by Jean M. Auel
Si elle demeurait en ces lieux, si elle s’unissait à Ranec, elle ne serait pas trop loin du Clan. Elle pourrait aller chercher Durc et le ramener. Ranec était bon pour Rydag. Peut-être ne s’opposerait-il pas à la présence à son foyer d’un enfant d’esprits mêlés. Peut-être pourrait-elle adopter officiellement Durc, faire de lui un Mamutoï.
La seule idée qu’elle puisse retrouver son fils l’emplissait d’impatience. Peut-être était-il préférable que Jondalar partît sans elle. Si elle l’accompagnait, elle ne reverrait jamais son fils. Mais, s’il s’en allait seul, jamais elle ne reverrait Jondalar.
Le choix avait été fait pour elle. Elle resterait. Elle s’unirait à Ranec. Elle essayait d’en voir le côté positif, de se convaincre que tout était ainsi pour le mieux. Ranec était un homme de grande qualité, il l’aimait, il tenait à sa présence auprès de lui. Et elle avait de l’affection pour lui. Il ne serait pas si terrible de vivre avec lui. Elle pourrait avoir des enfants. Elle pourrait retrouver Durc, le ramener auprès d’eux. Un homme de bien, son propre peuple, son fils enfin retrouvé. C’était plus qu’elle n’en avait espéré, naguère. Que pouvait-elle demander de plus ? Oui, quoi d’autre, si Jondalar s’en allait ?
Je vais le lui dire, pensa-t-elle. Je vais dire à Ranec qu’il peut annoncer notre Promesse aujourd’hui. Elle se leva, se dirigea vers le Foyer du Renard, mais une seule idée occupait son esprit. Jondalar allait partir sans elle. Jamais plus elle ne le reverrait. Au moment où elle prenait pleinement conscience de cette vérité, elle en sentit tout le poids écrasant et elle dut fermer les paupières pour lutter contre sa souffrance.
— Talut ! Nezzie !
Ranec sortit en courant de l’habitation, chercha du regard le chef du Camp et sa mère adoptive. Il les découvrit enfin mais il était dans un tel état d’agitation qu’il pouvait à peine parler.
— Elle a dit oui ! Ayla a dit oui ! La Promesse, nous allons l’annoncer ! Ayla et moi !
Il ne voyait même pas Jondalar. S’il l’avait vu, cela n’aurait rien changé. Ranec était incapable de penser à rien d’autre qu’à la femme qu’il aimait. La femme qu’il désirait plus que tout au monde avait accepté de lui appartenir. Nezzie, elle, vit Jondalar, elle le vit blêmir, chercher un appui en s’accrochant à l’une des défenses de mammouth qui formaient l’arche d’entrée, elle lut la douleur sur son visage. Finalement, il lâcha prise, et descendit la pente qui menait à la rivière. Une inquiétude fugitive traversa l’esprit de Nezzie. La rivière était en crue. Il serait facile d’y entrer, de se mettre à nager et de se laisser emporter.
— Mère, je ne sais pas comment m’habiller pour aujourd’hui. Je n’arrive pas à me décider, gémit Latie, très agitée par la perspective de cette cérémonie qui allait reconnaître sa position.
— Allons voir ça, dit Nezzie.
Elle jeta un ultime regard vers la rivière. Jondalar n’était plus en vue.
28
Jondalar passa la matinée entière à marcher le long de la rivière.
L’esprit en tumulte, il entendait sans cesse les cris de joie de Ranec. Ayla avait accepté. Ils annonceraient leur Promesse lors de la cérémonie, ce soir-là. Il avait beau se répéter qu’il s’y était toujours attendu, devant la réalité, il comprenait qu’il n’en était rien. La nouvelle lui avait asséné un coup plus violent qu’il ne l’aurait jamais imagine. Comme Thonolan après la mort de Jetamio, il avait envie de mourir.
Les craintes de Nezzie n’étaient pas sans fondement. Jondalar n’avait aucun but particulier en descendant vers la rivière : il avait pris cette direction par hasard. Toutefois, quand il atteignit la rive, il trouva le courant turbulent étrangement attirant. Il semblait lui offrir la paix, un soulagement à sa souffrance, à son chagrin, à la confusion de ses pensées. Pourtant, Jondalar se contenta de le contempler longuement. Une autre force, tout aussi puissante, le retenait. Contrairement à Jetamio, Ayla n’était pas morte. Aussi longtemps qu’elle resterait en vie, il pouvait encore nourrir une petite flamme d’espoir. Mais, plus encore, il craignait pour la sécurité d’Ayla.
Un peu au-dessus de la rivière, il trouva un endroit isolé, dissimulé par des buissons et des petits arbres. Là, il essaya de se préparer à l’épreuve des festivités de la soirée, au nombre desquelles compterait la Cérémonie de la Promesse. Ce n’était pas, se disait-il, comme si elle allait s’unir définitivement à Ranec le soir même. Elle devait seulement promettre de créer avec lui un foyer, dans un avenir plus ou moins proche. Jondalar avait fait une promesse, lui aussi : il avait dit à Mamut qu’il partirait après la Fête du Printemps. Pourtant, ce n’était pas ce serment qui le retenait. Ayla, il le savait, allait affronter un péril inconnu. Il n’avait pas la moindre idée de la nature de ce péril, il ignorait comment il pourrait l’en défendre mais il ne pouvait s’en aller en un tel moment, même s’il devait l’entendre faire sa Promesse à Ranec. Mamut, qui était versé dans les voies des esprits, pressentait qu’elle courait un danger. Jondalar devait donc s’attendre au pire.
Vers midi, Ayla annonça à Mamut qu’elle allait entamer ses préparatifs pour la cérémonie de la racine. A plusieurs reprises, ils étaient revenus sur tous les détails. Elle se sentait raisonnablement sûre de n’avoir rien oublié d’important. Elle rassembla des vêtements propres, une peau de daim, souple et absorbante, et plusieurs autres objets. Au lieu de sortir par l’abri des chevaux, elle se dirigea vers le foyer de la cuisine. Elle ressentait en même temps le désir de voir Jondalar et l’espoir de ne pas le trouver. Elle fut à la fois déçue et soulagée en découvrant que Wymez était seul dans l’aire du travail des outils. Il n’avait pas vu Jondalar depuis le début de la matinée, lui dit-il, mais il lui remit gentiment le petit nodule de silex qu’elle demandait.
Elle gagna le bord de la rivière et en remonta le cours sur une certaine distance, à la recherche d’un lieu approprié. Elle s’arrêta à l’endroit où un petit cours d’eau rejoignait la rivière. Le ruisseau avait contourné un affleurement rocheux qui formait sur l’autre rive une berge plus élevée et protégeait du vent. Un écran de buissons et d’arbres tout juste bourgeonnants enfermait un coin isolé, abrité et procurait en même temps du bois sec de l’année précédente.
Depuis sa position en surplomb, Jondalar, replié sur ses pensées, regardait sans vraiment le voir le courant furieux de l’eau boueuse. Il n’avait pas pris conscience des ombres changeantes à mesure que le soleil montait dans le ciel et il sursauta en entendant quelqu’un approcher. Il n’était pas d’humeur à soutenir une conversation aimable, amicale, en ce jour de fête pour les Mamutoï. Vivement, il se glissa derrière quelques buissons pour attendre, sans se faire voir, que l’arrivant se fût éloigné. Lorsqu’il vit Ayla s’arrêter et, manifestement, s’installer, il ne sut plus que faire. Il songea bien à s’esquiver sans bruit, mais Ayla était trop bonne chasseuse : elle l’entendrait, à coup sûr. Il pensa alors à émerger tout simplement des buissons, en prétextant un besoin pressant, et à poursuivre son chemin. Mais il n’en fit rien.
Aussi discrètement que possible, il demeura caché pour observer la jeune femme. Il ne pouvait s’en empêcher, il ne pouvait même pas s’obliger à détourner les yeux, même lorsque, très vite il comprit qu’elle se préparait à la cérémonie de la soirée et qu’elle se croyait seule. Au début, il s’était senti submergé par la joie de sa présence mais il ne tarda pas à être fasciné. Il ne pouvait faire autrement que la regarder.
Rapidement, Ayla alluma un feu à l’aide d’une pierre à feu et d’un morceau de silex. Elle y mit des pierres à chauffer. Elle voulait rendre le rite de purification aussi proche que possible de celui du Clan mais elle ne pouvait éviter certaines différences. Elle avait envisagé de faire du feu à la manière du Clan, en faisant tourner rapidement entre ses paumes une baguette sèche sur un morceau de bois plat, jusqu’à faire naître une braise. Mais, dans le Clan, les femmes n’étaient pas censées transporter du feu ni en allumer pour une cérémonie rituelle. Si elle devait braver la trad
ition en allumant son propre feu, décida Ayla, elle pouvait aussi bien se servir de sa pyrite.
Les femmes, toutefois, avaient le droit de se fabriquer des couteaux et d’autres outils en pierre, à condition de ne pas s’en servir pour la chasse. Ayla avait décidé qu’il lui fallait un nouveau sac à amulettes. Celui qu’elle portait, un sac mamutoï abondamment orné, ne conviendrait pas à un rite du Clan. Pour en fabriquer un autre, conforme aux règles du Clan, elle avait besoin d’un couteau pareil à ceux du Clan, et c’était pour cette raison qu’elle avait demandé à Wymez un nodule de silex. Elle chercha sur la berge, trouva un galet de la grosseur d’un poing, poli et arrondi par l’eau, qui lui servirait de percuteur. Elle l’utilisa pour débarrasser de sa gangue de craie le petit nodule, tout en commençant à le façonner grossièrement. Elle n’avait pas fait ses propres outils depuis un certain temps mais elle n’avait pas oublié la technique et elle ne tarda pas à s’absorber dans sa tâche.
Quand elle eut fini, la pierre luisante, d’un gris sombre, avait une forme plus ou moins ovale, avec une extrémité aplatie. Elle l’examina, en fit encore sauter un éclat. Après quoi, visant soigneusement, elle détacha un fragment au bord de l’extrémité aplatie, sur la partie la plus étroite de l’ovale. Elle tourna ensuite la pierre pour la mettre en position sous un angle précis et la frappa à l’endroit qu’elle venait d’ébrécher. Une plaque assez épaisse se détacha : elle avait la forme de l’extrémité ovale et possédait un tranchant affilé comme un rasoir.
Ayla n’avait pour outil qu’un galet mais elle avait travaillé avec l’habileté et la rapidité que donne l’expérience, et elle avait obtenu un couteau extrêmement tranchant, parfaitement utilisable. Elle n’avait aucune intention de le garder. Il n’avait pas de manche, il fallait le tenir à pleine main. Avec tous les outils plus raffinés qu’elle possédait maintenant, la plupart munis de manches, elle n’avait pas besoin d’un couteau du Clan, excepté pour cet usage particulier.
Sans prendre le temps d’émousser le tranchant pour rendre l’instrument plus facile à tenir et moins dangereux, Ayla coupa sur le bord de sa peau de daim une longue lanière et tailla, sur une extrémité du reste, un petit cercle. Elle reprit ensuite le galet qui lui servait de percuteur. Quand elle eut détaché avec soin deux ou trois morceaux de silex, le couteau se trouva transformé en poinçon à la pointe très aiguë. Elle l’utilisa pour percer des trous sur tout le pourtour du cercle de peau, passa enfin la lanière à travers ces trous.
Elle détacha de son cou la bourse décorée, l’ouvrit, fit glisser au creux de sa main les objets sacrés, les emblèmes de son totem. Après les avoir examinés un instant, elle les serra contre sa poitrine, avant de les placer dans le nouveau petit sac plus simple, à la mode du Clan, et de serrer le lacet. Elle avait pris la décision de rester chez les Mamutoï et de s’unir à Ranec mais elle ne s’attendait pas découvrir un signe de son Lion des Cavernes pour lui confirmer que cette décision était la bonne.
Elle alla jusqu’au cours d’eau, emplit la corbeille à cuire, y ajouta les pierres brûlantes tirées du feu. Il était trop tôt dans l’année pour trouver la racine de saponaire, et les environs étaient trop découverts pour la prêle, qui poussait dans des lieux ombreux, humides. Il fallait trouver d’autres herbes.
Après avoir jeté dans l’eau chaude des fleurs séchées de cœlanthus, qui dégageaient un parfum agréable tout en moussant, elle ajouta des pointes de fougère et quelques fleurs d’ancolie cueillies en chemin, enfin de jeunes rameaux de bouleau, pour leur odeur de gaulthérie. Elle mit la corbeille de côté. Elle avait longuement réfléchi à ce qu’elle utiliserait pour remplacer l’insectifuge à base d’acide extrait d’une infusion de fougère pour tuer puces et poux. Finalement, Nezzie, sans le vouloir, lui avait fourni la solution.
Ayla se déshabilla vivement, prit les deux corbeilles tressées et étanches et descendit vers la rivière. L’une d’elles contenait le mélange aromatique qu’elle venait de faire, l’autre l’urine de plusieurs jours.
Une fois déjà, Jondalar avait demandé à la jeune femme de lui montrer les techniques employées par le Clan pour tailler les pierres et il avait été impressionné. Mais il était maintenant fasciné en la regardant travailler, avec tant d’assurance et d’habileté. Sans marteaux en os, sans perçoirs, elle fabriquait rapidement les outils dont elle avait besoin. Il se demandait s’il aurait fait aussi bien à l’aide d’un simple galet. Brusquement, son estime pour la technique de taille de la pierre des Têtes Plates monta d’un cran.
Le petit sac fut rapidement fait, lui aussi. Il était rudimentaire, mais la conception en était ingénieuse. Ce fut seulement lorsqu’il la vit manier les différents objets qu’il devait contenir et qu’il remarqua la manière dont elle les tenait qu’il prit conscience d’une certaine mélancolie dans son attitude, d’une aura de tristesse et de chagrin. Elle aurait dû être pleine de joie mais elle semblait malheureuse. Non, se dit-il, c’était sans doute un effet de son imagination.
Il retint son souffle quand elle commença de se dévêtir. La vue de sa beauté épanouie faisait naître en lui un désir qui l’accablait. Mais le souvenir de son comportement sans nom suffisait à le retenir. Durant l’hiver, elle s’était remise à coiffer ses cheveux en nattes, un peu comme Deegie, et, lorsqu’elle dénoua sa longue chevelure, il se rappela la première fois où il l’avait vue nue, dans la chaleur d’été de sa vallée, dorée, superbe, encore mouillée après son bain. Il s’ordonna de ne plus la regarder et il aurait pu le faire quand elle entra dans la rivière mais, au prix même de la vie, il aurait été incapable de tout mouvement.
Ayla entama sa toilette avec, l’urine. Le liquide ammoniacal était corrosif, il dégageait une odeur forte mais il dissolvait sur sa peau, sur ses cheveux, les huiles et les graisses et il tuait les poux, les puces qu’elle avait pu attraper. Il avait même tendance à éclaircir la chevelure. Les eaux de la rivière, après la fonte des glaces, étaient encore très froides mais le choc était revigorant, et le bouillonnement du flot, riche en sable gréseux, même près de la berge où il était plus calme, emportait à la fois la saleté et l’odeur pénétrante de l’ammoniac.
Le nettoyage énergique et le froid de l’eau avaient rosé la peau d’Ayla de la tête aux pieds. Elle frissonna en sortant de la rivière, mais le mélange parfumé qu’elle avait préparé était encore tiède et mousseux. Elle en frotta son corps entier et ses cheveux. Pour se rincer elle se dirigea vers un petit bassin d’eau calme, près du confluent avec le ruisseau : l’eau y était moins boueuse que celle de la rivière. Lorsqu’elle en émergea, elle s’enveloppa de sa peau de daim, afin de se sécher, pendant qu’elle démêlait sa chevelure à l’aide de sa brosse dure et d’une épingle à cheveux en ivoire. Fraîche et toute propre, elle se sentait bien.
Tout en étant dévoré du désir douloureux de la rejoindre, de lui faire partager les Plaisirs, Jondalar éprouvait une certaine satisfaction à se repaître du spectacle. Ce n’était pas seulement la vue de ce corps magnifique, riche en courbes féminines et pourtant ferme et bien modelé, dont les muscles plats et durs évoquaient la force. Il prenait plaisir à l’observer, à suivre ses mouvements naturellement gracieux. Qu’elle fît du feu, qu’elle façonnât l’outil dont elle avait besoin, elle savait précisément comment s’y prendre et ne gaspillait pas un geste. Jondalar avait toujours admiré son adresse, la sûreté de ses gestes, son intelligence. Tout cela faisait partie de l’attirance qu’elle exerçait sur lui. La compagnie d’Ayla lui avait manqué, et le seul fait de l’observer apaisait le besoin de se trouver près d’elle.
Ayla était presque rhabillée quand un jappement du jeune loup lui fit lever la tête. Elle sourit.
— Loup ! Que fais-tu là ? Tu as échappé à la surveillance de Rydag ? Le louveteau bondit vers elle pour la saluer, tout heureux de l’avoir retrouvée. Elle entreprit de rassembler ses affaires, et le petit animal se mit à flairer un peu partout.
— Eh bien, maintenant que tu m’as découverte, nous pouvons rentrer. Viens,
Loup. Allons-nous-en. Mais que cherches-tu dans ces buissons ? ... Jondalar !
La stupeur coupa la parole à la jeune femme quand elle reconnut ce qui avait attiré l’attention du louveteau. Jondalar, de son côté, était trop embarrassé pour parler. Mais leurs regards se retenaient, en disaient plus long que des mots. Ni l’un ni l’autre ne pouvaient croire à ce qu’ils voyaient. Finalement, Jondalar tenta une explication :
— Je... je passais par ici et...
Il renonça, n’essaya même pas de formuler entièrement une mauvaise excuse. Il se détourna, s’éloigna rapidement. Plus lentement, Ayla reprit à sa suite le chemin du Camp, et gravit lourdement la pente. Elle s’expliquait mal le comportement de Jondalar. Elle ignorait depuis combien de temps il était là, mais il l’avait observée, elle le savait, elle se demandait pourquoi il s’était tenu caché. Que devait-elle en penser ? Elle passa par le foyer des chevaux, qui donnait sur le Foyer du Mammouth, enfin d’aller retrouver Mamut et achever ses préparatifs. A ce moment, elle se rappela le regard de Jondalar...
Jondalar ne revint pas tout de suite au Camp. Il n’était pas sûr de pouvoir affronter, pour le moment, Ayla ou n’importe qui d’autre. Au pied du sentier qui remontait vers l’habitation, il fit demi-tour, redescendit, se retrouva bientôt au même endroit isolé.
Il s’approcha des restes du feu, s’agenouilla, chercha de la main la légère chaleur qui subsistait. Il ferma à demi les paupières pour se remémorer la scène qu’il avait secrètement épiée. Lorsqu’il rouvrit les yeux, il vit le nodule de silex, qu’elle avait abandonné. Il le ramassa, l’examina. Il aperçut les éclats qu’elle avait fait sauter, en remit quelques-uns à leur place pour étudier le travail de plus près. Non loin des morceaux de peau de daim, il trouva le perçoir. Il le prit, l’examina. Il n’était pas fait de la manière à laquelle il était accoutumé, il semblait trop simple, presque grossier. Ce n’en était pas moins un bon outil, efficace. Et bien acéré, se dit-il, quand il s’y blessa le doigt.