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Novecento

Page 2

by Baricco, Alessandro


  Et c’est ainsi que, brusquement, Novecento devint orphelin pour la seconde fois. Il avait huit ans, et derrière lui déjà une cinquantaine d’allers-retours Europe-Amérique. Sa maison, c’était l’Océan. Quant à la terre, eh bien, il n’y avait jamais posé le pied. Il l’avait aperçue, bien sûr, depuis les ports. Mais y descendre, jamais. Il faut dire que Danny avait peur qu’on le lui prenne, avec les histoires de papiers et de visas, ce genre de choses. Si bien qu’à chaque fois, Novecento, lui, il restait à bord et puis, au bout d’un certain temps, on repartait. À dire précisément, Novecento, pour le monde, il n’existait même pas : pas une ville, pas une paroisse, pas un hôpital, pas une prison, pas une équipe de base-bail où son nom soit marqué quelque part. Il n’avait pas de patrie, il n’avait pas de date de naissance, il n’avait pas de famille. Il avait huit ans : mais officiellement il n’était pas né.

  « Ça ne pourra pas continuer longtemps cette histoire », disaient quelquefois les autres à Danny. « Et en plus, c’est contre la loi. » Mais Danny avait une réponse qui faisait pas un pli : « Au cul la loi », il disait. On ne peut plus réellement discuter, à partir de là.

  À l’arrivée à Southampton, à la fin de la traversée pendant laquelle Danny était mort, le capitaine décida qu’il était temps de mettre fin à cette plaisanterie. Il convoqua les autorités portuaires et demanda à son second d’aller chercher Novecento. Eh bien, jamais le second ne put le trouver. Ils le cherchèrent dans tout le bateau, pendant deux jours. Rien. Il avait disparu. Cette histoire, personne ne la digérait vraiment, parce qu’ils s’y étaient habitués, à ce gamin, finalement, sur le Virginian, et personne n’osait en parler mais... c’est vite fait, de se jeter du haut de la rambarde et... la mer, elle fait ce qu’elle veut, et... Si bien qu’ils avaient tous la mort dans l’âme quand le bateau est reparti vingt-deux jours plus tard pour Rio de Janeiro sans que Novecento soit réapparu, et sans aucune nouvelle de lui... Comme chaque fois, au moment du départ, les serpentins, les sirènes, les feux d’artifice, mais cette fois-là c’était différent, ils perdaient Novecento, et c’était pour toujours, quelque chose leur grignotait le sourire, à eux tous, ça les mordait à l’intérieur.

  La seconde nuit de la traversée, alors qu’on ne voyait même plus les lumières de la côte irlandaise, Barry, le maître d’équipage, entra comme un fou dans la cabine du commandant et le réveilla, en disant qu’il fallait absolument qu’il vienne voir. Le commandant jura, mais alla voir.

  Salle de bal des premières.

  Lumières éteintes.

  Silhouettes en pyjama, debout, à l’entrée. Passagers tirés de leurs cabines.

  Et aussi des marins, et trois gars tout noirs montés de la salle des machines, et même Truman, le radio.

  Silencieux, tous, à regarder.

  Novecento.

  Il était assis sur le tabouret du piano, les jambes pendantes, elles ne touchaient même pas le sol. Et, aussi vrai que Dieu est vrai, il était en train de jouer.

  (Commence une musique enregistrée pour piano, plutôt simple, lente, séduisante.)

  Il jouait je ne sais quelle diable de musique, petite, mais... belle. Pas de trucage, c’était vraiment lui qui jouait, c’étaient ses mains à lui, sur ce clavier, Dieu sait comment. Et il fallait entendre ce qui en sortait. Il y avait une dame, en robe de chambre, rose, avec des espèces de pinces dans les cheveux... le genre bourrée de fric, si vous voyez ce que je veux dire, une Américaine mariée avec un assureur... eh bien, elle avait de grosses larmes, ça coulait sur sa crème de nuit, elle regardait et elle pleurait, elle ne pouvait plus s’arrêter. Quand elle vit le commandant à côté d’elle, bouillant de surprise, mais bouillant, littéralement, quand elle le vit à côté d’elle, avec un reniflement, la grosse dame riche, je veux dire, elle montra le piano et en reniflant, elle demanda :

  « S’appelle comment ?

  — Novecento.

  — Pas la chanson, le petit garçon.

  — Novecento.

  — Comme la chanson ? »

  C’était le genre de conversation qu’un commandant de marine peut difficilement poursuivre au-delà des quatre ou cinq premières répliques. Surtout quand il vient de découvrir qu’un gosse qu’on croyait mort non seulement était vivant mais avait entre-temps appris à jouer du piano. Il planta là la grosse dame riche avec ses larmes et tutti quanti, et traversa toute la salle d’un pas décidé : en pantalon de pyjama et veste d’uniforme déboutonnée. Il ne s’arrêta qu’arrivé près du piano. Il y en avait beaucoup, des choses qu’il aurait voulu dire à cet instant-là, entre autres : «Où t’as appris, bordel ?», et aussi « Où diable est-ce que t’étais fourré ? ». Mais, comme beaucoup d’hommes habitués à vivre en uniforme, il avait fini par penser également en uniforme. C’est pourquoi il dit :

  « Novecento, tout ceci est absolument contraire au règlement. »

  Novecento s’arrêta de jouer. C’était un petit garçon qui parlait peu mais apprenait vite. Avec douceur, il regarda le commandant, et il lui dit :

  «Au cul le règlement. »

  (On entend en audio des bruits de tempête.)

  L’Océan s’est réveillé / l’Océan a déraillé / l’eau explose dans le ciel / elle explose / elle dégringole / arrache les nuages au vent et les étoiles / il est furieux l’Océan / il se déchaîne / mais jusqu’à quand / personne ne sait / un jour entier / ça finira par s’arrêter / maman ce truc-là maman / tu ne me l’avais pas dit / dors mon enfant / c’est la berceuse de l’Océan / l’Océan qui te berce / tu parles qu’il me berce / il est furieux l’Océan / partout / l’écume / et le cauchemar / il est fou l’Océan / aussi loin qu’on peut voir / tout est noir / de grands murs noirs / qui déboulent / et tous là tous / la gueule ouverte / en attendant / que ça s’arrête / qu’on coule à pic / je veux pas maman / je veux l’eau qui repose / l’eau qui reflète / arrête-moi / ces murailles / absurdes / ces murailles d’eau / qui dégringolent / et tout ce bruit /

  je reveux l’eau que tu connais

  je reveux la mer

  le silence

  la lumière

  et les poissons volants

  dessus

  qui volent.

  Première traversée, première tempête. La poisse. J’avais même pas eu le temps de comprendre où j’étais que je me retrouvais dans un des grains les plus terribles de l’histoire du Virginian. En pleine nuit, il a eu les boules et hop, il a tout envoyé promener. L’Océan. À croire que ça ne s’arrêterait jamais. Le type qui est sur un bateau pour jouer de la trompette, on ne peut pas dire qu’il soit d’une grande utilité quand l’ouragan arrive. Il peut juste éviter de jouer de la trompette, histoire de ne pas compliquer les choses. Et puis rester sur sa couchette, bien tranquille. Mais moi, je ne pouvais pas. T’as beau essayer de penser à autre chose, tu es sûr que tôt ou tard ces mots vont venir se vriller dans ton crâne : fait comme un rat. Je ne voulais pas crever comme un rat, alors je suis sorti de ma cabine et j’ai commencé à errer de-ci, de-là. Je ne savais même pas où aller, ça faisait quatre jours seulement que j’étais sur ce bateau, déjà pas mal si je retrouvais le chemin des toilettes. C’est des vraies villes flottantes, ces machins. Sans blague. Bref, ça n’a pas fait un pli, à force de me cogner dans tous les coins et de prendre des couloirs au hasard, comme ça se présentait, j’ai fini par me perdre. Bon. J’étais fichu, cette fois. Et c’est à ce moment-là qu’est arrivé un type, tout élégant, habillé de noir, et qui marchait tranquillement, pas du tout l’air d’être perdu, on aurait dit qu’il n’entendait même pas les vagues, comme s’il était à Nice sur la Promenade des Anglais : ce type-là, c’était Novecento.

  Il avait vingt-sept ans, à l’époque, mais il paraissait plus âgé. Je le connaissais à peine : on avait joué ensemble dans l’orchestre, pendant ces quatre jours, mais c’était tout. Je ne savais même pas où était sa cabine. Bien sûr, les autres m’avaient un peu parlé de lui. Ils racontaient des drôles de choses : ils disaient : Novecento, il est jamais descendu. Il est
né sur le bateau, et depuis, il y est resté. Toujours. Vingt-sept ans sans mettre pied à terre, jamais. Dit comme ça, ça avait tout l’air d’une craque monumentale... Ils disaient aussi qu’il jouait une musique qui n’existait pas. Moi, ce que je savais, c’était que chaque fois qu’on s’apprêtait à jouer, dans la salle de bal, Fritz Hermann, un Blanc qui ne comprenait rien à la musique mais qui avait une belle gueule, c’est pour ça d’ailleurs qu’il dirigeait l’orchestre, s’approchait de lui et lui disait tout bas :

  «Novecento, s’il te plaît, que les notes normales, d’accord ? »

  Novecento faisait oui de la tête et il jouait les notes normales, en regardant fixement devant lui, jamais un regard pour ses mains, comme s’il était complètement ailleurs. Maintenant je le sais, qu’il y était, ailleurs. Mais à l’époque je le savais pas : je le trouvais un peu bizarre, c’est tout.

  Cette nuit-là, au beau milieu de la tempête, avec cet air de grand seigneur en vacances, il me vit là, égaré dans un couloir quelconque avec la tête du type qui est mort, il me regarda, il me sourit, et il me dit : « Viens. »

  Eh bien, quand un gars qui est sur un bateau pour jouer de la trompette rencontre au beau milieu d’un ouragan un gars qui lui dit « Viens », le gars qui joue de la trompette, il n’a qu’une seule chose à faire : il y va. J’y allai donc. Lui, il marchait. Moi... moi, c’était un peu différent. Je n’avais pas une aussi belle allure, mais bon... on finit par arriver jusqu’à la salle de bal, et puis, ballottés de-ci, de-là, enfin, surtout moi, parce que lui, on aurait dit qu’il avait des rails sous les pieds, on arrive près du piano. Personne aux environs. Il faisait presque noir, juste quelques petites lueurs ici ou là. Novecento me montra les pieds du piano.

  « Enlève les cales », il me dit. Le bateau dansait que c’en était un plaisir, tu tenais à peine debout, et ça n’avait aucun sens de débloquer ces roulettes.

  « Si tu as confiance en moi, enlève-les. »

  Il est fou ce type, j’ai pensé. Et je les ai enlevées.

  « Maintenant viens t’asseoir ici », me dit alors Novecento.

  Je ne comprenais pas ce qu’il voulait faire, vraiment je n’y comprenais rien. J’étais là, à tenir ce piano qui commençait à glisser comme un énorme savon noir... C’était une situation de merde, je vous jure, dans la tempête jusqu’au cou et avec ce dingue, en plus, assis sur son tabouret – autre fichu savon – et ses mains, immobiles, sur le clavier.

  « Si tu ne t’assieds pas maintenant, tu ne t’assiéras jamais », dit le dingue en souriant. (Il monte sur une sorte de portant, entre la balançoire et le trapèze.) «Okay. Tant qu’à être dans la merde, autant sauter à pieds joints, non ? qu’est-ce qu’on en a à foutre, je m’y assois, okay, sur ton connard de tabouret, ça y est, j’y suis, et maintenant ?

  — Et maintenant, n’aie pas peur. »

  Et il commença à jouer.

  (Commence une musique pour piano solo. C’est une sorte de danse, de valse, légère et douce. Le portant commence à se déplacer, faisant tourner le comédien autour de la scène. À mesure que le comédien progresse dans son récit, le mouvement se fait de plus en plus ample, jusqu ’à frôler les coulisses.)

  À présent, personne n’est obligé de le croire, et pour être exact, je n’y croirais pas moi-même si on me le racontait, mais la vérité vraie c’est que ce piano commença à glisser, sur le parquet de la salle de bal, et nous derrière lui, avec Novecento qui jouait, sans détacher son regard des touches, il avait l’air ailleurs, et le piano suivait les vagues, il s’en allait d’un côté, revenait de l’autre, puis tournait sur lui-même, et filait droit sur les baies vitrées, puis, à un cheveu de la vitre, il s’arrêtait et recommençait à glisser doucement dans l’autre sens, je veux dire, c’était comme si l’Océan le berçait, et nous avec, moi j’y comprenais rien, et Novecento, lui, il jouait, il continuait à jouer, et c’était clair que ce piano, il se contentait pas de jouer dessus mais qu’il le conduisait, vous comprenez ?, avec les touches, avec les notes, je sais pas avec quoi, mais il le conduisait où il voulait, ce piano, c’était absurde mais n’empêche. Et pendant qu’on voltigeait entre les tables, en frôlant les lampadaires et les fauteuils, j’ai compris, à ce moment-là, que ce qu’on faisait, ce qu’on était en train de faire, c’était danser avec l’Océan, nous et lui, des danseurs fous, et parfaits, emportés dans une valse lente, sur le parquet doré de la nuit. Oh yes.

  (Il commence à voltiger amplement à travers toute la scène, sur son portant, avec un air de bonheur, pendant que l’Océan devient fou, que le navire danse, et que la musique du piano dicte une sorte de valse qui, à travers différents effets sonores, accélère, freine, tourne, bref « conduit » le grand bal. Puis, après la énième acrobatie, par suite d’une fausse manœuvre, il se retrouve, sur sa lancée, derrière les coulisses. La musique tente de «freiner », mais il est trop tard. Le comédien ajuste le temps de crier

  « Oh Christ... »

  et il disparaît par la coulisse, heurtant quelque chose. On entend un grand fracas, comme s’il avait cassé une baie vitrée, une table de bar, un salon, quelque chose. Grand boucan. Instant de pause et de silence. Puis, par la même coulisse que celle par laquelle il avait disparu, le comédien revient, lentement.)

  Novecento m’expliqua qu’il fallait encore le perfectionner, ce truc. Et je lui répondis qu’en fait il s’agissait seulement d’enregistrer les freins. Quand la tempête fut terminée, le commandant nous dit (avec animation et en criant) «NOM D’UN DIABLE TOUS LES DEUX VOUS DESCENDEZ ILLICO DANS LA SALLE DES MACHINES ET VOUS Y RESTEZ SINON JE VOUS TUE DE MES PROPRES MAINS ET QUE CE SOIT BIEN CLAIR VOUS PAIEREZ TOUT, JUSQU’AU DERNIER CENTIME, MÊME SI VOUS DEVEZ TRAVAILLER TOUTE VOTRE VIE, AUSSI VRAI QUE CE BATEAU s’appelle le virginian et que vous êtes les deux plus grands imbéciles qui aient jamais traversé l’océan !»

  Et c’est là, cette nuit-là, dans la salle des machines, que Novecento et moi on est devenus amis. À la vie à la mort. Pour toujours. Notre temps passa à calculer ce que ça pouvait faire en dollars, tout ce qu’on avait cassé. Et plus ça chiffrait, plus on riait. Quand j’y repense, je crois bien que c’était ça, être heureux. Ou ça y ressemblait.

  Ce fut cette nuit-là que je lui demandai si elle était vraie, cette histoire, l’histoire de lui et du bateau, qu’il était né dessus, quoi, et tout le reste... si c’était vrai qu’il n’était jamais descendu. Et il me répondit : « Oui.

  — Mais vrai vraiment? »

  Il était très sérieux.

  « Vrai vraiment. »

  Et je ne sais pas mais, à ce moment-là, ce que j’ai senti en moi pendant un instant, sans le vouloir, et sans savoir pourquoi, ça a été un frisson : et c’était un frisson de peur.

  De peur.

  Un jour, j’ai demandé à Novecento à quoi diable il pensait quand il jouait, et ce qu’il regardait, les yeux toujours droit devant lui, où il s’en allait, finalement, dans sa tête, pendant que ses mains se promenaient toutes seules sur les touches. Et il m’a répondu : «Aujourd’hui je suis allé dans un pays très beau, les femmes avaient des cheveux parfumés, il y avait de la lumière partout et c’était plein de tigres. »

  Il voyageait, quoi.

  Et chaque fois il allait dans un endroit différent : en plein centre de Londres, dans un train au milieu de la campagne, sur une montagne si haute que la neige t’arrivait à la taille, ou dans la plus grande église du monde, à compter les colonnes et regarder les crucifix bien en face. Il voyageait. Le plus difficile à comprendre, c’était comment il pouvait savoir à quoi ça ressemblait, une église, et la neige, et les tigres et... je veux dire, il n’en était jamais descendu, de ce bateau, pas une seule fois, c’était pas une blague, c’était absolument vrai. Jamais descendu, pas une fois. Et toutes ces choses-là, pourtant, c’était comme s’il les avait vues. Novecento, tu lui disais « Une fois j’ai été à Paris », et il te demandait si tu avais vu les jardins de machin-truc, ou si tu avais dîné à tel endroit, il savait tout, il te disait : «
Ce que j’aime, là-bas, c’est attendre le coucher du soleil en me baladant sur le Pont-Neuf, et quand les péniches passent, m’arrêter et les regarder d’en haut, et leur faire un signe de la main.

  — Mais tu y es déjà allé, à Paris, Novecento ?

  — Non.

  — Alors...

  — C’est-à-dire... si.

  — Comment ça, si ?

  — Paris. »

  Tu pouvais te dire qu’il était fou. Mais ce n’était pas si simple. Quand un type te raconte avec une précision absolue quelle odeur il y a sur Bertham Street, l’été, quand la pluie vient juste de s’arrêter, tu ne peux pas te dire qu’il est fou pour la seule et stupide raison qu’il n’est jamais allé sur Bertham Street. Lui, dans les yeux de quelqu’un, dans les paroles de quelqu’un, cet air-là, l’air de Bertham Street, il l’avait respiré, vraiment. À sa manière : mais vraiment. Le monde, il ne l’avait peut-être jamais vu. Mais ça faisait vingt-sept ans que le monde y passait, sur ce bateau : et ça faisait vingt-sept ans que Novecento, sur ce bateau, le guettait. Et lui volait son âme.

  Il avait du génie pour ça, il faut le dire. Il

  savait écouter. Et il savait lire. Pas les livres, ça tout le monde peut, lui, ce qu’il savait lire, c’était les gens. Les signes que les gens emportent avec eux : les endroits, les bruits, les odeurs, leur terre, leur histoire... écrite sur eux, du début à la fin. Et lui, il la lisait, et avec un soin infini, il cataloguait, il répertoriait, il classait... Chaque jour, il ajoutait un petit quelque chose à cette carte immense qui se dessinait peu à peu dans sa tête, une immense carte, la carte du monde, du monde tout entier, d’un bout jusqu’à l’autre, des villes gigantesques et des comptoirs de bar, des longs fleuves et de petites flaques, et des avions, et des lions, une carte gigantesque. Et ensuite il voyageait dessus, comme un dieu, pendant que ses doigts se promenaient sur les touches en caressant les courbes d’un ragtime.

 

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