vers le sud. Pendant la traversée des plaines, le fleuve lent et paresseux donnait l’impression de ne subir aucun changement. En réalité, avant qu’elle n’atteigne, à l’extrême sud de ces immenses plaines, la région montagneuse qui allait à nouveau l’obliger à obliquer vers l’est, la Grande Rivière Mère avait reçu tous les cours d’eau venus des faces nord et est de la première chaîne de montagnes.

 

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