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Complete Works of Gustave Flaubert

Page 350

by Gustave Flaubert


  Regarde au chevet de mon lit toutes ces lignes entrecroisées sur l’acajou, ce sont les marques d’ongle de tout ceux qui s’y sont débattus, de tous ceux dont les têtes ont frotté là ; je n’ai jamais eu rien de commun avec eux ; unis ensemble aussi étroitement que les bras humains peuvent le permettre, je ne sais quel abîme m’en a toujours séparée. Oh ! que de fois, tandis qu’égarés ils auraient voulu s’abîmer tout entiers dans la jouissance, mentalement je m’écartais à mille lieues de là, pour partager la natte d’un sauvage ou l’antre garni de peaux de mouton de quelque berger des Abruzzes ! Aucun, en effet ne vient pour moi, aucun ne me connait, ils cherchent peut-être en moi une certaine femme comme je cherche en eux un certain homme ; n’y a-t-il pas, dans les rues, plus d’un chien qui s’en va flairant dans l’ordure pour trouver des os de poulet et des morceaux de viande ? de même, qui saura tous les amours exaltés qui s’abattent sur une fille publique, toutes les belles élégies qui finissent dans le bonjour qu’on lui adresse ? Combien j’en ai vu arriver ici le cœur gros de dépit et les yeux pleins de larmes ! les uns, au sortir d’un bal, pour résumer sur une seule femme toutes celles qu’ils venaient de quitter ; les autres, après un mariage, exaltés à l’idée de l’innocence ; et puis des jeunes gens, pour toucher à loisir leurs maîtresses à qui ils n’osent parler, fermant les yeux et la voyant ainsi dans leurs cœurs ; des maris pour se refaire jeunes et savourer les plaisirs faciles de leur bon temps, des prêtres poussés par le démon et ne voulant pas d’une femme, mais d’une courtisane, mais du péché incarné, ils me maudissent, ils ont peur de moi et ils m’adorent ; pour que la tentation soit plus forte et l’effroi plus grand, ils voudraient que j’eusse le pied fourchu et que ma robe étincelât de pierreries. Tous passent tristement, uniformément, comme des ombres qui se succèdent, comme une foule dont on ne garde plus que le souvenir du bruit qu’elle faisait, du piétinement de ces mille pieds, des clameurs confuses qui en sortaient. Sais-je, en effet, le nom d’un seul ? ils viennent et ils me quittent, jamais une caresse désintéressée, et ils en demandent, ils demanderaient de l’amour, s’ils l’osaient ! il faut les appeler beaux, les supposer riches, et ils sourient. Et puis ils aiment à rire, quelquefois il faut chanter, ou se taire ou parler. Dans cette femme si connue, personne ne s’est douté qu’il y avait un cœur ; imbéciles qui louaient l’arc de mes sourcils et l’éclat de mes épaules, tout heureux d’avoir à bon marché un morceau de roi, et qui ne prenaient pas cet amour inextinguible qui courait au-devant d’eux et se jetait à leurs genoux !

  J’en vois pourtant qui ont des amants, même ici, de vrais amants qui les aiment ; elles leur font une place à part, dans leur lit comme dans leur âme, et quand ils viennent elles sont heureuses . C’est pour eux, vois-tu, qu’elles se peignent si longuement les cheveux, qu’elles arrosent les pots de fleurs qui sont à leurs fenêtres ; mais moi, personne, personne ; pas même l’affection paisible d’un pauvre enfant, car on la leur montre du doigt, la prostituée, et ils passent devant elle sans lever la tête. Qu’il y a longtemps, mon Dieu que je ne suis sortie dans les champs et que je n’ai vu la campagne ! que de dimanches j’ai passés à entendre le son de ces tristes cloches, qui appellent tout le monde aux offices où je ne vais pas ! qu’il y a longtemps que je n’ai entendu le grelot des vaches dans le taillis ! Ah ! je veux m’en aller d’ici, je m’ennuie, je m’ennuie, je retournerai au pays, j’irai chez ma nourrice, c’est une brave femme qui me recevra bien. Quand j’étais toute petite, j’allais chez elle, et elle me donnait du lait ; je l’aiderai à élever ses enfants et à faire le ménage, j’irai ramasser du bois mort dans la forêt, nous nous chaufferons, le soir, au coin du feu quand il neigera, voilà bientôt l’hiver ; aux rois nous tirerons le gâteau. Oh ! elle m’aimera bien, je bercerai les enfants pour les endormir, comme je serai heureuse !

  Elle se tut, puis releva sur moi un regard étincelant à travers ses larmes, comme pour me dire : Est-ce toi ?

  Je l’avais écoutée avec avidité, j’avais regardé tous les mots sortir de sa bouche ; tâchant de m’identifier à la vie qu’ils exprimaient. Agrandie tout à coup à des proportions que je lui prêtais, sans doute, elle me parut une femme nouvelle, pleine de mystères ignorés et, malgré mes rapports avec elle, toute tentante d’un charme irritant et d’attraits nouveaux. Les hommes en effet, qui l’avaient possédée avaient laissé sur elle comme une odeur de parfum éteint, trace de passions disparues, qui lui faisaient une majesté voluptueuse ; la débauche la décorait d’une beauté infernale. Sans les orgies passées, aurait-elle eu ce sourire de suicide, qui la faisait ressembler à une morte se réveillant dans l’amour ? sa joue en était plus appâlie, ses cheveux plus élastiques et plus odorants, ses membres plus souples, plus mous et plus chauds ; comme moi, aussi, elle avait marché de joies en chagrins, couru d’espérances en dégoûts, des abattements sans nom avaient succédé à des spasmes fous ; sans nous connaître, elle dans sa prostitution et moi dans ma chasteté, nous avions suivi le même chemin, aboutissant au même gouffre ; pendant que je me cherchais une maîtresse, elle s’était cherché un amant, elle dans le monde, moi dans mon cœur, l’un et l’autre nous avaient fuis.

  — Pauvre femme, lui dis-je, en le serrant sur moi, comme tu as du souffrir !

  — Tu as donc souffert quelque chose de semblable ? me répondit-elle, est-ce que tu es comme moi ? est-ce que souvent tu as trempé ton oreiller de larmes ? est-ce que, pour toi, les jours de soleil en hiver sont aussi tristes ? Quand il fait du brouillard, le soir, et que je marche seule, il me semble que la pluie traverse mon cœur et la fait tomber en débris.

  — Je doute pourtant que tu te sois jamais aussi ennuyée que moi dans le monde, tu as eu des jours de plaisir, mais moi c’est comme si j’étais né en prison, j’ai mille choses qui n’ont pas vu la lumière.

  — Tu es si jeune cependant ! Au fait, tous les hommes sont vieux maintenant, les enfants se trouvent dégoûtés comme les vieillards, nos mères s’ ennuyaient quand elles nous ont conçus, on n’était pas comme cela autrefois, n’est-ce pas vrai ?

  — C’est vrai, repris-je, les maisons où nous habitons sont toutes pareilles, blanches et mornes comme des tombes dans des cimetières ; dans les vieilles baraques noires qu’on démolit la vie devait être plus chaude, on y chantait fort, on y brisait les brocs sur les tables, on y cassait les lits en faisant l’amour.

  — Mais qui te rend si triste ? tu as donc bien aimé ?

  — Si j’ai aimé, mon Dieu ! assez pour envier ta vie.

  — Envier ma vie ! dit-elle.

  — Oui, l’envier ! car, à ta place, j’aurais peut-être été heureux, car, si un homme comme tu le désires n’existe pas, une femme comme j’en veux doit vivre quelque part ; parmi tant de cœurs qui battent, il doit s’en trouver un pour moi.

  — Cherche-le ! cherche-le !

  — Oh ! si, j’ai aimé ! si bien que je suis saturé de désirs rentrés. Non, tu ne sauras jamais toutes celles qui m’ont égaré et que dans le fond de mon cœur j’abritais d’un amour angélique. Ecoute, quand j’avais vécu un jour avec une femme, je me disais : “Que ne l’ai-je connue depuis dix ans ! tous ses jours qui ont fui m’appartenaient, son premier sourire devait être pour moi, sa première pensée au monde, pour moi. Des gens viennent et lui parlent, elle leur répond, elle y pense, les livres qu’elle admire, j’aurais dû les lire. Que ne me suis-je promené avec elle, sous tous les ombrages qui l’ont abritée ! il y a bien des robes qu’elle a usées et que je n’ai pas vues, elle a entendu, dans sa vie, les plus beaux opéras, et je n’étais pas là ; d’autres lui ont déjà fait sentir les fleurs que je n’ai pas cueillies, je ne pourrai rien faire, elle m’oubliera, je suis pour elle comme un passant dans la rue”, et quand j’en étais séparé, je me disais : “Où est-elle ? que fait-elle, toute la journée, loin de moi ? à quoi son temps se passe-t-il ?”. Qu’une femme aime un homme, qu’elle lui fasse signe, et il tombe à genoux. Mais nous, quel hasard qu’elle vienne à nous regarder, et encore !… il faut être riche, avoir des chevaux
qui vous emportent, avoir une maison ornée de statues, donner des fêtes, jeter l’or, faire du bruit ; mais vivre dans la foule, sans pouvoir la dominer par le génie ou par l’argent, et demeurer aussi inconnu que le plus lâche et le plus sot de tous, quand on aspire à des amours du ciel, quand on mourrait avec joie sous le regard d’une femme aimée, j’ai connu ce supplice.

  — Tu es timide, n’est-ce pas ? elles te font peur .

  — Plus maintenant. Autrefois le bruit de leurs pas seulement me faisait tressaillir, je restais devant la boutique d’un coiffeur, à regarder les belles figures de cire avec des fleurs et des diamants dans les cheveux, roses, blanches et décolletées, j’ai été amoureux de quelques-unes ; l’étalage d’un cordonnier me tenait aussi en extase : dans ces petits souliers de satin, que l’on allait emporter pour le bal du soir, je plaçais un pied nu, un pied charmant avec des ongles fins, un pied d’albâtre vivant, tel que celui d’une princesse qui entre au bain ; les corsets suspendus devant les magasins de modes, et que le vent fait remuer, me donnaient également de bizarres envies ; j’ai offert des bouquets de fleurs à des femmes que je n’aimais pas, espérant que l’amour viendrait par là, je l’avais entendu dire ; j’ai écrit des lettres adressées à n’importe qui, pour m’attendrir avec la plume, et j’ai pleuré ; le moindre sourire d’une bouche de femme me faisait fondre le cœur en délices, et puis c’était tout ! Tant de bonheur n’était pas fait pour moi, qu’est-ce qui pouvait m’aimer ?

  — Attends ! attends encore un an, six mois ! demain peut-être, espère ! — J’ai trop espéré pour obtenir.

  — Tu parles comme un enfant, me dit-elle.

  — Non, je ne vois même pas d’amour dont je ne serais rassasié au bout de vingt-quatre heures, j’ai tant rêvé le sentiment que j’en suis fatigué, comme ceux que l’on a trop fortement chéris.

  — Il n’y a pourtant que cela de beau dans le monde.

  — À qui le dis-tu ? je donnerais tout pour passer une seule nuit avec une femme qui m’aimerait.

  — Oh ! si au lieu de cacher ton cœur, tu laissais voir tout ce qui bat dedans de généreux et de bon, toutes les femmes voudraient de toi, il n’en est pas une qui ne tâcherait d’être ta maîtresse ; mais tu as été plus fou que moi encore ! Fait-on cas des trésors enfouis ? les coquettes seules devinent les gens comme toi, et les torturent, mais les autres ne les voient pas. Tu valais pourtant la peine qu’on t’aimât ! Eh bien, tant mieux ! c’est moi qui t’aimerai, c’est moi qui serai ta maîtresse.

  — Ma maîtresse ?

  — Oh ! je t’en prie ! je te suivrai où tu voudras, je partirai d’ici, j’irai louer une chambre en face de toi, je te regarderai toute la journée. Comme je t’aimerai ! être avec toi, le soir, le matin, la nuit dormir ensemble, les bras passés autour du corps, manger à la même table, vis-à-vis l’un de l’autre, nous habiller dans la même chambre, sortir ensemble et te sentir près de moi ! Ne sommes-nous pas faits l’un pour l’autre ? tes espérances ne vont-elles pas bien avec mes dégoûts ? ta vie et la mienne, n’est-ce pas la même ? Tu me raconteras tous les ennuis de ta solitude, je te redirai les supplices que j’ai endurés ; il faudra vivre comme si nous ne devions rester ensemble qu’une heure, épuiser tout ce qu’il y a en nous de volupté et de tendresse, et puis recommencer, mourir ensemble. Embrasse-moi, embrasse-moi encore ! mets là ta tête sur ma poitrine, que j’en sente bien le poids, que tes cheveux me caressent le cou, que mes mains parcourent tes épaules, ton regard est si tendre.

  La couverture défaite, qui pendait à terre, laissait nos pieds à nu ; elle se releva sur les genoux et la repoussa sous le matelas, je vis son dos blanc se courber comme un roseau ; les insomnies de la nuit m’avaient brisé, mon front était lourd, les yeux me brûlaient les paupières, elle me les baisa doucement du bout des lèvres, ce qui me les rafraîchit comme si on me les eût humectés avec de l’eau froide. Elle aussi se réveillait de plus en plus de la torpeur où elle s’était laissée aller un instant ; irritée par la fatigue, enflammée par le goût des caresses précédentes, elle m’étreignit avec une volupté désespérée, en me disant : “Aimons-nous, puisque personne ne nous a aimés, tu es à moi !”

  Elle haletait, la bouche ouverte, et m’embrassait furieusement, puis tout à coup, se reprenant et passant sa main sur ses bandeaux dérangés, elle ajouta :

  — Ecoute, comme notre vie serait belle si c’était ainsi, si nous pouvions demeurer dans un pays où le soleil fait pousser des fleurs jaunes et mûrit les oranges, sur un rivage comme il y en a, à ce qu’il paraît, où les hommes portent des turbans, où les femmes ont des robes de gaze ; nous demeurerions couchés sous quelque grand arbre à larges feuilles, nous écouterions le bruit des golfes, nous marcherions ensemble au bord des flots pour ramasser des coquilles, je ferais des paniers avec des roseaux, tu irais les vendre ; c’est moi qui t’habillerais, je friserais tes cheveux dans mes doigts, je te mettrais un collier autour du cou, oh ! comme je t’aimerais ! comme je t’aime ! laisse-moi donc m’assouvir de toi !

  Me collant à sa couche, d’un mouvement impétueux, elle s’abattit sur tout mon corps et s’y étendit avec une joie obscène, pâle, frissonnante, les dents serrées avec une force enragée ; je me sentis entraîné comme dans un ouragan d’amour, des sanglots éclataient, et puis des cris aigus ; ma lèvre, humide de sa salive, pétillait et me démangeait ; nos muscles, tordus dans les mêmes nœuds, se serraient et entraient les uns dans les autres, la volupté se tournait en délire, la jouissance en supplice.

  Ouvrant tout à coup les yeux ébahis et épouvantés, elle dit :

  — Si j’allais avoir un enfant !

  Et passant, au contraire, à une câlinerie suppliante :

  — Oui, oui, un enfant ! un enfant de toi !… Tu me quittes ? nous ne nous reverrons plus, jamais tu ne reviendras ? penseras-tu à moi quelquefois ? j’aurai toujours tes cheveux là, adieu !… Attends, il fait à peine jour.

  Pourquoi donc avais-je hâte de la fuir ? est-ce que déjà je l’aimais ?

  Marie ne me parla plus, quoique je restasse bien encore une demi-heure chez elle ; elle songeait peut-être à l’amant absent. Il y a un instant, dans le départ où, par anticipation de tristesse, la personne aimée n’est déjà plus avec vous.

  Nous ne nous fîmes pas d’adieux, je lui pris la main, elle y répondit, mais la force pour la serrer était restée dans son cœur.

  Je ne l’ai plus revue.

  J’ai pensé à elle depuis, pas un jour ne s’est écoulé sans perdre à y rêver le plus d’heures possibles, quelquefois je m’enferme exprès et seul, je tâche de revivre dans ce souvenir ; souvent je m’efforce à y penser avant de m’endormir, pour la rêver la nuit, mais ce bonheur ne m’est pas arrivé.

  Je l’ai cherchée partout, dans les promenades, au théâtre, au coin des rues, sans savoir pourquoi j’ai cru qu’elle m’écrirait ; quand j’entendais une voiture s’arrêter à ma porte, je m’imaginais qu’elle allait en descendre. Avec quelle angoisse j’ai suivi certaines femmes ! avec quel battement de cœur je détournais la tête pour voir si c’était elle !

  La maison a été démolie, personne n’a pu me dire ce qu’elle était devenue.

  Le désir d’une femme que l’on a obtenue est quelque chose d’atroce et de mille fois pire que l’autre ; de terribles images vous poursuivent comme des remords. Je ne suis pas jaloux des hommes qui l’ont eue avant moi, mais je suis jaloux de ceux qui l’ont eue depuis ; une convention tacite faisait, il me semble, que nous devions nous être fidèles, j’ai été plus d’un an à lui garder cette parole, et puis le hasard, l’ennui, la lassitude du même sentiment peut-être, on fait que j’y ai manqué. Mais c’était elle que je poursuivais partout ; dans le lit des autres, je rêvais à ses caresses.

  On a beau, par-dessus les passions anciennes, vouloir en semer de nouvelles, elles reparaissent toujours, il n’y a pas de force au monde pour en arracher les racines. Les voies romaines, où roulaient les chars consulaires, ne servent plus depuis longtemps, mille nouveaux sentiers les traversent, l
es champs se sont élevés dessus, le blé y pousse, mais on en aperçoit encore la trace, et leurs grosses pierres ébrèchent les charrues quand on laboure.

  Le type dont presque tous les hommes sont en quête n’est peut-être que le souvenir d’un amour conçu dans le ciel ou dès les premiers jours de la vie ; nous sommes en quête de tout ce qui s’y rapporte, la seconde femme qui vous plaît ressemble presque toujours à la première, il faut un grand degré de corruption ou un cœur bien vaste pour tout aimer. Voyez aussi comme ce sont éternellement les mêmes dont vous parlent les gens qui écrivent, et qu’ils décrivent cent fois sans jamais s’en lasser. J’ai connu un ami qui avait adoré, à 15 ans, une jeune mère qu’il avait vue nourrissant son enfant ; de longtemps il n’estima que les tailles de poissarde, la beauté des femmes sveltes lui était odieuse.

  À mesure que le temps s’éloignait, je l’en aimais de plus en plus ; avec la rage que l’on a pour les choses impossibles, j’inventais des aventures pour la retrouver, j’imaginais notre rencontre, j’ai revu ses yeux dans les globules bleus des fleuves, et la couleur de sa figure dans les feuilles du tremble, quand l’automne les colore. Une fois, je marchais vite dans un pré, les herbes sifflaient autour de mes pieds en m’avançant, elle était derrière moi ; je me suis retourné, il n’y avait personne. Un autre jour, une voiture a passé devant mes yeux, j’ai levé la tête, un grand voile blanc sortait de la portière et s’agitait au vent, les roues tournait, il se tordait, il m’appelait, il a disparu, et je suis retombé seul, abîmé, plus abandonné qu’au fond d’un précipice.

 

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