HÉSITATION

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HÉSITATION Page 40

by Stephenie Meyer


  Je pleurais à chaudes larmes, à présent.

  — Bella, chut, Bella.

  Il me prit dans ses bras, je ne résistai pas, cette fois.

  — J’aurais dû… lui dire… j’aurais dû…

  Quoi ? Y avait-il une manière correcte de lui annoncer la nouvelle ?

  — Il aurait été mieux de… si seulement il ne l’avait pas appris ainsi.

  — Veux-tu que je tente de le ramener pour que tu lui expliques ? Il nous reste un peu de temps.

  Edward était torturé par les remords. J’acquiesçai.

  — Regagne la tente. Je reviens tout de suite.

  Il disparut si vite que, quand je relevai les yeux, je découvris que j’étais seule. Un nouveau sanglot secoua ma poitrine. Décidément, j’étais garce avec tout le monde. Étais-je donc incapable de ne pas abîmer tous ceux que j’approchais ? J’avais du mal à saisir pourquoi cette vérité ne m’apparaissait que maintenant, alors que j’aurais dû en être consciente depuis longtemps. Pour autant, c’était la première fois que Jacob avait une réaction aussi forte, qu’il perdait son insolente assurance et s’autorisait à dévoiler l’intensité de son chagrin. L’écho de sa souffrance résonnait encore en moi, juste à côté de ma douleur de faire du mal aux autres… à Jacob, à Edward. Et celle de ne pas réussir à être indifférente envers Jake, la seule solution pourtant.

  J’étais égoïste. J’étais cruelle. Je torturais ceux que j’aimais.

  J’étais Cathy des Hauts de Hurlevent, si ce n’est que ceux entre lesquels je devais choisir, ni diaboliques ni veules, valaient mieux que les siens. Or, j’étais là, à me lamenter sur mon sort, inutile. Exactement comme elle. Il était hors de question que ma souffrance continue d’influencer mes décisions. C’était peu, certes, et beaucoup trop tard, mais il était temps que j’agisse correctement. Si Edward échouait à ramener Jacob, ce serait tant pis pour moi. Je n’aurais plus qu’à poursuivre ma route. Je ne verserais plus une larme pour Jake devant Edward. Je ne verserais plus de larmes du tout. J’essuyai celles qui me coulaient sur les joues en me jurant que c’étaient les dernières.

  Hélas… si Edward réussissait, il me faudrait dire à Jacob de partir pour ne plus jamais revenir. Pourquoi était-ce si difficile, si douloureux ? Tellement plus que quitter mes autres amis, Angela, Mike. C’était injuste. Cela n’aurait pas dû m’atteindre. J’avais ce que je désirais. Il m’était impossible d’avoir les deux, parce que Jacob refusait d’être seulement mon ami. Il était temps que je renonce à ce leurre. J’avais eu des exigences ridicules. Jacob n’avait pas de place dans mon existence, force m’était de l’admettre. Il ne pouvait être le Jacob que j’aimais alors que j’avais décidé d’appartenir à un autre.

  Lentement, je retournai vers la tente. En passant, je jetai un coup d’œil à Seth qui n’avait pas bougé de sa couche, et je me détournai, honteuse. J’avais l’impression d’être une Gorgone, mes cheveux pareils à des serpents. Je tirai dessus, tentant de me recoiffer, renonçai. Quelle importance, de toute façon ?

  Prenant la gourde accrochée au piquet de la tente, je la secouai. Il y eut un bruit d’eau. Je la dévissai, bus une gorgée pour me rincer la bouche. Le liquide glacé me brûla les lèvres. Edward avait apporté de la nourriture aussi, mais je n’avais pas faim. Je me mis à arpenter les alentours, sous le regard vigilant de Seth. Je pensais à lui comme au jeune garçon, pas comme au loup gigantesque ; comme à Jacob plus jeune. J’aurais voulu lui demander d’aboyer pour me prévenir du retour de mon ami. Je me retins. Qu’il revînt ou non ne comptait guère. Il serait peut-être même mieux qu’il ne réapparût pas. Dommage que je ne fusse pas en mesure de rappeler Edward.

  Soudain, Seth gémit et bondit sur ses pattes.

  — Qu’y a-t-il ?

  M’ignorant, il trottina vers la lisière et pointa le museau en direction de l’ouest. Il se mit à glapir.

  — Les autres arrivent, Seth ? Ils sont dans la prairie ?

  Tournant la tête vers moi, il poussa un petit jappement avant de reprendre ses geignements, oreilles plaquées en arrière. Pourquoi étais-je aussi sotte ? À quoi avais-je songé en envoyant Edward au loin ? Comment allais-je savoir ce qui se passait, maintenant ? Je ne parlais pas le loup, moi.

  Un frisson de peur me parcourut l’échine. Et s’il était trop tard ? Et si Jacob et Edward se rapprochaient trop du champ de bataille ? Si Edward décidait de participer à la bagarre ? Ma peur se transforma en une terreur qui me noua le ventre. Mais… un instant ! Et si les gémissements de Seth avaient une tout autre raison ? Si Jacob et Edward en étaient venus aux mains ? Ils n’oseraient pas, non ?

  Soudain, une certitude atroce m’étreignit. Bien sûr que si ! Ils ne se gêneraient pas. Il suffisait que l’un d’eux prononçât le mot de trop. Je songeai à l’échauffourée de ce matin dans la tente : aurait-elle pu tourner à la rixe ? Avais-je minimisé les choses ?

  À la réflexion, je méritais amplement de perdre les deux.

  Cette fois, ce fut mon cœur qui se glaça d’effroi, et je faillis m’évanouir. Mais, à cet instant, Seth gronda puis regagna son lit d’aiguilles. Cela eut le don de m’apaiser aussitôt, tout en m’irritant. Ne pouvait-il au moins gratter un message dans la terre pour expliquer de quoi il retournait ?

  À force de faire les cent pas, je transpirais sous mes couches de vêtements. Je jetai ma veste dans la tente, repartis à tourner en rond au pied de la falaise. Soudain, Seth se releva, le poil hérissé. Je scrutai les environs, n’aperçus rien. Si ce loup continuait à se comporter ainsi, je lui balançais une pomme de pin à la tête. Il poussa un grognement, signal d’avertissement, retourna à la lisière des bois, et je ravalai mon impatience.

  — Ce n’est que nous, Seth, l’interpella Jacob, à distance.

  Mon cœur battit la chamade en entendant sa voix. Ce n’était plus l’angoisse, mais la simple peur de ce qui m’attendait. Le soulagement m’était interdit ; de plus, il ne me faciliterait en rien la tâche. Je distinguai d’abord Edward, ses traits indéchiffrables. Seth approcha pour le saluer, plongeant ses prunelles dans les siennes. Edward le gratifia d’un hochement de menton, et son front se plissa sous l’effet de l’inquiétude.

  — Il ne manquait plus que cela, marmonna-t-il, comme pour lui-même. Ce n’est pourtant pas une grosse surprise, ajouta-t-il à l’intention du loup. Dommage que le temps nous soit aussi compté. S’il te plaît, envoie un message à Sam pour qu’il demande à Alice de réajuster notre plan de bataille.

  Seth baissa la tête, ce qui me mit en rogne. Comme par hasard, il était à présent capable de communiquer. Énervée, je pivotai la tête pour découvrir Jacob qui me tournait le dos. J’attendis qu’il daigne me faire face.

  — Bella, murmura Edward, soudain à mon côté. Ça se gâte. Seth et moi allons tenter de régler cela. Je ne m’éloigne pas beaucoup, mais rassure-toi, je n’écouterai pas. Quelle que soit ta décision, je sais que tu tiens à la prendre seule.

  Je le contemplai. Son regard n’exprimait que de l’inquiétude. Sa générosité était illimitée. Jamais je n’avais aussi peu mérité qu’il m’aime. Seule sa dernière phrase avait trahi sa souffrance. De nouveau, je me jurai sur-le-champ de cesser de le blesser. Telle serait ma mission désormais. J’étais si bouleversée que je ne songeai même pas à m’enquérir des complications qu’il avait évoquées.

  — Ne tarde pas, murmurai-je.

  Il déposa un léger baiser sur mes lèvres, puis s’enfonça dans la forêt en compagnie de Seth. Jacob était toujours sous le couvert des arbres, son visage invisible.

  — Je n’ai pas beaucoup de temps, Bella, marmonna-t-il. Et si on en finissait ?

  J’avalai ma salive.

  — Allez, vas-y.

  Je pris une profonde inspiration.

  — Je suis désolée d’être une aussi mauvaise personne, chuchotai-je. Navrée de m’être montrée aussi égoïste. J’aimerais ne t’avoir jamais rencontré, cela m’aurait évité de te torturer. C’est terminé, je te le promets. Je resterai à l’écart, je va
is quitter l’État, de toute façon. Tu ne me verras plus.

  — Voilà qui ne ressemble guère à des excuses, rétorqua-t-il, amer.

  — Explique-moi comment m’y prendre alors, soufflai-je, la gorge si serrée que j’étais incapable de produire un son plus audible.

  — Et si je ne voulais pas que tu t’en ailles ? Si je préférais que tu restes, égoïste ou non ? Tu essayes de réparer, mais n’ai-je pas mon mot à dire ?

  — Tes paroles ne serviraient à rien, Jake. J’ai eu tort de continuer à te fréquenter alors que nous désirions des choses différentes. La situation ne fera qu’empirer, je continuerai à te blesser. Or, je ne le veux plus. Je déteste ça.

  Ma voix se brisa, il soupira.

  — Arrête ça. N’ajoute rien. Je comprends.

  J’aurais voulu lui avouer combien il allait me manquer, je me mordis cependant la langue. Yeux fixés sur le sol, il garda le silence un moment. Je luttai contre l’envie de le prendre dans mes bras pour le consoler. Soudain, il releva la tête.

  — Figure-toi que tu n’es pas la seule à être capable de te sacrifier, lança-t-il d’une voix raffermie. C’est un jeu qu’on peut jouer à deux.

  — Pardon ?

  — Moi aussi, j’ai mal agi. Je t’ai compliqué la tâche plus que nécessaire, j’aurais pu renoncer dès le début. Je t’ai blessée également.

  — Non, c’est ma faute.

  — Ne compte pas sur moi pour te laisser porter le chapeau, Bella. Ni pour t’octroyer le beau rôle. Moi aussi, je peux me sacrifier.

  — Mais de quoi parles-tu ?

  La lueur de folie qui illuminait son regard m’effrayait. Il fixa un instant le soleil, me sourit.

  — Il va y avoir un sérieux grabuge, là-bas, tout à l’heure. Il ne me sera guère difficile d’en profiter pour tirer ma révérence.

  Ses paroles s’insinuèrent dans mon esprit une à une, lentement. J’en eus le souffle coupé. J’avais eu l’intention d’éliminer Jacob de ma vie, mais je me rendais compte seulement maintenant à quel point il faudrait pour cela que je tranche dans le vif.

  — Non, Jake ! hurlai-je. Non, non, non ! Je t’en supplie.

  — Oh ! s’il te plaît, Bella. Ça sera plus simple pour tout le monde. Tu n’auras même pas à déménager.

  — Non ! Je te l’interdis, Jacob ! Je t’en empêcherai.

  — Ah oui ? ricana-t-il. Et comment ?

  — Je t’en conjure, reste avec moi.

  Aurais-je été en état de bouger, je me serais jetée à ses genoux.

  — Un quart d’heure ? Le temps que je rate la bagarre du siècle, puis tu fileras dès que tu me croiras à nouveau en sécurité ? Tu rigoles ?

  — Je ne filerai pas. J’ai changé d’avis. Nous trouverons une solution, Jacob, il y a toujours une solution. Ne pars pas.

  — Menteuse !

  — Tu sais que je ne sais pas mentir. Lis dans mes yeux. Je resterai avec toi si tu acceptes.

  Ses traits se durcirent.

  — Et quoi, ensuite ? Tu me proposeras d’être témoin à ton mariage ?

  Cette pique me laissa un instant sans réaction.

  — S’il te plaît, répétai-je, piteusement.

  — C’est bien ce que je pensais, conclut-il, en reprenant le contrôle de lui, même si la sauvagerie de ses yeux perdura. Je t’aime, Bella.

  — Je t’aime aussi, Jacob.

  Il sourit.

  — Je le sais depuis longtemps.

  Sur ce, il tourna les talons pour s’éloigner.

  — Tout ce que tu voudras ! hurlai-je d’une voix étranglée. Je ferai tout ce que tu voudras. Mais reviens !

  Il s’arrêta, pivota lentement.

  — Je ne crois pas que tu mesures la portée de tes paroles.

  — Reste, le suppliai-je.

  — Non, objecta-t-il, tu ne me retiendras pas. En revanche, je laisserai peut-être le destin décider, ajouta-t-il après une brève pause.

  — Comment ça ?

  — Je ne commettrai aucun acte délibéré. Je me battrai au côté des miens, et advienne que pourra. Mais uniquement si tu réussis à me convaincre que tu souhaites vraiment mon retour, et non en jouant les grandes âmes.

  — De quelle façon ?

  — Demande.

  — Reviens, chuchotai-je.

  Comment osait-il douter de moi ? Il secoua la tête, me sourit de nouveau.

  — Je ne pensais pas à ça.

  Il me fallut plusieurs secondes pour saisir ce qu’il entendait, durant lesquelles il me toisa d’un air supérieur, sûr de ma réponse. Quand je compris enfin, les mots sortirent sans que je réfléchisse.

  — Embrasse-moi, Jacob !

  Sous la surprise, il écarquilla les yeux. Très vite, l’étonnement le céda à la suspicion.

  — Tu n’es pas sérieuse ?

  — Embrasse-moi, Jacob. Embrasse-moi et reviens-moi.

  Il hésita. Il commença à s’éloigner, se ravisa, fit un pas incertain dans ma direction, puis un second. Il posa sur moi un regard interrogateur que je soutins. Il se balança sur ses talons et, soudain, plongea vers moi, me rejoignit en trois enjambées. Ayant deviné qu’il tirerait avantage de la situation, je ne bronchai pas, paupières closes, poings serrés. Ses mains se refermèrent autour de mes joues, et ses lèvres trouvèrent les miennes avec une soif proche du désespoir.

  Je sentis sa colère lorsque sa bouche se heurta à ma résistance passive. Une de ses paumes se plaqua sur ma nuque, agrippant la racine de mes cheveux, tandis que l’autre, posée sur mon épaule, me collait à lui. Elle descendit le long de mon bras, saisit mon poignet qu’elle plaça autour de son cou. Je l’y laissai, poing toujours fermé, ignorant jusqu’où mon envie folle de le garder vivant était susceptible de me mener. Pendant ce temps-là, ses lèvres, incroyablement douces et chaudes, cherchaient à m’arracher une réaction.

  Dès qu’il fut certain que je ne le lâcherais pas, il libéra mon poignet, et sa main tâtonna en direction de ma hanche, puis glissa sur mes reins et me serra avec une force inouïe contre lui, me cassant en deux. Sa bouche abandonna le combat un instant, même si je devinai qu’il n’en avait pas fini avec moi. Elle suivit le contour de ma mâchoire, puis explora le creux de mon cou. Il lâcha mes cheveux, positionna d’office mon deuxième bras près du premier — autour de sa nuque. Il emprisonna ma taille, ses lèvres frôlèrent mon oreille.

  — Tu peux faire mieux que ça, Bella, murmura-t-il d’une voix rauque. Tu réfléchis trop.

  Je frissonnai lorsque ses dents agacèrent mon lobe.

  — Oui, marmonna-t-il. Une fois, rien qu’une fois dans ta vie, laisse-toi aller.

  Instinctivement, je secouai la tête. D’une main ferme, il arrêta mon geste. Sa voix se fit acide.

  — Es-tu vraiment sûre de ne pas préférer que je meure ?

  Je me cabrai sous l’effet de la colère. C’en était trop, il n’était pas fair-play. Serrant mes doigts autour de ses cheveux, je tirai de toutes mes forces pour éloigner son visage du mien, en dépit de la douleur de ma main abîmée.

  Jacob se méprit. Il était trop fort pour saisir que je cherchais à lui faire mal. Il confondit ma colère avec de la passion. Il crut que je répondais enfin à son appel. Haletant de désir, il ramena ses lèvres sur les miennes, cependant que ses doigts trituraient mes hanches. Une nouvelle bouffée de rage m’envahit, ravageant le peu de contrôle que j’essayais de garder sur moi. Sa réaction fougueuse acheva de miner mes meilleures résolutions. N’eût-il été que triomphant, j’aurais réussi à lui résister ; mais son abandon absolu, son ivresse joyeuse me firent perdre toute raison. Je lui rendis son baiser avec une ardeur pour moi nouvelle — je n’avais pas besoin de me montrer prudente avec Jacob ; quant à lui, il ne songeait même pas à me ménager.

  Mes doigts raffermirent leur prise autour de ses cheveux — pour l’attirer à moi, cette fois.

  Il était partout. Derrière mes paupières, le soleil rougeoya, couleur violente qui s’accordait à la chaleur de notre étreinte. Une brûlure qui était, elle aussi, p
artout. Je ne voyais, ne sentais, n’entendais plus rien qui ne fût Jacob. Le seul neurone qui me restait entreprit de hurler des questions. Pourquoi ne mettais-je pas un terme à cela ? Pire, pourquoi ne désirais-je pas y mettre un terme ? Pour quelle raison n’avais-je pas envie que cela se termine ? Pour quelle raison mes mains agrippaient-elles ses épaules, appréciaient-elles que ces dernières soient carrées et fortes ? Pour quelle raison aimais-je tant que ses mains à lui me serrent trop fort, trop fort et pourtant pas assez pour me rassasier ?

  Questions idiotes. La réponse était simple — je m’étais menti à moi-même.

  Jacob avait eu raison. Depuis le début. Il était plus que mon ami. Voilà pourquoi il m’était impossible de lui dire au revoir. Je l’aimais aussi. Je l’aimais d’amour. Je l’aimais plus qu’il n’aurait fallu, mais d’un amour hélas insuffisant pour changer quoi que ce soit, juste assez puissant pour nous blesser tous deux. Pour le blesser comme jamais.

  Seule sa souffrance m’importait, cependant. Moi, je méritais d’avoir mal. J’espérais même que j’aurais très mal.

  Nous ne faisions plus qu’un. Sa douleur avait toujours été et serait toujours la mienne ; à présent, son bonheur était le mien aussi. J’étais heureuse, bien que son contentement fût teinté d’un chagrin presque tangible, qui m’irradiait la peau comme de l’acide, lente torture.

  L’espace d’un très bref instant, un chemin entièrement différent se déroula devant mes paupières baignées de larmes. Comme si je regardais à travers le filtre des pensées de Jacob, je vis ce à quoi j’allais renoncer. Je vis Charlie et Renée mêlés à Billy, Sam et La Push dans un étrange collage. Je vis les années qui passaient et me transformaient. Je vis l’énorme loup aux reflets cuivrés que j’aimais, mon protecteur à vie. Durant une fraction de seconde, je vis les têtes de deux enfants noirs de cheveux qui me fuyaient pour se réfugier dans la forêt familière. Lorsqu’ils disparurent, ils emportèrent ma vision avec eux.

  Alors, je sentis mon cœur se fissurer en deux parts inégales, la plus petite s’arrachant à l’autre en provoquant une douleur atroce.

 

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